La séance est ouverte à 18 heures 05.
Présidence de Mme Cécile Untermaier, présidente
La mission d'information sur la concrétisation des lois entend M. Stanislas Bourron, directeur général des collectivités locales au ministère de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mes chers collègues, nous recevons ce soir M. Stanislas Bourron, directeur général des collectivités locales (DGCL) au ministère de la Cohésion des territoires, qui est accompagné de M. Frédéric Papet, sous-directeur des compétences et des institutions locales.
Je rappelle que nous avons décidé de commencer nos travaux par une série d'auditions générales, afin de mieux comprendre la vie de la loi après sa promulgation et sa publication au Journal officiel, c'est-à-dire lorsqu'il revient au pouvoir exécutif de prendre les mesures réglementaires nécessaires, puis de la mettre en oeuvre sur le terrain. Notre objectif est de mettre en lumière les points de blocage et leurs causes, afin d'essayer de fluidifier l'ensemble pour s'assurer que la volonté du législateur est bien respectée. Nos premières auditions ont surtout porté sur le rôle de structures interministérielles parisiennes, le secrétariat général du Gouvernement, la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) et la direction interministérielle du numérique (Dinum).
Nous avons souhaité vous entendre, M. Bourron, pour aborder la question de la mise en oeuvre des lois par les collectivités territoriales, question sur laquelle nous reviendrons ensuite en recevant les représentants des différents niveaux de collectivités.
Je précise que cette audition est ouverte à la presse, retransmise en direct sur le site internet de l'Assemblée nationale et qu'elle fera également l'objet d'un compte rendu.
Je vous donne la parole, si vous en êtes d'accord, pour un propos liminaire d'une dizaine de minutes.
Je pense que le mieux serait peut-être de répondre aux questions que vous nous avez adressées, qui sont assez nombreuses.
En introduction, je voudrais insister sur la particularité de l'application des lois concernant les collectivités locales. La Constitution dispose que seule la loi peut imposer des obligations aux collectivités locales et porter ainsi atteinte à leur « libre administration ». De ce fait, le dispositif de mise en oeuvre de la loi prend une connotation un peu différente dans l'univers des collectivités, puisque la loi est assez souvent d'application directe vis-à-vis des collectivités, quel que soit leur niveau. Elle est assez riche et complète, contrairement à d'autres champs d'intervention, dans lesquels la loi fixe des principes et laisse au pouvoir réglementaire un domaine beaucoup plus large. Nous avons donc nécessairement des lois beaucoup plus volumineuses, qui peuvent être accompagnées par un dispositif réglementaire lui-même soumis à un encadrement spécifique, fixé par la loi. Ainsi, le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) donne un avis sur toutes les dispositions réglementaires découlant d'une loi qui concerne les collectivités pour vérifier que l'esprit de la loi est respecté et qu'il n'y a pas d'atteinte à la libre administration, au bon fonctionnement et aux intérêts des collectivités territoriales.
En résumé, dans le champ des collectivités, la loi doit elle-même prévoir un certain nombre de dispositions et renvoie peu au pouvoir réglementaire, qui est donc moins présent que dans d'autres domaines. C'est un point que je voulais préciser en ouverture de cet échange.
J'irai également droit au but. Nous avons déjà auditionné des personnalités qui connaissent parfaitement la problématique de l'application des lois, telle que le directeur interministériel à la transformation publique ou le secrétaire général du Gouvernement. Cette audition est au moins aussi importante à nos yeux, parce qu'au-delà de ce que nous savons déjà sur les particularités des collectivités locales dans notre pays, nous voudrions bien comprendre ce que nous pouvons améliorer dans l'application des lois grâce – ou malgré, c'est à vous de nous le dire – à la place importante des collectivités locales. Il y a l'existant, il y a aussi le futur avec le projet de loi qui va être présenté par Sébastien Lecornu. Comment l'anticipez-vous, du point de vue de l'efficacité de l'application des lois ? Je vous demande d'entendre l'expression « application des lois » au sens le plus large possible, c'est-à-dire la mise en application d'une norme, qu'elle soit réglementaire ou législative, qui doit « descendre sur le terrain », si vous me passez cette expression que les parlementaires comprennent bien.
Ce qui me paraît le plus important est de savoir comment, aujourd'hui, on parvient à concrétiser rapidement et efficacement une loi sur un territoire, et question annexe, si cela varie selon les territoires. Pouvez-vous nous donner des exemples de lois dont l'application fonctionne bien partout, bien dans certains endroits ou mal partout, et qui vous ont marqué en raison d'une méthodologie ou d'un mécanisme particulier, qu'il vous semblerait pertinent de nous présenter ?
La deuxième question qu'il me paraît important d'aborder, c'est la spécificité des territoires. Le pouvoir réglementaire et le législateur doivent la prendre en compte. Pensez-vous que c'est aujourd'hui suffisamment le cas, dans la manière dont la loi est votée et appliquée ? Faudrait-il davantage intégrer cet élément, toujours dans un but d'amélioration de sa concrétisation ?
Il y a un dernier sujet, très précis, que je trouve essentiel : comment jugez-vous aujourd'hui les relations entre les préfets et les exécutifs des collectivités locales, dans le cadre de l'application des lois ? Comment pourraient-elles, demain, à votre sens, être améliorées ?
Sur les modalités d'application de la loi sur le terrain, comme je le disais, la particularité du dispositif relatif aux collectivités est de prévoir un certain nombre de dispositions d'application directe et immédiate, qui sont censées – sans beaucoup de mesures d'application, voire parfois sans mesure d'application du tout, sous réserve d'une date de prise d'effet ultérieure – être appliquées par les collectivités et leurs établissements et contrôlées dans leur mise en oeuvre par le représentant de l'État – on y reviendra avec votre troisième question autour de la relation entre préfets et collectivités.
Dans le cadre de ces modalités, la mécanique est assez classique. Lorsqu'il y a besoin de dispositifs réglementaires, les textes doivent maintenant être publiés dans des délais très contraints. Le secrétaire général du Gouvernement a dû vous rappeler la grande attention qu'il porte au respect du délai de six mois. C'est un élément très important. L'ensemble des administrations, dont nous faisons partie, est amené à rédiger les décrets extrêmement rapidement. Si je prends l'exemple de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, qui comporte tout un volet concernant la fonction publique territoriale, la DGCL doit produire, en lien avec les services de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), des textes d'application. Nous avons des priorités déterminées et nous sommes en train de mener les consultations requises, par exemple celles du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) et du CNEN, et de préparer l'ensemble des textes réglementaires nécessaires à la mise en oeuvre de cette loi. Tout cela vise effectivement à permettre l'applicabilité la plus rapide possible de la loi.
Par ailleurs, un certain nombre de mesures n'exige pas de dispositif réglementaire. Dans ce cas, la mécanique ancienne de la circulaire qui expliquait le contenu des dispositions nouvelles fait aujourd'hui place à des outils plus modernes. Ils suivent le même état d'esprit : il s'agit de notes d'information, de documents de communication mis en ligne sur les sites internet et intranet, diffusés à tout un réseau, qui peuvent être ensuite repris et communiqués au plus grand nombre via les réseaux internet et les échanges de mails, voire la mise en ligne sur d'autres sites. L'objectif de ces documents d'information est d'expliquer l'articulation de l'ensemble des dispositions législatives adoptées et comment elles doivent être lues, comprises et mises en oeuvre.
