Je suis rédacteur en chef adjoint de Paris Normandie qui est un quotidien régional qui couvre la Seine-Maritime et l'Eure. Il compte cinq éditions en Seine-Maritime et deux dans l'Eure. Nous disposons d'un site Internet, d'une section vidéo et d'une rédaction d'environ 90 journalistes professionnels.
La nuit de l'incendie, le 26 septembre, Baptiste Laureau, le rédacteur en chef-adjoint chargé des faits divers, a reçu un coup de fil aux alentours de trois heures, trois heures dix du matin. Aussitôt prévenu, il a envoyé une première équipe sur place, composée d'une journaliste « fait-diversière », d'un vidéaste et d'une photographe. Très rapidement, moins d'une heure après le début de l'incendie, nous avons pu mettre en ligne un premier papier. Jusqu'à six heures du matin, heure de la première conférence de presse audio, nous n'avons pas eu besoin de la préfecture. Nous avons fait nous-mêmes nos vérifications en allant sur place. Ensuite, nous avons suivi toutes les conférences de presse de la journée. Deux journalistes de la rédaction web sont restés à la préfecture pour les diffuser en direct, dans un souci de transparence totale par rapport aux lecteurs et aux internautes qui étaient vraiment en recherche d'informations. La fréquentation de notre site Internet a fait un bond ce jour-là, puisque les gens se demandaient ce qu'il se passait.
Vous parliez de fake news. Il nous appartient de les vérifier et d'aller sur le terrain pour apporter l'information la plus juste et c'est ce que nous avons fait. Très rapidement, nous avons expliqué dans un article paru sur le web qu'il fallait se méfier des fake news. Mes collègues ont parlé tout à l'heure des fake news d'oiseaux morts et de poissons morts. Nous les avons toutes vérifiées et contrecarrées. Dès les premières heures du jour, nous avons vu apparaître des vidéos. Vous avez tous vu celle d'une explosion. En fait, il s'agissait d'une explosion en Chine, qui n'avait rien à voir avec Lubrizol.
Ghislain a souligné la particularité de cette journée, puisqu'à midi, nous apprenons le décès de l'ancien Président de la République. Évidemment pour nous, il s'agit d'une information importante. Nous étions déjà lancés sur Lubrizol avec une mobilisation formidable et exceptionnelle de toute la rédaction. À midi, il a fallu faire des choix. Notre direction a fait le choix de faire deux cahiers ce jour-là – ce qui est techniquement une prouesse. Nous avons délégué une équipe au supplément sur Jacques Chirac.
Il s'est ajouté une autre difficulté, puisque nos bureaux étaient situés dans le périmètre de sécurité, celui des 500 mètres interdits. Il a fallu s'organiser autrement. Nous nous sommes délocalisés à la rédaction de la rue Grand-Pont, c'est-à-dire à la rédaction locale. Certains travaillaient à distance, ce qui a été mon cas. Il a fallu tenir compte de tous ces éléments.