Il ne faut pas représenter l'épidémiologie comme une histoire de statistiques. Nous faisons vraiment l'étude des liens avec l'environnement et nous essayons de bien le mesurer. J'ai sur mon portable un outil qui me permet de savoir à quoi je suis exposée. Mon laboratoire mesure ainsi en temps réel l'exposition aux particules fines de 2,5 microns. Nous faisons des cartographies et nous mettons cela en relation.
Évidemment, nous sommes très intéressés par les effets chez l'individu. Nous savons doser des marqueurs. Nous pouvons aller chercher des signaux au niveau de l'organisme avant de voir la pathologie déclarée, ce qui peut être précurseur.
Le World Trade Centre est un bon exemple. Je travaille avec ces gens. Nous faisons la même chose. Ils ont trouvé que dix ans plus tard, ils ont une cohorte de malades avec une pathologie rare, qui s'appelle la sarcoïdose. Il ne faut pas caricaturer la discipline. Nous ne faisons pas que des statistiques. Nous savons aller sur le terrain.
Par ailleurs, je différencie bien les populations à risque, qui sont les pompiers, les ouvriers, les populations exposées. Je fais la distinction entre les populations vulnérables et les personnes biologiquement sensibles. D'après l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les populations vulnérables sont les plus proches en raison de facteurs sociaux. Elles habitent à proximité du site. Les personnes biologiquement sensibles sont déjà malades. Ces gens-là vont davantage subir les effets de la pollution. Je pense évidemment que cet évènement va empirer la situation, par rapport à des pics de pollution ou une pollution chronique. Ce sont les effets chroniques. Je suis tout à fait disponible pour donner des indications sur la surveillance. Nous pouvons travailler ensemble.
Les particules ultrafines font moins de 0,1 micron. Concernant les 2,5, nous les connaissons et elles sont très agressives aussi, entre autres parce qu'elles contiennent les toutes petites particules et les nanoparticules dont nous avons parlé. Nous n'avons pas l'obligation de les mesurer. À Paris, sur 22 stations de mesurage de la qualité de l'air, il n'y en a que deux qui mesurent les 2,5. Les autres mesures sont obtenues par estimation, par modélisation. C'est insuffisant. Je vais vous donner une information choquante : il n'y a plus de station de mesurage de la qualité de l'air à la Porte de Bagnolet. Nous procédons seulement par estimation. À Paris - autoroute, boulevard extérieur, périphériques – il n'y a pas de mesure parce qu'on fait un modèle et on estime que cela convient. J'ai des cas d'asthme chez des enfants et des gens qui sont venus de province. Nous savons que la pollution donne de l'asthme. Pour les particules ultrafines, nous sommes encore très loin du compte. Ce n'est pas une question de masse. Si vous ne pouvez pas les peser, il faut les dénombrer. J'ai un tableau que je vous adresserai pour que vous voyiez. Quand elles sont à masse égale, avec le diamètre qui change, la surface d'occupation des particules est différente. Les ultrafines forment une souche qui va se mettre sur les organes. C'est très mauvais. Cela passe même par les méninges, par le biais du bulbe olfactif, et cela passe par la peau.