Ces réseaux de communication sont, pour nous, de différentes natures. Nous travaillons avec deux réseaux. Le premier est celui de l'État, les services déconcentrés, sur lesquels nous nous appuyons puisque nous sommes encore un service rattaché au ministère de l'Intérieur, notamment le réseau des préfectures qui relayent ces informations. Le second est celui des associations d'élus avec lesquelles nous travaillons très régulièrement, pour bien nous mettre d'accord sur l'interprétation des textes et, ensuite, communiquer de notre côté, avec ou sans elles, des éléments d'information aux collectivités territoriales. Cela permet d'éviter les interprétations divergentes qui sont ensuite source de grande complexité. C'est un point auquel nous sommes très attentifs : il faut prendre le temps – quelques semaines, quelques mois tout au plus – pour parvenir à une explication claire, lisible, intelligible et la partager avec les grands acteurs des réseaux nationaux, qui la communiquent aux 34 900 communes, aux départements, aux 1 200 intercommunalités. Cela fait beaucoup de structures, beaucoup de personnes, qui peuvent parfois ne pas tout à fait comprendre la même chose. Il est très important d'avoir un message clair, lisible, partagé, qui puisse être communiqué sur le terrain. Ces deux réseaux, à travers ces documents d'information, donnent le ton et rappellent aussi les calendriers de mise en oeuvre. C'est important car les dispositions ne s'appliquent pas toutes à la même date. Si je prends l'exemple récent de la loi du 1er août 2019 visant à adapter l'organisation des communes nouvelles, adoptée par le Parlement cet été, il y a des dispositions d'application immédiate, d'autres applicables après les élections municipales, d'autres avec une temporalité encore différente. Nous avons établi un document de synthèse, assez simple, permettant à chacun, notamment à un maire intéressé par ce sujet, de s'y retrouver, pour savoir ce qui change dans le dispositif législatif et à quel moment.
La première étape consiste donc à mettre en oeuvre ces outils de communication. L'étape suivante, c'est le conseil, qui est très important et mené à tous ces échelons. On reviendra peut-être sur l'échelon déconcentré, que vous évoquiez tout à l'heure, mais prenons le cas de l'administration centrale : la DGCL répond à énormément de demandes légitimes autour de l'interprétation qui doit être faite de tel ou tel sujet complexe. Cela peut prendre différentes formes : un courrier parlementaire ou non parlementaire, une question écrite émanant d'un parlementaire – environ 1 500 questions écrites sont traitées chaque année par la DGCL – ou une consultation adressée à un ministre. Ces questions demandent assez souvent une interprétation de dispositions complexes. Je pense par exemple au droit funéraire, qui est parfois compliqué et qui pose des problèmes d'interprétation. On explique ce que l'on peut faire et ce que l'on ne peut pas faire.
Concernant l'application différente selon les territoires, que vous évoquiez, c'est un sujet de fait plus que de droit puisque la loi, une fois adoptée, doit s'appliquer partout, même si elle peut prévoir des dispositions d'application différentes selon les territoires du fait de leurs particularités. C'est le cas, par exemple, de la loi du 2 août 2019 relative aux compétences de la collectivité européenne d'Alsace, qui prévoit une organisation spécifique parce qu'il y a des motifs d'intérêt général qui le permettent. Sinon, en règle générale, la loi peut prévoir des organisations différenciées selon les populations et les territoires, mais elle établit un cadre juridique commun. Le fait est qu'elle n'est pas systématiquement appliquée de la même façon partout. Je verrais – et c'est une appréciation personnelle – une ou deux raisons qui peuvent expliquer les difficultés de mise en oeuvre. Il y a d'abord le caractère extrêmement complexe des mesures. La direction générale, que je représente, rédige des projets de textes qui, votés par le Parlement, produisent de la norme. Nous pouvons produire parfois des textes qui s'avèrent complexes, parce que le processus fait qu'à partir d'une idée très simple, on prévoit finalement des dérogations, des renvois qui ne sont pas si simples. Nous pouvons arriver parfois à un résultat qui n'est pas très lisible, malgré les efforts de tous. Parfois, notre loi n'est pas très bien comprise, il faut le reconnaître, d'où l'importance de la fonction de conseil. Par ailleurs, parfois, elle n'est pas acceptée, ce qui est très différent. Il arrive que des autorités locales n'acceptent pas les nouvelles normes. Elles ne refusent pas nécessairement de les mettre en oeuvre dans toutes leurs dispositions, mais considèrent qu'elles ne sont pas adaptées, qu'elles ne correspondent pas à ce qui est souhaitable et peuvent donc ne pas être très engagées dans leur mise en oeuvre. La non-acceptation de la loi peut aussi s'expliquer par le refus d'un texte qui ne paraît pas approprié aux problèmes rencontrés localement. Si je prends l'exemple d'un sujet qui a fait débat et qui va faire débat dès demain en commission des Lois, la question de l'eau et l'assainissement, le transfert voulu par le législateur...
Le transfert initial est prévu par une loi votée par une autre majorité. Le constat de départ est celui d'une multiplication du nombre d'opérateurs dans le domaine de l'eau et de l'assainissement dans un contexte d'importants enjeux environnementaux, d'énormes enjeux d'investissement dans ce domaine – investissements qui ne sont pas à la portée de la plupart des communes – notamment sur les réseaux, qui présentent des taux de fuite très importants, et alors que l'organisation intercommunale peut reposer sur des syndicats parfois très anciens, dont la pertinence est variable, et est parfois très éclatée ou parfois unifiée selon les territoires.
De ce fait, lorsqu'il a été décidé que l'eau et l'assainissement devaient devenir des compétences obligatoires des intercommunalités, cela a été perçu à certains endroits comme une avancée souhaitable et nécessaire parce que répondant à un vrai besoin, mais à d'autres endroits, cela est apparu inadapté, soit car il y avait déjà des organisations qui fonctionnaient, soit parce qu'il n'y avait pas d'organisation mais pas non plus de volonté de faire évoluer les choses, dans la mesure où on considérait pour diverses raisons que, finalement, le statu quo pouvait avoir un intérêt. Le fait est que ces différents cas d'espèce pouvaient mener à ce que la perception de cette loi soit négative. Cette situation a conduit à revenir sur le sujet, dans le cadre d'un débat parlementaire, afin de prévoir des mesures d'assouplissement relatives notamment aux modalités calendaires de mise en oeuvre et à la minorité de blocage – tout un processus pour essayer de faciliter son acceptation. Dans le projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, de nouveaux assouplissements sont proposés pour reconnaître, au niveau national, l'objectif d'intérêt général de partager un investissement important sur des questions qui ne peuvent pas être traitées de façon exclusivement communale, au regard de leurs enjeux écologiques, environnementaux et financiers. Pour autant, on ne peut pas faire table rase de ce qui existait par le passé et qui, à certains endroits, a pu fonctionner.
Voici l'exemple d'une loi qui a un vrai sens mais peut rencontrer des difficultés d'application parce qu'elle n'est pas parfaitement adaptée à toutes les situations locales et que les élus ne se la sont pas appropriée.
Je vous remercie beaucoup pour ces explications et pour la tonalité de votre discours.
Je pense que c'est une question fondamentale. La compétence « eau et assainissement » est un exemple de loi qui n'aurait peut-être jamais dû être, parce qu'elle aurait dû passer au tamis des réalités de territoire et qu'elle a été en fait imposée, me semble-t-il, de manière un peu trop technocratique. Elle n'a finalement pas correspondu aux possibilités de l'ensemble des territoires. Là, c'est plutôt dans la fabrique de la loi que le problème a trouvé sa source.
