Intervention de Alain Espinasse

Réunion du mardi 12 novembre 2019 à 18h10
Mission d'information sur l'évaluation de la concrétisation des lois

Alain Espinasse, directeur de la modernisation et de l'administration territoriale au ministère de l'Intérieur :

Y a-t-il une réorganisation permanente ? Elle est assez continuelle, en tout cas, vous n'avez pas tort. On est confronté, en effet, à deux phénomènes.

Tout d'abord, les schémas d'emplois successifs, année après année, nous obligent à nous réorganiser. Les effectifs de l'ATE (administration territoriale de l'État) au niveau des préfectures se sont réduits de 5 000 postes entre 2010 et 2019 – on est passé de 30 000 à 25 000. Si on ne réorganise pas, on n'arrive plus à assurer le service. La baisse des effectifs est comprise, en moyenne, entre 400 et 500 postes par an – 471 dans le projet de loi de finances 2020. Peut-on ne pas se réorganiser ? Parfois on pourrait aimer faire une pause. Il n'en demeure pas moins qu'avec une baisse des effectifs de ce niveau, l'administration est obligée de se réorganiser pour continuer à assurer le service.

Par ailleurs, les choses changent à une vitesse folle. Je ne vais pas vous raconter ma vie, mais je suis entré dans le monde préfectoral il y a 17 ans : la situation était sans commune mesure avec la façon dont on fonctionne actuellement. Internet n'était pas au niveau que l'on connaît aujourd'hui, et nos concitoyens n'admettent plus, de la part de l'administration, des modes de fonctionnement qu'ils considèrent comme totalement obsolètes, voire comme des blocages compte tenu de leurs attentes. On doit aussi se réorganiser de ce point de vue.

En ce qui concerne le transfert des services de la jeunesse, des sports et de la vie associative vers les recteurs et les directeurs académiques des services de l'éducation nationale (DASEN), au niveau départemental, l'arbitrage a été rendu par Matignon. Il nous appartient de le mettre en oeuvre de la manière la plus intelligente possible. Nous sommes payés pour cela, et nous allons nous efforcer de le faire.

Va-t-on avoir une administration totalement différente d'une région à l'autre ? Non, car nous ne sommes pas un État fédéral. L'État est le même en Île-de-France et en Occitanie, ou dans le Val-de-Marne et en Lozère. Cela n'exclut pas qu'il y ait des ajustements ici ou là, les moyens et les enjeux étant différents. Il y aura forcément des mutualisations plus englobantes dans un petit département que dans un grand département, par exemple.

Enfin, si je peux émettre un jugement plus personnel, tous les agents qui sont sur le terrain ont fait le choix de servir l'intérêt général et nos concitoyens. L'intérêt général est déterminé par le Parlement et décliné par le pouvoir exécutif, chacun dans le cadre de ses compétences. Je le dis parce que cela me tient à coeur. On peut servir l'État par hasard, mais on ne demeure pas à son service par hasard pendant des années. On ne reste certainement pas par confort, ni pour faire fortune, mais parce qu'on a le sentiment de servir quelque chose qui nous dépasse, qui est très noble et très beau. C'est ce que j'ai toujours senti, aussi bien chez les préfets que chez les agents aux guichets des services des étrangers. Il m'est arrivé de demander à mes collaborateurs pourquoi ils étaient là – je savais, en effet, quelles étaient les situations : ils rencontrent bien souvent des problèmes pour boucler leurs fins de mois. La réponse était : nous sommes là parce qu'il y a des gens qui ont plus de difficultés que nous, c'est notre mission d'être là.

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