Avant de répondre à chacune de vos questions, je voudrais vous donner une idée de l'évolution, depuis 2007, du nombre d'emplois, du budget en équipement et de l'ensemble de la masse salariale des forces de sécurité. S'agissant du nombre d'emplois, le niveau historiquement le plus bas a été atteint en 2012. Ensuite, on constate une remontée sensible des effectifs – que nous allons poursuivre. Je ne porte pas de jugement de valeur : sans doute la crise économique que nous avons connue en 2008 a-t-elle obligé le Gouvernement à réduire ces effectifs, mais cela incite à une certaine modestie dans l'appréciation qu'on peut porter. Lorsque nous augmentons, aujourd'hui, de 10 000 personnes les effectifs de la police nationale et de la gendarmerie, c'est considérable par rapport à la baisse qui a alors été imposée. Cela illustre les efforts qui ont été accomplis. On a commencé par ré-augmenter les effectifs et l'on ne s'est occupé des équipements que plus récemment. Cela explique, vous l'avez dit les uns et les autres, que l'état de l'immobilier se soit dégradé et que les véhicules aient mal vieilli. Cela fait à peu près trois ans qu'on a recommencé à faire un effort d'équipement – effort que nous poursuivons d'ailleurs.
Nous travaillons au problème des tâches indues. Vous le savez, nous avons éliminé les gardes statiques devant de nombreux tribunaux et préfectures. Les extractions judiciaires étant elles aussi souvent considérées par les policiers comme une tâche indue, j'ai signé avec Mme Belloubet, le 28 septembre dernier, une circulaire qui ne laisse que vingt extractions vicinales à la charge des forces de sécurité. Cela veut dire qu'à l'exception des lieux dont la juridiction est la plus éloignée, c'est désormais la justice qui sera chargée de ces extractions.
Je viens d'évoquer les investissements immobiliers. Non seulement ils augmenteront l'année prochaine mais ils sont « soclés » pour toute la durée du quinquennat, ce qui veut dire que nous allons continuer à allouer des crédits d'investissement à l'immobilier pendant toute cette période.
J'ai déjà parlé des avions. Vous avez raison de dire qu'un plan européen est nécessaire mais il nous faut pour cela convaincre nos partenaires. Nous allons essayer de le faire.
Madame Le Grip, je viens de parler de l'évolution du budget. Pour ce qui concerne la police de sécurité du quotidien, nos directeurs généraux et leurs équipes ont déjà entamé une réflexion en interne. Nous allons ensuite adresser dans les prochains jours un questionnaire à l'ensemble des forces de sécurité – police et gendarmerie – pour leur demander comment elles voient la police du quotidien dans leur secteur. Car, j'y reviendrai tout à l'heure, les priorités en matière de lutte contre la délinquance diffèrent selon les territoires. Dans le même temps, Mme la garde des Sceaux lance cinq chantiers de réforme de la justice. Nos actions seront menées parallèlement et conjointement, ce qui nous permettra de transformer ensemble la sécurité et la justice, de protéger les Français et de faire en sorte qu'ils aient le sentiment de l'être véritablement.
Pour moi, la sécurité du quotidien, c'est d'abord le nombre de policiers qu'on met dans la rue. Vous parliez tout à l'heure de sécurité publique : bien évidemment, une part importante des policiers que nous allons embaucher sera dédiée à la sécurité publique de manière à ce que les personnels soient présents dans nos villes. La gendarmerie a déjà commencé à expérimenter les brigades de contact : c'est à mon avis une expérience assez réussie, en adéquation avec les soucis de la population. Notre priorité est donc d'abord d'ordre quantitatif.
Nous avons ensuite pour objectif ce saut qualitatif que représente la numérisation. Celle-ci passe à la fois par les tablettes, dont nous avons commencé à équiper nos forces, et par l'usage de caméras qui nous permettront de pacifier les relations. Les interpellations étant filmées, on verra tout de suite si elles posent problème ou pas. Tablettes et caméras nous permettront aussi de vérifier que nous ne contrôlons pas dix fois la même personne dans une journée. Les interpellations dureront d'ailleurs moins longtemps puisque nous pourrons tout de suite vérifier si les personnes interpellées figurent ou pas dans nos fichiers.
Nous souhaitons également aller vers la diversification : on ne peut pas faire la même chose selon qu'on est ou qu'on n'est pas dans un quartier ou une ville où le trafic de stupéfiants a atteint des proportions extraordinaires et où des bandes règlent la partition du territoire à coups de kalachnikov. Il faut donc diversifier et adapter au terrain cette sécurité du quotidien. Nous demanderons à nos directions départementales de la sécurité publique (DDSP) ainsi qu'à nos gendarmes de réadapter leurs interventions aux vrais besoins du terrain.
Autre objectif essentiel : la coopération dont vous parliez tout à l'heure. Oui, nous avons besoin de coopérer parce qu'aujourd'hui, la sécurité est une coproduction des différentes forces. On citait tout à l'heure à la fois les forces de sécurité nationale, les forces de police municipale et les agents de sécurité privée. Mais la coopération avec les élus est aussi fondamentale. Dans le cadre de la concertation que nous allons lancer, nous consulterons par écrit les maires sur la façon dont ils envisagent cette police de sécurité quotidienne. Il s'agit en même temps de coopérer avec la population dans la définition des politiques qui sont menées sur le terrain. On parlait tout à l'heure du rôle que joue la société civile. Il y a dans toutes nos villes des conseils de quartier qui s'occupent d'urbanisme, d'écologie, etc. Dans chacun de ces conseils de quartier, une personne pourrait s'occuper de la sécurité et avoir un référent dans le commissariat dont elle dépend. Cela permettrait une prise en charge des situations dès qu'elles se produisent et non pas, comme cela se passe quelquefois, une dizaine de jours plus tard. Plus on sera en contact avec la population, plus on arrivera à régler les problèmes de sécurité.
Enfin, nous attachons une grande importance à la réforme de la procédure pénale. Il faut que la réponse soit immédiate, adaptée et que cela se sache. Quand la réponse vient – si réponse il y a – deux ans après la commission des faits, celle-ci ne joue plus le rôle de rappel à l'ordre et à la loi.
Voilà quelles sont les grandes lignes de cette police de sécurité du quotidien.
M. Michel-Kleisbauer se félicitait des mesures que nous allons prendre : je l'en remercie. Je suis tout à fait d'accord pour travailler avec le groupe qu'il représente. Nous avions d'ailleurs déjà beaucoup travaillé ensemble à la réforme de la procédure pénale dans les premiers temps de ce quinquennat. C'est donc une volonté que nous partageons.
Monsieur Pierre Morel-À-L'Huissier, nous avons inscrit dans notre budget des crédits pour lancer une campagne nationale de promotion des sapeurs-pompiers volontaires. Je recevrai dans quinze jours le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers. Nous mènerons cette campagne avec lui en essayant d'y associer des partenaires des milieux économiques, sociaux, sportifs et culturels de manière à donner envie aux jeunes de devenir sapeurs-pompiers. Le modèle français étant assez exceptionnel, nous ne pouvons le laisser aller à la dérive en l'espace d'une dizaine d'années, ce qui coûterait beaucoup plus cher qu'aujourd'hui à notre société. J'ai pu personnellement mesurer l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires lors des incendies de cet été. Ils sont mobilisés à la fois lors des grands événements et dans la vie quotidienne. Ce n'est pas pour rien que la figure du pompier est emblématique dans notre pays. Là où le service public a disparu, il y a encore souvent une amicale de sapeurs-pompiers volontaires qui apporte une présence et incarne la solidarité de notre société.