Intervention de Philippe Berta

Réunion du mardi 24 octobre 2017 à 21h05
Commission élargie : finances - affaires culturelles - affaires économiques - développement durable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Berta, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation pour l'enseignement supérieur :

Je ne reviendrai pas sur l'évolution des crédits du budget de l'enseignement supérieur que mon collègue de la commission des finances a déjà présentés. À l'augmentation de 200 millions d'euros, je serais néanmoins tenté d'ajouter les 142,5 millions d'euros ouverts sur le programme 421 « Soutien des progrès de l'enseignement et de la recherche » de la mission « Investissements d'avenir », qui bénéficient dans leur quasi-totalité à des établissements relevant du ministère de l'enseignement supérieur. Un rattachement de ce programme à la mission « Recherche et enseignement supérieur » permettrait d'ailleurs une plus grande lisibilité de cette politique publique si importante pour l'avenir de notre pays.

J'ai souhaité consacrer mon rapport à la question des regroupements d'universités, et plus précisément aux communautés d'universités et d'établissements (ComUE), dispositifs créés par la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, dite « loi Fioraso ». La volonté de mettre en cohérence les acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche d'un territoire est une ambition déjà ancienne et légitime pour gagner en complémentarité et en lisibilité, pour accroître notre potentiel de recherche et pour susciter diverses innovations pédagogiques. Cette loi fait suite à l'instauration des pôles universitaires européens auxquels avaient succédé les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) en 2006. La loi Fioraso propose trois modalités de regroupement visant les universités, les écoles d'ingénieurs et les établissements de recherche : la possibilité de fusion, la possibilité d'association et la structuration en ComUE. Notre rapport ne porte que sur ce dernier objet de regroupement, la ComUE, qui est le mode retenu par une vingtaine de sites.

La mise en place des ComUE aurait pu offrir l'occasion de nouvelles formations interdisciplinaires, d'un accès au titre de master-ingénieur, d'un transfert de bonnes pratiques de professionnalisation entre écoles et universités, d'un continuum entre recherche fondamentale et recherche appliquée, d'un potentiel accru de valorisation, ou encore d'une généralisation des meilleures offres de plateformes à destination de la vie étudiante. Or, si des avancées ont été observées dans ces directions, grâce en particulier au renforcement unanimement salué du dialogue entre les acteurs des sites, le dispositif demeure parcouru de tensions.

À l'origine de ces tensions se trouvent des objectifs multiples, parfois contradictoires dans leur mise en oeuvre, avec un calendrier contraint qui a d'emblée affecté ces nouvelles structures. L'un des principaux facteurs de complexité auxquels se heurtent les acteurs était et reste la concomitance de la création de ce cadre juridique pour une meilleure coordination territoriale des acteurs d'une part, et du lancement du deuxième plan d'investissement d'avenir (PIA) par le Commissariat général à l'investissement qui vise l'excellence et la visibilité à l'internationale d'autre part. Les acteurs auditionnés ont souvent regretté le manque d'articulation des messages délivrés par le commissariat général à l'investissement rattaché au premier ministre et chargé du pilotage des investissements d'avenir avec les messages délivrés par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui pilote les politiques de site. Dès lors, si la coordination territoriale peut reposer sur un modèle de ComUE dit « de services », qui développe des actions communes entre les membres, le jury international qui, de son côté, attribue les IDEX et les I-SITES pour le plan d'investissements d'avenir, promeut une gouvernance toujours plus intégrée. La volonté de coopération accrue des acteurs, née avec les ComUE, se trouve de plus limitée par un cadre juridique conduisant à une gouvernance pour le moins complexe. Les exigences du PIA pour le maintien des IDEX et des I-SITES renforcent l'urgence d'une réforme pour les regroupements concernés.

Cette évolution s'explique par le mélange sous-jacent entre la volonté de maintenir un enseignement de proximité et la volonté de créer des champions internationaux, qui engendre des difficultés dans l'application de ces deux objectifs. On peut choisir de les poursuivre en même temps, mais cela implique de mettre chacune de leurs logiques pleinement en oeuvre sur un périmètre défini ; on ne saurait se contenter d'un entre-deux tiède sur un périmètre global, qui ne serait satisfaisant ni pour l'un ni pour l'autre de ces objectifs. Il nous faut clarifier le modèle auquel nous souhaitons parvenir, nos priorités, notre but, puis déterminer les moyens et le périmètre pour les atteindre.

Le temps de la réforme est donc venu et le Gouvernement, partageant cette analyse, semble décidé à donner une place importante à l'expérimentation, une solution pragmatique qui permet de repartir du terrain.

Quelle appréciation portez-vous sur l'articulation entre l'exercice ComUE et l'exercice PIA ? En d'autres termes, considérez-vous que votre ministère a suffisamment de poids sur les critères d'attribution des crédits du PIA ?

Plus généralement, quel jugement portez-vous sur l'outil que constituent les ComUE ? S'agit-il juste d'une couche bureaucratique supplémentaire ou bien d'une étape nécessaire ayant permis d'insuffler une dynamique qu'il convient maintenant d'amplifier ?

Quels sont les projets du Gouvernement sur ce sujet ? En quoi consistera l'expérimentation ? À quelles obligations organisationnelles les établissements pourront-ils déroger ? Enfin, quel calendrier envisagez-vous ? N'est-il pas nécessaire d'accélérer le mouvement, les attentes des établissements étant des plus fortes en ce domaine ?

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