Nous nous intéressons surtout à la partie « aval » de la concrétisation de la loi. La DGCL travaille de manière très régulière avec les préfets qui contrôlent l'application de la loi. Par rapport à nos préoccupations, vous semble-t-il possible et utile, pour un parlementaire, d'être aux côtés du préfet pour, à la fois, expliquer aux élus la loi que lui-même a votée et contrôler, avec le préfet, son application ? Il nous semble, à ce stade, que le parlementaire est le grand absent du dispositif et apprend seulement au moment de la présentation d'un nouveau projet de loi, que la loi qu'il avait votée il y a quelques années ne fonctionne pas sur le territoire.
Je voudrais juste ajouter un point par rapport à votre dernière phrase. Vous dites effectivement qu'il peut y avoir des difficultés, parce que les élus locaux ne se sont pas approprié une loi. Avez-vous des cas concrets de lois que les élus se sont bien appropriées, malgré des spécificités locales qui auraient pu faire qu'elles posent problème, par exemple parce que les spécificités locales et territoriales ont été pensées et prises en compte en amont ? Nous rédigerons un rapport qui doit servir d'outil aux parlementaires, mais pas uniquement. Il peut aussi être utile au Gouvernement, pour mieux appliquer des lois. Nous connaissons pas mal de situations bouchées et nous ne sommes pas contre des exemples de tuyaux qui fonctionnent bien !
Tout d'abord, ces dernières années, il y a eu un grand nombre de lois concernant les collectivités locales. Elles comptent généralement beaucoup d'articles et je crois qu'il ne faudrait pas exagérer le nombre des articles de ces lois ou des sujets qui poseraient des difficultés dans leur appropriation. Pour autant, comme il s'agit de normes pesant sur les collectivités, la contrainte n'est pas toujours très bien vécue par les 34 900 communes et 1 200 intercommunalités. Il y a toujours des élus qui trouvent que cela n'est pas adapté à leur situation : on ne pourra jamais répondre à 34 900 situations, c'est évident.
Il faut donc déjà avoir en tête que la mise en oeuvre de la loi ne me semble pas, en matière de collectivités locales, si impossible ou si difficile que cela. Je vous ai cité des exemples sur lesquels il y a un problème récurrent et un débat depuis plusieurs années sur une question de compétence intercommunale. Nous ne citons pas de nombreux autres domaines qui ont été transférés aux intercommunalités et qui aujourd'hui font beaucoup moins débat. Prenons le cas par exemple de la compétence sur les déchets : personne, aujourd'hui, ne remettrait véritablement en cause la compétence intercommunale dans ce domaine. Les débats sur le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire ont d'ailleurs montré que cette compétence était totalement intégrée comme ayant une vocation intercommunale. C'est un exemple, mais je considère que la loi, globalement, ne rencontre pas de difficultés majeures d'appropriation. On a pu avoir des débats ponctuels, sur des sujets sensibles, mais pas systématiquement.
Un exemple et peut-être une méthode, puisque vous cherchez des moyens pour faciliter l'appropriation de la loi : je rejoins ce que vous disiez, madame la présidente, sur le lien profond entre l'aval et l'amont. Si l'on veut qu'en aval, la mise en oeuvre se fasse dans de bonnes conditions, il faut que le travail en amont ait permis d'abord d'établir un projet qui réponde pour l'essentiel aux aspirations majoritaires et aux besoins tels qu'ils ont été identifiés, et qui a été co-construit avec les représentants des collectivités locales, les parlementaires, donc qui a fait l'objet de beaucoup d'échanges. Quand le texte a été bien compris et souhaité en amont, généralement, sa mise en oeuvre se passe plus aisément en aval, même s'il peut y avoir des hostilités ou des difficultés ponctuelles.
Sur la relation entre préfets et collectivités territoriales : d'abord, en application de l'article 72 de la Constitution, le préfet a la charge du contrôle administratif de la mise en oeuvre de la loi. Il y a deux mécaniques. La principale, que l'on privilégie, est celle du conseil et consiste à expliquer, conseiller et apporter des éléments d'appui lorsque les collectivités ont des interrogations ou rencontrent des difficultés. C'est un travail discret, qui passe « sous les radars », mais qui est extrêmement important et qui représente l'essentiel de l'activité, notamment des sous-préfets, des préfets et des personnels des préfectures et des services territoriaux de l'État qui travaillent, en lien avec les acteurs locaux, à mettre en place et déployer la loi.
Par ailleurs, en cas de difficultés de mise en oeuvre, y compris le non-respect de la loi, le préfet assure le contrôle de légalité, qui est une particularité prévue par la Constitution. Je voudrais signaler qu'il connaît ces dernières années un regain non négligeable, ce qui ne veut pas dire qu'il y a plus de problèmes, mais plutôt qu'il y a une grande sensibilité à l'importance de la bonne mise en oeuvre de la loi, avec notamment un nombre de déférés – qui ne sont pas une fin en soi, mais qui sont un indicateur comme un autre – qui augmente substantiellement en matière de contrôle de légalité. Nous pourrons vous communiquer quelques chiffres.
Le contrôle est désormais concentré sur les actes à enjeu mais, sur ces actes-là, on cherche à ce que la loi soit mise en oeuvre dans les meilleures conditions avec un contrôle de légalité exigeant, qui a été renforcé dans ses moyens ces dernières années dans le cadre du plan Préfectures nouvelle génération. Ont été mises en place de petites équipes compétentes, en mesure d'apporter un appui en conseil et le cas échéant, en contrôle, aux collectivités locales.
Quant à l'association des parlementaires, madame la présidente, vous avez raison, c'est un élément essentiel. Sur un champ un peu différent de celui du contrôle de légalité, qui est très particulier, on voit que l'évolution est en cours, comme en atteste le rôle croissant des parlementaires dans la détermination des politiques d'État, à travers notamment les lois de finances. Nous avons notamment prévu la présence de parlementaires dans les commissions compétentes en matière de dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et trouvé les moyens de les associer plus encore que ce n'était le cas avant. Il y a donc des éléments d'évolution qu'il ne faut pas sous-estimer par rapport à la situation qui prévalait avant la fin du cumul des mandats, qui relevait d'une organisation différente. Il y a encore sans doute des progrès à faire, mais il est clair que l'objectif est de pouvoir associer et informer au mieux les parlementaires sur la mise en oeuvre des politiques d'État au niveau déconcentré. C'est le rôle des services déconcentrés, animés par le préfet.
On pourra difficilement aller plus loin dans l'intervention des parlementaires dans l'action propre des collectivités locales. Elles ont leur autonomie prévue par la Constitution, mais il faut qu'on ait la possibilité, au niveau local, de savoir ce qui est fait des moyens de l'État, dans la mise en oeuvre des politiques d'État, en lien avec les collectivités. C'est tout le sujet, y compris maintenant dans les commissions départementales de la coopération intercommunale (CDCI), ce qui n'était pas le cas il y a encore quelques années. L'idée est de permettre aux parlementaires de participer à ce débat et d'être informés de ce qui se passe en termes de politique d'État au niveau déconcentré.
Il y a deux questions que je voudrais vous poser à ce stade. La première est relative au grand soin que vous apportez à la bonne compréhension des textes, même quand ils sont d'application directe, sur lequel vous avez insisté au début de nos échanges. Vous avez parlé d'interprétations divergentes et du soin qui est apporté pour que chacun comprenne bien. Cela me laisse perplexe. J'aimerais que vous puissiez nous donner un exemple pour nous éclairer. Je ne suis pas un juriste à la base, mais j'ai l'impression que le niveau de précision de la loi et du règlement, en France, est inouï. Je ne comprends pas que nous ayons encore besoin, avec ce niveau de précision, de veiller à ce que l'interprétation se fasse correctement. J'avais retenu le fameux cas de la définition de la responsabilité civile dans le code civil, un texte qui n'a pratiquement pas bougé pendant deux siècles jusqu'à ce que Robert Badinter le fasse évoluer au début des années 80. Les notions de préjudice, de fait générateur, de lien de cause à effet, ont suffi pour juger tous les cas de responsabilité civile pendant deux siècles. C'est une loi qui est géniale ! Tout le monde peut la comprendre et ce n'est pas la peine d'écrire trois décrets et quinze circulaires pour l'appliquer.
