Il y a deux questions que je voudrais vous poser à ce stade. La première est relative au grand soin que vous apportez à la bonne compréhension des textes, même quand ils sont d'application directe, sur lequel vous avez insisté au début de nos échanges. Vous avez parlé d'interprétations divergentes et du soin qui est apporté pour que chacun comprenne bien. Cela me laisse perplexe. J'aimerais que vous puissiez nous donner un exemple pour nous éclairer. Je ne suis pas un juriste à la base, mais j'ai l'impression que le niveau de précision de la loi et du règlement, en France, est inouï. Je ne comprends pas que nous ayons encore besoin, avec ce niveau de précision, de veiller à ce que l'interprétation se fasse correctement. J'avais retenu le fameux cas de la définition de la responsabilité civile dans le code civil, un texte qui n'a pratiquement pas bougé pendant deux siècles jusqu'à ce que Robert Badinter le fasse évoluer au début des années 80. Les notions de préjudice, de fait générateur, de lien de cause à effet, ont suffi pour juger tous les cas de responsabilité civile pendant deux siècles. C'est une loi qui est géniale ! Tout le monde peut la comprendre et ce n'est pas la peine d'écrire trois décrets et quinze circulaires pour l'appliquer.
Pouvez-vous nous expliquer pourquoi nous en sommes là, malgré la quantité de normes et malgré le niveau de précision et l'expertise juridique qu'il faut pour écrire la loi ?
La deuxième question porte sur le lien entre les administrations centrales et les services déconcentrés et sur le rôle des préfets. Le voeu de la majorité et du Président de la République est de faire davantage des préfets les patrons de l'État là où ils sont en poste, ce qui est d'ores et déjà prévu dans la loi, mais n'est pas complètement le cas dans les faits. Qui sont les patrons des fonctionnaires des services déconcentrés ?
Pour nous, s'agissant de l'application des lois qui concernent les collectivités territoriales, cela a beaucoup plus de sens que le préfet soit vraiment le représentant de l'État et donc le patron des services de l'État qui sont présents et qui agissent sur le territoire.
Est-ce que dans le jeu entre une administration centrale qui est une espèce de passage obligé et une préfecture qui peut parfois faire le lien entre Paris et l'échelon local, il n'y a pas quelque chose qui tient de la rivalité entre administrations, qui explique aussi parfois que, dans la phase d'élaboration elle-même, on se retrouve avec des lois qui sont mal faites parce qu'il y a, un peu, une administration qui a joué contre une autre.
Je vous parle très franchement et je voudrais que vous soyez le plus libre possible dans votre réponse.