Intervention de Olivier Dussopt

Séance en hémicycle du lundi 16 décembre 2019 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Présentation

Olivier Dussopt, secrétaire d'état auprès du ministre de l'action et des comptes publics :

Pour compléter l'intervention du ministre de l'économie et des finances, je voudrais simplement souligner que malheureusement, comme à l'accoutumée, la commission mixte paritaire n'est pas parvenue à un accord sur l'ensemble des dispositions du PLF pour 2020 : sur les 393 articles figurant dans le texte adopté par le Sénat, seuls 111 – ce qui est déjà considérable – ont été votés conformes, soit un peu plus d'un quart.

Le texte qui vous est soumis a été profondément modifié par le Sénat qui a d'emblée rejeté les crédits de cinq missions : « Sécurité », « Écologie, développement et mobilité durables », « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », « Justice » mais aussi « Immigration, asile et intégration ». Cela a conduit de facto à une réduction des dépenses de 52,7 milliards d'euros, ce qui n'est ni souhaitable ni crédible au vu de l'importance de ces missions. Aussi le Gouvernement vous proposera-t-il de rétablir les crédits de chacune d'entre elles.

Au-delà du caractère peu crédible, pour le moins, de ces modifications, vous ne serez pas surpris que le Gouvernement s'oppose à toutes les mesures visant à remettre en cause les réformes conduites depuis plus de deux ans et demi.

La nouvelle lecture est aussi l'occasion de souligner le caractère au minimum contradictoire de certaines positions adoptées par le Sénat. Ainsi, la majorité sénatoriale s'est dite attachée à la transition énergétique tout en faisant le choix de rejeter purement et simplement les crédits de la mission relative à cette question.

De même, le Sénat nous a rappelé son opposition à L'IFI – l'impôt sur la fortune immobilière – mais a prévu, dans le même temps, plusieurs dispositions visant à en corriger certains effets de bord qu'il jugeait pénalisants.

De même, le Sénat nous a dit son opposition à la réforme de la fiscalité locale, sans toutefois supprimer l'article correspondant ni remettre en cause l'architecture ou la nouvelle répartition du produit de taxes locales que nous proposons.

Plus globalement, alors que la majorité sénatoriale prétend souscrire à l'objectif de redressement de nos comptes publics, elle a fait adopter un certain nombre d'amendements dont le coût global dépasse l'entendement : à l'issue de l'examen de la première partie au Sénat, le solde avait ainsi été dégradé de plus de 4 milliards d'euros.

Vous ne serez donc pas surpris de constater que le Gouvernement propose de poursuivre la démarche engagée l'an dernier pour réduire le nombre des dépenses fiscales inefficientes, et s'oppose à toutes les dispositions adoptées par le Sénat tendant, à l'inverse, à rehausser certaines dépenses fiscales : je pense, pour ne prendre que deux exemples de cette imagination créatrice, au relèvement du plafond de la réduction d'impôt « IFI dons » ou au relèvement du plafond de déduction annuelle des dépenses d'acquisition d'oeuvres originales d'artistes vivants. L'examen en première lecture a démontré que la réduction des dépenses fiscales inefficientes était une préoccupation partagée sur les bancs de l'Assemblée, en particulier par le rapporteur général. Il en va de même pour la suppression des taxes à faible rendement, sujet sur lequel Laurent Saint-Martin s'est particulièrement investi.

Sans me livrer à une analyse exhaustive, qui aura lieu durant la discussion générale, je saisis l'occasion qui m'est donnée par cette nouvelle lecture pour saluer le travail parlementaire, de la majorité comme de l'opposition. Je ne citerai que quelques exemples. Un amendement de Sacha Houlié vise à maintenir, pour les bénéficiaires de la clause dite « vieux parents », l'exonération de taxe d'habitation et de contribution à l'audiovisuel. Mme Pires Beaune s'est impliquée dans le renforcement du cadre applicable aux aviseurs fiscaux ; en première lecture a été adopté un amendement visant à étendre le champ du dispositif à l'ensemble de la fraude à la TVA, et nous aurons l'occasion de discuter d'une extension plus large encore, comme la Cour des comptes nous invite d'ailleurs à le faire. Je pense aussi à l'amendement de M. Dufrègne sur la demi-part des veuves d'anciens combattants. Dans un élan transpartisan, j'évoquerai aussi l'abaissement du seuil de chiffre d'affaires applicable à la domiciliation fiscale des grands patrons, disposition de l'article 3 sur laquelle le Sénat n'est pas revenu ; le rapporteur général propose de rétablir la version adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture tout en excluant du champ de la mesure les dirigeants qui n'exercent pas de mandat exécutif et en précisant que les intéressés sont réputés exercer leur activité principale en France, « à moins qu'ils ne rapportent la preuve contraire » – le Gouvernement sera favorable à cette modification.

Je veux aussi dire un mot de quelques mesures introduites par le Sénat à nos yeux intéressantes, sous réserve de quelques ajustements ici ou là. Je pense notamment à l'amendement, inspiré du Sénat, présenté à l'Assemblée par Daniel Labaronne pour exonérer de taxe d'habitation les EHPAD – établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Le Gouvernement est favorable à une telle exonération à compter de 2021.

Le Gouvernement vous présentera un nombre restreint d'amendements.

Au-delà des mesures évoquées par le ministre de l'économie et des finances sur le GNR – le gazole non routier – , nous tirerons les conséquences de certaines annonces intervenues depuis la première lecture, s'agissant notamment du déplafonnement du malus automobile et du plan de soutien à la filière automobile.

Le dispositif d'accompagnement financier prévu pour les régions dans le cadre de la réforme de l'apprentissage sera également ajusté, avec la hausse des ressources qui leur sont affectées.

En ce qui concerne les modalités de financement de l'Association pour le soutien du théâtre privé, nous vous proposerons de poursuivre la concertation avec les acteurs du secteur préalablement à toute évolution.

La sincérité du projet de budget que nous vous soumettons est une priorité. La nouvelle lecture sera ainsi l'occasion d'actualiser nos prévisions de recettes et de dépenses, en cohérence avec les dernières informations qui vous ont été présentées dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2019. La reprise des plus-values fiscales de 2019, notamment sur les droits de mutation, nous conduit ainsi à rehausser la prévision de recettes de 1,4 milliard d'euros. En dépenses, au vu du dynamisme des prestations sociales observé en 2019, nous vous proposerons d'augmenter significativement, à hauteur de 750 millions d'euros, les crédits de la prime d'activité et de l'allocation aux adultes handicapés.

En tenant compte des prévisions de fin d'année formulées dès la loi de finances initiale dans un objectif de budgétisation au plus près des dépenses obligatoires, nous préparons une gestion plus soutenable et plus sereine. Ces ajustements nous conduisent à revoir très légèrement à la hausse le déficit de l'État, à hauteur d'environ 100 millions d'euros, mais pas notre prévision de déficit public, que nous maintenons à 2,2 %.

Enfin, dans la continuité de l'action que nous menons depuis deux ans, nous maintenons notre exigence de discipline budgétaire. Les amendements de crédits que nous vous soumettrons participeront ainsi de notre démarche de sincérisation des comptes – nous aurons l'occasion d'y revenir au cours des débats.

Vous l'aurez compris, le Gouvernement estime souhaitable de rétablir très largement le texte adopté par votre assemblée en première lecture.

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