Pouvez-vous nous expliquer pourquoi nous en sommes là, malgré la quantité de normes et malgré le niveau de précision et l'expertise juridique qu'il faut pour écrire la loi ?
La deuxième question porte sur le lien entre les administrations centrales et les services déconcentrés et sur le rôle des préfets. Le voeu de la majorité et du Président de la République est de faire davantage des préfets les patrons de l'État là où ils sont en poste, ce qui est d'ores et déjà prévu dans la loi, mais n'est pas complètement le cas dans les faits. Qui sont les patrons des fonctionnaires des services déconcentrés ?
Pour nous, s'agissant de l'application des lois qui concernent les collectivités territoriales, cela a beaucoup plus de sens que le préfet soit vraiment le représentant de l'État et donc le patron des services de l'État qui sont présents et qui agissent sur le territoire.
Est-ce que dans le jeu entre une administration centrale qui est une espèce de passage obligé et une préfecture qui peut parfois faire le lien entre Paris et l'échelon local, il n'y a pas quelque chose qui tient de la rivalité entre administrations, qui explique aussi parfois que, dans la phase d'élaboration elle-même, on se retrouve avec des lois qui sont mal faites parce qu'il y a, un peu, une administration qui a joué contre une autre.
Je vous parle très franchement et je voudrais que vous soyez le plus libre possible dans votre réponse.
Je vous rejoins sur le fait qu'on puisse s'interroger sur la nécessité d'aller expliquer des textes qui sont parfois assez longs, qui comptent un nombre d'articles important et souvent précis, ce qui est une obligation en matière de collectivités locales et est encore plus vrai lorsque l'on a des décrets qui apportent encore plus de précisions.
Je vois deux explications. La première, la plus satisfaisante, est de dire que notre travail vise aussi à « vulgariser », à rendre accessibles les terminologies qui ne sont pas évidentes pour tout le monde, pour tous nos lecteurs, pour tous les usagers, pour tous les contribuables et administrés. C'est vrai que les termes de la loi sont juridiquement appropriés, mais ne « parlent » pas nécessairement à tous lecteurs que l'on peut trouver parmi les 60 0000 élus locaux de France.
J'évoquais, sur les communes nouvelles, un tableau synthétique qui évitait à un élu intéressé d'aller chercher dans chacun des articles ce qui était d'application immédiate et ce qui ne l'était pas, ce qui concernait les communes nouvelles les plus grandes, les moins grandes, ce qui était financé ou pas... Cela permet de rendre plus accessible ce qui a été voté par le législateur selon des configurations normales, avec des articles qui modifient les dispositions codifiées, qui parfois renvoient à plusieurs codes. Cela est normal en droit, mais n'est pas forcément très facile à suivre pour le lecteur de la loi.
Prenons un exemple très concret. Quand vous intervenez dans un code, vous n'allez pas réécrire forcément tout un article, vous allez parfois modifier trois mots. Effectivement, en tant que parlementaires, pendant le débat, vous avez un exposé des motifs, vous comprenez. Mais lorsque vous êtes le lecteur de la loi votée, ce n'est pas forcément une évidence, donc il faut expliquer, vulgariser, dans le bon sens du terme.
La seconde explication tient à ce que l'on peut avoir, dans des débats parlementaires riches, avec des positions qui sont parfois antagonistes sur certains points, des dispositions qui, sans être contradictoires, ne s'articulent pas forcément parfaitement du point de vue légistique à l'issue du vote définitif. Dans ce cas, nous avons besoin de rappeler l'intention du législateur. Au lieu d'attendre qu'un contentieux donne au juge l'occasion de rappeler ce que voulait le législateur, nous faisons un travail d'explication : « là, il est écrit ça, mais en fait, il faut bien le comprendre comme étant ceci et pas cela ». C'est d'ailleurs toute l'importance des recueils des débats parlementaires, sur lesquels nous nous appuyons. On dit comment il faut comprendre un texte, ce qui est très important. Cela permet d'éviter les mauvaises interprétations dont je parlais tout à l'heure parce qu'une phrase sibylline peut être interprétée différemment et conduire à des contentieux. Il est même arrivé que des circulaires fassent l'objet de contentieux, parce que l'interprétation que l'on y donnait était considérée comme n'étant pas celle que le législateur avait voulu donner au texte.
Le rôle interministériel de régulation que le secrétaire général du Gouvernement, qui est placé sous l'autorité du Premier ministre, a dû rappeler, vise normalement à éviter le risque de discordance dans l'activité de production normative des ministères. Le secrétaire général du Gouvernement y parvient plutôt bien. Mais il arrive que plusieurs projets de textes discutés en même temps abordent des sujets très proches. Les pouvoirs de police, par exemple, sont traités par le projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique. Des ordonnances prévues par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) doivent aussi porter sur le sujet, en l'abordant par l'angle spécifique de l'habitat, de même que le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire qui concerne les pouvoirs de police relatifs aux déchets.
Il nous faut être très attentifs à la cohérence d'ensemble, ce qui passe par un gros travail interministériel.
Au niveau local, à mon sens, c'est plus simple. Le préfet est le responsable des services de l'État, modulo un certain nombre de dérogations relatives à l'autorité judiciaire, aux finances et à l'éducation. Mais le préfet a un rôle important dans la mise en oeuvre de l'ensemble des politiques publiques et, concrètement, c'est lui qui est la vraie autorité de coordination dans la mise en oeuvre de dispositions législatives et réglementaires, pour le compte de l'État. De ce point de vue, les textes de la Constitution n'appellent aucun débat.
Vous venez, je crois, de mettre le doigt sur ce qui a déclenché la création de cette mission. C'est toute cette réinterprétation de la loi qui fait que, vous le dites vous-même, vous en arrivez à rédiger des circulaires qui sont parfois jugées au contentieux comme étant non conformes à l'esprit du législateur, et qui parfois ne nous semblent effectivement pas traduire notre propre volonté de législateur. Nous voudrions justement nous assurer de la neutralité du processus, afin de garantir ce respect de l'esprit des lois.
Vous avez cité le Conseil national des normes, mais il existe aussi de nombreux conseils et je voudrais savoir, d'après vous, quels sont les apports de ces différents conseils, une fois la loi votée, sur la production de ces interprétations parce que, comme vous disiez, tous nos textes ne sont pas forcément reçus avec le même élan d'adhésion. Or, il se trouve que, dans ces conseils, siègent de nombreuses associations d'élus. Comment pouvons-nous être sûrs que ces interprétations sont bien conformes à notre volonté, y compris quand il n'y a pas un grand élan d'adhésion ?
Ce que vous dites sur les pouvoirs de police est intéressant. Je suis très souvent confrontée à des maires qui refusent d'exercer ces pouvoirs de police et qui se défaussent systématiquement sur le préfet et l'État. Vous nous avez parlé du contrôle de légalité, de la hausse constatée des cas de mauvaise application de la loi, mais est-ce que vous observez aussi des détournements et des contournements de la loi par des élus locaux, qui s'en remettent au préfet et à l'État directement ?
