Monsieur le secrétaire d'État, un mouvement social puissant se développe partout en France, témoignage d'un rejet profond de votre projet et d'une grande colère. Depuis deux ans et demi, vous avez pourtant eu le temps de convaincre : vous y avez mis beaucoup de moyens, et vous avez échoué.
Alors que vous prétendez simplifier, plus rien ne sera simple. Chaque fois que vous précisez vos intentions, vous montrez en réalité la nocivité globale de votre système. Vos garanties sont, hélas, en carton-pâte. Par exemple, rien n'est clair sur le taux de remplacement. Si vous voulez vraiment améliorer les choses, pourquoi choisir de casser l'édifice existant au lieu de chercher à l'améliorer ? Pointer ses insuffisances, que nous pointions avant vous – tant le droit à la retraite a été abîmé par les différentes réformes au cours des dernières décennies – , ne fait pas de votre projet un cheval de course.
Vous le présentez comme si son objet était de mettre fin à des injustices, qu'il accroîtra en réalité, et à de prétendus privilèges : or, il ne s'attaque pas aux véritables privilégiés.
Parce que l'on vous a vu à l'oeuvre, tout le monde a compris qu'après avoir attaqué la sécurité sociale, l'assurance maladie et l'assurance chômage, vous voulez désormais porter atteinte au droit à la retraite. Quoi de plus normal ? Vous avez attaqué le code du travail et la reconnaissance de la pénibilité ; vous avez dégradé les conditions de travail et développé la précarité : vous essayez maintenant d'en tirer les conséquences en matière de retraite.
Le problème est que vous n'assumez pas la véritable nature de ce projet. Nous sommes au coeur d'un enjeu de société majeur : la retraite, c'est le droit d'être pleinement libéré du travail prescrit pour le dernier temps de sa vie, en étant encore en bonne santé.
Or votre projet vise, en réalité, à baisser le niveau des pensions, à allonger le temps de travail et à individualiser les retraites en faisant de chacun l'auto-entrepreneur de sa vie. Ce projet change donc la philosophie même du droit à la retraite comme garantie collective solidaire.
C'est pourquoi vous devez retirer votre projet, pour prendre le temps d'une réforme qui rassemble – les conditions n'en sont pas réunies. De quoi êtes-vous réellement prêt à discuter avec les partenaires sociaux ?