Sur la réinterprétation de la loi, j'ai le sentiment, qui reste personnel, que les services que j'ai l'honneur de diriger sont très attentifs aux débats parlementaires sur les champs qui sont les nôtres ; d'ailleurs, dans tous les contentieux que nous avons pu avoir sur les textes que nous avons pris, le juge nous a toujours donné raison. C'est donc que nous ne nous sommes pas trop trompés puisque le juge administratif, comme d'ailleurs le juge constitutionnel, va lui aussi vérifier dans les débats parlementaires. Il s'agit justement d'essayer, même si parfois ce n'est pas l'idée que nous pouvions avoir sur tel ou tel sujet, d'interpréter au mieux et fidèlement la pensée du législateur. Il arrive que cela soit compliqué, notamment lorsque des dispositions sont adoptées en commission mixte paritaire (CMP), parce que le Gouvernement n'y est pas représenté. Le débat peut ne pas vraiment expliciter la solution retenue. Néanmoins, il y a des nouvelles lectures qui offrent de nouvelles occasions d'expression, ce qui nous permet d'avancer. Même s'il peut y avoir ponctuellement des cas où on constate des difficultés d'interprétation, j'ai le sentiment que, pour l'essentiel, on parvient à dégager le sens voulu par le législateur, même sur les sujets les plus complexes.
Sur les instances qui interviennent dans la mise en oeuvre des lois, j'en citerai deux qui sont de nature très différente. Le CNEN, qui est l'instance principale, existe maintenant depuis onze ans. Il a vraiment trouvé sa place et je pense qu'il faut saluer le travail accompli, parce que c'est une avancée conceptuelle majeure. L'idée qu'un conseil composé d'élus comme de représentants de l'administration puisse se prononcer, y compris en votant, et rejeter, le cas échéant, des projets de textes d'application de la loi, considérant qu'ils ne sont pas conformes soit à l'esprit de la loi, soit à la façon dont les collectivités voient son application, c'est quelque chose qui n'était pas évident il y a encore quinze ans. Cette instance a parfaitement trouvé sa place en se positionnant d'ailleurs plutôt comme un partenaire constructif que comme une instance bloquante, parce que l'intérêt collectif est de mettre en oeuvre la loi, de ne pas bloquer les décrets et de permettre qu'ils soient publiés. Le conseil rappelle, notamment dans ses avis, le sens et l'orientation que les collectivités locales veulent donner à telle ou telle disposition et quelles sont les difficultés prévisibles dans sa mise en oeuvre. Il alerte le Gouvernement sur ce qui lui semble poser problème, le cas échéant, en proposant des modifications. Il arrive régulièrement que les textes présentés au CNEN soient modifiés, conformément aux orientations qu'il a données.
Un autre exemple est le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), qui est de nature un peu différente, puisque c'est une instance de consultation paritaire qui a la particularité de regrouper des employeurs, représentants des collectivités locales, en nombre identique aux représentants des personnels, en réunion syndicale confédérale, en présence de l'administration, mais qui est présidée par un élu. Sur tout le volet statutaire mis en oeuvre pour la fonction publique territoriale, ce conseil supérieur fait des amendements, propose des évolutions des textes réglementaires et étudie les projets de loi. Il peut donc aussi faire bouger les lignes, avoir un rôle d'influence dans le bon sens du terme, en attirant l'attention sur telle disposition qui ne marchera pas, sur les questions qu'elle posera pour un certain nombre d'agents de la fonction publique et, du côté des employeurs, sur les difficultés que la mise en oeuvre des dispositions pourraient générer.
Je pense que ces instances apportent une vraie plus-value en amont, parce qu'elles permettent de signaler des difficultés à venir dans la mise en oeuvre de la disposition, qui n'ont peut-être pas été vues par le rédacteur, y compris par les instances interministérielles. Elles permettent aussi de faire apparaître les points sur lesquels il faut soit que l'on fasse des modifications, soit que l'on ait conscience que l'on va peut-être avoir un problème de compréhension. Je pense que ce sont des instances extraordinairement utiles aujourd'hui. Elles n'ont pas pour logique de contrecarrer la mise en oeuvre de la loi. Notamment au sein du CNEN, un certain nombre de membres sont d'anciens parlementaires et connaissent très bien le rôle de chacun. Il est très clair qu'on se soucie de la qualité de la mise en oeuvre et que l'on ne vise pas la modulation ou l'évolution du sens de ce qui était souhaité par le législateur.
Cela rejoint le sujet que vous évoquiez sur le pouvoir réglementaire. Laisser une marge de manoeuvre au pouvoir réglementaire local permet aussi généralement de faciliter la mise en oeuvre de la loi, avec le risque, néanmoins, qu'on arrive à une application un peu différente selon les endroits où l'on se trouve.
Sur les pouvoirs de police, je serai très rapide. D'abord, il y a des textes qui prévoient que le préfet peut se substituer au maire s'il n'exerce pas ses compétences. Ce n'est pas si courant, mais cela arrive. Par ailleurs, le préfet dispose directement d'un certain nombre de pouvoirs de police. Je n'ai pas le sentiment qu'on ait des problèmes majeurs de maires qui n'exercent pas leurs pouvoirs spéciaux de police administrative, même si certains sont parfois transférés à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), ou leurs pouvoirs de police générale. Mais on peut effectivement rencontrer des difficultés à certains endroits, et c'est là que le contrôle de légalité intervient. Le préfet se substitue à un exécutif local qui n'assumerait pas la plénitude de la compétence qui lui revient. À ma connaissance, on n'a jamais vu de procédures conduisant à une suspension ou à une révocation de maire à la suite de l'absence de mise en oeuvre de pouvoirs de police. Il est vrai que cela peut entraîner un risque de mise en cause pénale, mais c'est un autre sujet.
Cécile Untermaier évoquait tout à l'heure la qualité des études d'impact préalables à la discussion des projets de loi. Comment la DGCL peut-elle nous aider à enrichir et à améliorer la qualité de ces études d'impact, la difficulté étant qu'entre le dépôt d'un projet de loi d'origine gouvernementale sur le bureau d'une assemblée et sa promulgation, le texte de loi va souvent doubler voire tripler de volume, avec des articles qui vont se rajouter par voie d'amendement ? Ils sont souvent d'origine gouvernementale, très peu d'origine parlementaire, mais pendant les navettes entre l'Assemblée nationale, le Sénat et la CMP, nous n'avons pas, à notre disposition, des études d'impact réactualisées intégrant les dispositions nouvelles venues « enrichir » ces textes.
Je voulais aussi vous interroger sur l'expérimentation. Quelle est votre appréciation aujourd'hui des lois que nous votons ici qui permettent, dans un premier temps, d'expérimenter des dispositions dans certains territoires ? Je vais citer deux exemples récents : la garantie jeunes, votée en 2013 et progressivement étendue, après évaluation du dispositif sur un certain nombre de territoires où elle avait été mise en place dans un premier temps, et la loi sur les « territoires zéro chômeur de longue durée », qui donne des résultats dans les premiers territoires où le dispositif a été évalué et qui pourrait connaître une généralisation progressive, après l'amélioration de son cadre législatif.
Quelle est l'appréciation de la DGCL ?
Frédéric Papet vous donnera quelques chiffres sur le contrôle de légalité parce que cela rejoint plusieurs de vos questions.
Pour l'étude d'impact, nous sommes soumis à un contrôle. J'ai d'ailleurs connu il y a quelques années une exception soulevée par une Chambre, qui considérait que l'étude d'impact ne répondait pas aux objectifs fixés par la loi organique. Ce que vous demandez est un exercice très compliqué pour les raisons que vous venez d'indiquer, monsieur le député, à savoir qu'entre le moment où le projet de loi est déposé et le texte final, il y a des évolutions très substantielles. L'étude d'impact, aussi complète qu'elle ait pu être à un moment donné, peut effectivement être un peu décalée par rapport à ce qui se trouve dans le texte final.
Je serai plus modéré sur les évolutions des textes, qui ne sont pas systématiquement d'origine gouvernementale, même si le Gouvernement peut y être favorable. Quoi qu'il en soit, c'est le rôle du législateur de faire la loi, d'ajouter des articles si la majorité de la Chambre le décide, c'est ainsi que les choses se font. Il est très compliqué de faire des études d'impact en temps réel. Quand la mesure est relativement limitée, circonscrite, sur des communes de 10 000 à 12 000 habitants ou de 12 000 à 20 000 habitants, on peut vous dire combien cela concerne de communes ou de personnes. Mais aller au-delà est extraordinairement compliqué. Vous avez sans doute raison, c'est une des difficultés, mais vu la rapidité du processus parlementaire que nous connaissons aujourd'hui, je ne vois pas comment des êtres normalement constitués pourraient arriver en temps réel à produire des études d'impact qui sont, pour les administrations, d'une extraordinaire lourdeur, bien qu'elles soient nécessaires. Le secrétariat général du Gouvernement veille aussi à leur niveau de qualité et est très exigeant vis-à-vis des services. Ce sont des documents que nous ne pouvons commencer la plupart du temps que lorsque l'orientation finale du texte nous est communiquée. C'est à ce moment-là que nous élaborons ces documents extraordinairement denses.
Donc, produire en temps réel des études d'impact sur tous les amendements qui sont adoptés me paraît peu accessible, sauf à revoir complètement notre organisation des débats parlementaires et je ne pense pas que ce soit l'objet de votre réflexion.
Sur les expérimentations, je préciserais que celles que nous suivons de notre côté sont celles qui relèvent de l'article 72 de la Constitution. Il y en a eu très peu à ce titre-là, c'est-à-dire portant sur les compétences des collectivités. J'en prendrai une d'actualité, la tarification sociale de l'eau. C'est une expérimentation qui a été lancée il y a quelques années et qui connaîtra une généralisation dans le cadre du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, qui sera examiné en commission dès demain. C'est un amendement adopté au Sénat qui a prévu sa généralisation. On voit que des expérimentations initiées il y a plusieurs années aboutissent à une généralisation après beaucoup de débats. Pour avoir participé il y a quelques années au débat sur ce sujet, je sais qu'il y a eu des réticences et des interrogations sur les modalités de mise en oeuvre. Aujourd'hui, cela ne fait plus débat : tout le monde considère que la possibilité d'aller vers une tarification sociale de l'eau est intéressante, sachant que le dispositif laisse une grande liberté aux acteurs locaux sur les conditions de sa mise en oeuvre.
En matière d'expérimentation, il faut que vous sachiez que le projet de loi porté par Mme Gouraud, qui est en cours de préparation et qui devrait être présenté à la fin du premier semestre 2020, dit « 3D » (Décentralisation, Différentiation, Déconcentration), devrait comporter un certain nombre de mesures sur ces questions, à Constitution constante, comme on dit, puisque la réforme constitutionnelle elle-même pourrait aussi avoir des effets sur ce sujet.
Je souhaiterais vous dire que, pour nous, la DETR n'est pas le fin du fin de l'implication du parlementaire sur le territoire ! Je pense qu'on a tous ici, de manière transpartisane, la volonté de veiller à la concrétisation de la loi. Nous souhaiterions que vous puissiez nous donner des pistes de méthode nous permettant, non pas d'apprendre trois ans plus tard que finalement la loi passe mal auprès des élus, mais d'en être informés à l'instant « T ». On nous reproche de ne pas rendre compte de choses qu'on ne sait pas. Comment pouvons-nous avoir connaissance des difficultés rencontrées dans l'appropriation de la loi pour ensuite être en capacité d'agir pour y remédier ?
Sur la DETR, monsieur le directeur, il ne faut pas oublier que l'association des parlementaires visait à compenser la suppression de la réserve parlementaire. Comme le dit madame la présidente, c'est loin d'être une fin en soi : c'est à peine un outil pour compenser la suppression de la réserve.
La deuxième chose que je voudrais dire, c'est que nous ne sommes pas du tout dans une logique de rapport de force et de pouvoir, en voulant placer des parlementaires dans des instances. Notre logique est celle de l'efficacité et de pouvoir participer à la bonne application d'une loi. Nous pensons, peut-être de façon immodeste, que, comme nous la votons et l'amendons, nous sommes légitimes pour faire cette pédagogie auprès des différents acteurs dans les territoires, pour s'assurer de sa bonne application. Ce n'est vraiment pas une question de séparation de pouvoirs et de rapport de force ; nous voulons juste contribuer à une meilleure efficacité.
Je ne vais pas vous faire plaisir : je suis dans le concret pur et simple. Je rejoins ce qu'a dit ma collègue Cendra Motin sur les pouvoirs de police. Vous avez la bienveillance de penser que très peu d'élus cèdent leurs pouvoirs de police aux préfets, j'ai une impression complètement opposée. J'ai été maire, je connais les maires de petites communes qui m'entourent et je peux vous dire que, lors de discussions très informelles, beaucoup avouent qu'ils n'appliquent pas la loi. Ils ne l'appliquent pas par méconnaissance, parce que leurs services, dans une petite commune, ne sont pas en mesure de comprendre la loi ou n'en ont pas le temps. Il ne faut pas compter sur l'EPCI pour les aider, et certainement pas sur la préfecture. Lorsque vous êtes maire et que vous n'avez qu'une secrétaire de mairie qui fait le maximum pour que les choses avancent, il est difficile d'appeler la préfecture. Il faut déjà que vous ayez quelqu'un au bout du fil puis que vous passiez dans mille services avant d'atteindre la personne compétente. On ne vous écrira jamais rien, on vous parlera seulement au téléphone et on ouvrira un ensemble de parapluies qui font qu'au bout du compte, vous n'aurez pas la solution du problème.
J'ai envie de dire : « quelles sont les sanctions ? » Je ne veux pas « taper » sur les élus, mais, à un moment donné, si un élu ne suit pas la loi, une fois, deux fois, trois fois, que se passe-t-il ? Le citoyen ne doit-il pas en référer aux députés ? Les prérogatives du député ne seraient-elles pas d'alerter en disant : « là, on a un vrai souci » ?
Concernant la commission DETR, c'est un grand moment ! J'assiste à toutes les réunions et c'est une nébuleuse : on me donne la liste de toutes les communes qui vont bénéficier de la DETR et des projets qui vont pouvoir recevoir les fonds, mais on ne m'explique jamais – cela fait trois fois que je le demande – quels sont les motifs de rejet. Les motifs de rejet présentés sont généraux. On va me dire : « c'est parce que le dossier n'est pas complet. » Mais, jamais je n'ai eu la liste des dossiers refusés et la raison de chaque refus. On connaît le financement de la DETR et, comme par hasard, à la fin, on arrive exactement au montant disponible ! Bien évidemment il y a une enveloppe à respecter et il doit y avoir des critères d'attribution. Mais pourquoi telle commune a-t-elle 42 % de la DETR et l'autre 36 % ? Ces critères sont nébuleux.
J'ai également une autre question. Lorsqu'il y a des interrogations sur ce qui se passe au niveau d'une collectivité locale, comment le député peut-il faire pour vérifier les éléments ? Aujourd'hui, le député n'est pas le bienvenu au département ou à la région. Lorsque des manquements nous sont signalés par des associations, des organismes qui nous disent que la région ne les finance plus pour telle ou telle raison, il est extrêmement compliqué pour nous de franchir la porte de la région ou du département pour obtenir des réponses.
Sur les modalités d'application de la loi, je ne sous-estime pas le fait que, dans certaines collectivités, il y aurait une incapacité quasiment matérielle de mise en oeuvre et d'abord de compréhension et d'appropriation de la loi, notamment dans certaines matières très complexes qui connaissent des évolutions rapides. Je pense au droit de l'urbanisme par exemple, qui est un sujet très complexe et qui évolue souvent. Je ne serais pas totalement surpris qu'un certain nombre d'acteurs au plus près du terrain ne soient pas au fait des dernières évolutions législatives ou ne les maîtrisent pas parfaitement. Ce serait même plutôt étonnant si ce n'était pas le cas.
Pour autant, je serai moins dur que vous et je ne vous rejoindrai pas, mais c'est mon interprétation, sur la capacité des différents niveaux à apporter, peut-être imparfaitement, un soutien. Nous allons les recenser. Il y a l'intercommunalité qui, notamment sur ces matières d'urbanisme qui sont souvent les plus complexes ou sur les matières environnementales, commence à développer des compétences propres. Effectivement, ce sont les intercommunalités qui ont une taille suffisante pour développer de l'ingénierie et pour apporter ce conseil, qui est une de leurs raisons d'être, et le soutien technique nécessaires aux petites communes, qui ne sont pas en mesure d'avoir la réponse pour les raisons que vous indiquez. Quand on a un secrétaire de mairie à temps partiel, on ne peut pas lui demander de maîtriser tous les sujets ; il faut donc disposer de ce soutien de proximité.
Un deuxième soutien, même s'il est perfectible, peut être apporté par les services de l'État, pas seulement ceux de la préfecture, mais aussi la direction départementale des territoires (DDT) ou la direction départementale de la cohésion sociale (DDCS), le cas échéant et selon les thématiques, qui jouent un rôle de conseil.
Il peut aussi exister des structures d'ingénierie, d'accompagnement, notamment départementales, susceptibles d'aider à l'interprétation des textes et d'apporter les conseils aux collectivités.
Je mets volontairement de côté les associations départementales de maires parce que ce n'est pas institutionnel, mais souvent, en relayant ce que l'Association des maires de France et d'autres structures peuvent produire, elles contribuent aussi à apporter de la connaissance aux élus.
Pour répondre sur le fait que parfois on n'obtient pas de réponse claire sur une demande de conseil, c'est effectivement une situation qui peut se présenter. Le projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique – cela répond aussi à une des questions posées tout à l'heure – prévoit dans son article 20 la mise en place d'un rescrit normatif. En quoi cela consiste-t-il, très simplement ? Vous travaillez sur un acte qui doit être soumis au contrôle de légalité, mais vous êtes dans la phase du montage du projet. Il est compliqué et vous avez des doutes sur l'articulation ou l'interprétation de certaines normes. L'élu concerné pourra saisir la préfecture pour lui demander, dans un délai que nous espérons de trois mois car il faut laisser le temps d'approfondir l'analyse du dossier, de prononcer un rescrit en disant : « votre projet de délibération qui porte sur ce texte, à cadre juridique donné, est conforme ou pose un problème ». C'est un énorme avantage car cela permet de « déminer » avant de passer devant les organes délibérants, et donc de ne pas se mettre en difficulté en risquant d'avoir à faire marche arrière. Ce rescrit est prévu par le texte à titre quasi expérimental, pour tout vous dire, mais il nous semble pouvoir apporter une réponse au type de difficultés que vous pointez. Avant de passer à la délibération, de prendre l'acte juridique et d'être soumis au contrôle de légalité qui est parfois bloquant, cela permet d'avoir un conseil formel qui conduira d'ailleurs ensuite à un contrôle de légalité allégé, puisque si le texte est le même, si rien n'a changé entre le rescrit et ce qui est soumis au contrôle légalité, cela passera « tout seul ». Il n'y aura pas de deuxième intervention. C'est une évolution que nous essayons de porter, qui à mon avis répondra en partie à votre préoccupation.
Quant aux problématiques d'accès aux régions et aux départements, on entre dans des sujets qui dépassent mon champ d'intervention. Les parlementaires disposent d'un pouvoir de contrôle de l'application de la loi. À mon sens, il ne passe pas nécessairement par un contrôle en personne dans les collectivités, qui peut donner une impression déplaisante, mais à travers ce que vous faites en ce moment. Il y a quelques années, quand j'ai quitté des fonctions de même nature, le Parlement n'assurait pas un suivi de l'application d'une loi en nommant un parlementaire chargé de vérifier que les décrets sont publiés, que les ordonnances sont prises, soit un travail d'aiguillon des services compétents pour s'assurer que les dispositions qui sont prévues par les lois sont bien mises en oeuvre et répondent bien à l'esprit du législateur. C'est un travail mené au niveau national, qui me semble être la vocation première d'un Parlement et sur lequel vous avez un pouvoir juridique, prévu par les textes, d'intervention vis-à-vis des administrations de l'État.
Enfin, sur la DETR, pour qu'il n'y ait pas de malentendu, je ne cherchais pas à dire que c'était l'alpha et l'oméga. Je voulais juste dire que c'était un des exemples d'évolution. Ce n'est sans doute pas totalement satisfaisant. La commission des élus doit déterminer des règles d'application, notamment sur les taux de subvention, et c'est ce qui est censé être mis en oeuvre. Mais ces règles sont plus ou moins précises. J'ai en tête une commission DETR qui fixait des règles d'une telle précision que les élus se plaignaient du rejet de quasiment toutes les demandes.
Vous allez comprendre très rapidement que je ne suis pas juriste. Je suis député de Loire-Atlantique depuis 2012, et je n'ai pas de formation juridique ; j'ai été paysan toute ma vie. J'essaie donc de participer à ma façon au travail de cette mission. Peut-être allez-vous être un peu surpris, mais voilà les questions que je me pose.
D'abord, quand on parle d'évaluation de la loi pour vérifier s'il en est fait une bonne application et si elle est efficace, je m'interroge sur les critères sur lesquels on peut se fonder. Vous avez évoqué le travail d'interprétation des textes et expliqué que vous cherchiez dans les débats les éléments qui vous permettent de comprendre l'intention du législateur. La bonne application répond-elle à l'interprétation que vous en faites après cette analyse des débats ? Est-ce qu'il n'y a pas un deuxième volet qui, pour moi, devrait consister à vérifier l'efficacité de la loi pour répondre aux besoins de nos concitoyens. Cette première question est donc relative aux critères d'évaluation de la bonne application et de l'efficacité de la loi.
La deuxième question que je me pose concerne notre travail de député dans nos circonscriptions en particulier et les nombreuses demandes et sollicitations que nous recevons. Souvent, c'est lorsque nos concitoyens ou les acteurs de nos territoires ont frappé à toutes les portes qu'ils reviennent vers nous pour nous faire part de leurs problèmes. J'essaie de leur expliquer que ce n'est pas mon domaine de compétences. Nous sommes obligés de faire très attention aux réponses que nous donnons, en particulier sur des affaires qui sont parfois devant la justice. Face aux sollicitations, on ne se sent pas forcément très protégé parce que, du jour au lendemain, on peut se retrouver, nous députés, devant un tribunal, devant un juge qui va nous dire que nous avons outrepassé nos droits.
Depuis que je suis député, je suis confronté à deux langages, le langage du droit et le langage courant. En faisant le travail législatif, je suis parfois confronté au souhait d'amender une proposition ou un projet de loi. J'écris les choses avec mes collaborateurs, cela entre dans le circuit, arrive auprès des administrateurs que j'appelle les technocrates – mais ce n'est pas péjoratif du tout – et puis ça me revient et je constate que ce n'est pas du tout ce que je voulais. Mais on me répond que ma rédaction ne convenait pas et que l'amendement initial n'était pas recevable. Je me dis qu'il y a un problème.
Quand on parle de la bonne application et de l'efficacité des lois, n'y a-t-il pas là quelque chose qui pose problème ? Il y a une confrontation de langages entre tous ces gens qui sont très compétents et nous qui sommes sur le terrain. Ceux qui écrivent la loi, ces fonctionnaires qui sont très compétents, ont-ils la formation nécessaire pour faire « coller » le besoin de faire évoluer la loi avec l'évolution de notre société et du monde ? Est-ce que, dans nos relations entre nous, les élus, et eux, nous avons les outils en commun pour faire en sorte que la loi devienne applicable sur le terrain ?
Voilà le genre de questions que je me pose, avec une recherche de bon sens que je ne retrouve pas toujours dans le droit et dans le travail législatif. Excusez-moi, j'ai été un peu long, mais c'est tout simplement parce que je ne suis sans doute pas suffisamment formé dans le domaine du droit.
La loi doit s'appliquer à des citoyens qui ne sont pas des juristes et doit donc être compréhensible pour tous, c'est notre souci.
Je vais peut-être commencer par votre dernière remarque. Excusez-moi, je ne sais pas si vous étiez présent au début, mais j'indiquais justement que l'un de mes rôles est de rendre les textes plus compréhensibles et intelligibles, de « vulgariser ». Madame la présidente, vous avez raison, nul n'est censé ignorer la loi. Pour autant, une fois que l'on a dit cela, quand on est sur des sujets complexes, ce n'est pas forcément mal d'expliquer les choses.
Il y a une ambivalence entre le langage juridique et le langage courant, le langage de tous les jours, des choses de la vie du quotidien. Si vous regardez une décision judiciaire, elle n'est effectivement pas nécessairement d'une totale lisibilité pour tout le monde. On a besoin de l'expliquer. Ce langage juridique, celui de la loi, n'est pas le langage courant. Nous essayons, à notre niveau et avec nos moyens, de transformer le souhait du Gouvernement, pour ce qui nous concerne, le souhait des parlementaires, pour ce qui vous concerne, en l'expression normative adaptée qui permettra d'atteindre l'objectif et qui peut être un peu compliquée à comprendre. L'important est l'objectif à atteindre et le fait que cette écriture corresponde à ce que vous vouliez faire. Si ce n'est pas le cas, il y a un problème. En tout cas, j'essaie de comprendre le besoin et l'orientation politique que l'on me donne et de les transcrire dans la terminologie juridique adaptée, pour qu'elle soit ensuite adoptée et que nous puissions la réexpliquer, dans un langage compris par tout le monde sur le terrain, à nos interlocuteurs, élus locaux, représentants de l'État dans les départements, etc. Je crois donc que cette étape du droit et de la forme juridique n'est pas forcément un problème si nous faisons l'effort, avant, de bien prendre en compte le besoin et, ensuite, de bien expliquer ce qui a été adopté. C'est un effort en amont et en aval que la DGCL essaie de mener au mieux, avec ses moyens.
Sur les conditions et les critères d'application et d'efficacité de la loi, ce sont des éléments complexes. Nous pouvons prendre des éléments quantitatifs : combien de décrets pris pour l'application de la loi ? Cela vaut ce que ça vaut. Il paraît qu'il y a des lois dont certains décrets d'application n'ont jamais été pris. Ce ne sont pas les textes que la DGCL porte.
Un des éléments du suivi de l'application de la loi est donc effectivement de voir si les textes qui devaient être pris pour sa mise en oeuvre et les rapports qui ont été demandés par les parlementaires sont rédigés et publiés. C'est une application quantitative, néanmoins indispensable. Parce que si vous ne passez pas par là, vous n'aurez jamais de mise en oeuvre et d'effectivité.
Nous devons sans doute progresser collectivement sur les critères plus qualitatifs de mise en oeuvre, pour évaluer la manière dont la loi s'est mise en oeuvre concrètement. Je prendrai un exemple qui n'est pas totalement consensuel, et qui vaut ce qu'il vaut, celui des réformes des schémas départementaux de coopération intercommunale. La loi dit qu'il faut constituer des intercommunalités d'une certaine taille, par exemple. Cette loi aura été efficace si, à l'issue du délai que le législateur a donné, nous obtenons des intercommunalités de la taille demandée. Dans ce cas, il est facile de montrer quels ont été les effets concrets de la loi, combien d'intercommunalités ont fusionné, combien ont été créées, etc.
De ce point de vue, sur les sujets relatifs aux collectivités locales, on peut trouver des indicateurs de mise en oeuvre qui sont parlants, explicites et qui permettent vraiment d'évaluer la mise en oeuvre concrète de la loi. La création de communes nouvelles est un autre exemple, dont on peut rapidement évaluer les effets. Il est facile de voir qui est concerné, combien il y en a, et quel est le résultat que l'on a obtenu en termes de fusions de communes.
Parfois c'est moins simple, mais dans tous les cas, sur la mise en oeuvre des compétences et l'organisation territoriale, nous sommes en mesure de voir l'impact de la loi.
Madame la présidente, si vous m'y autorisez, sur les questions de contrôle de légalité, nous allons vous donner en deux mots des éléments chiffrés complémentaires que je vous ai promis à plusieurs reprises.
Le contrôle de légalité, comme le directeur général l'a indiqué, est un axe prioritaire du plan Préfectures nouvelle génération. À ce titre, les préfectures ont un nombre croissant d'emplois dédiés au contrôle de qualité renforcé, en application d'un plan quinquennal qui s'achèvera en 2020. Pour vous donner quelques indicateurs d'activité, en 2018, on a compté 21 627 recours gracieux et 1 348 déférés. Comme le disait le directeur général, il ne faut pas rapporter l'effectivité de l'activité de conseil et de contrôle du préfet à ces deux chiffres, sachant qu'il y a plus d'un million d'actes qui sont contrôlés. Mais cela vous montre que la dimension de conseil et de dialogue préalable est forte.
Sur les déférés que le préfet a pu engager, le taux de gain de l'État est de 86,6 %, ce qui montre la solidité des analyses.
Ce que nous pouvons noter sur les dernières années, c'est une légère hausse des recours gracieux, puisque nous étions à un petit peu moins de 21 000 sur les années 2016 et 2015 et que nous sommes passés à 21 627.
Voilà ce que je pouvais indiquer de manière chiffrée et nous sommes à votre disposition si vous voulez des données sur de plus longues périodes ou sur des points plus ciblés, selon les thématiques.
Nous vous remercions beaucoup pour le travail que nous vous occasionnons, mais c'est pour la bonne cause.
La séance est levée à 19h25
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Yves Daniel, M. Frédéric Descrozaille, M. Régis Juanico, M. Michel Lauzzana, Mme Cendra Motin, M. Laurent Saint-Martin, M. Vincent Thiébaut, Mme Cécile Untermaier, Mme Alexandra Valetta Ardisson, Mme Corinne Vignon