La crise sociale actuelle souligne que l'emploi et la retraite sont des piliers séculaires et interconnectés de nos sociétés. Or, bien que leur centralité soit admise par tous, de fortes disparités catégorielles et territoriales subsistent.
Par exemple, au troisième trimestre 2019, la Martinique comptait 51 500 demandeurs d'emploi toutes catégories confondues, soit une hausse de 0,6 %. Si l'on tient compte de la seule catégorie A, la hausse est de 0,3 % ; elle est de 0,2 % chez les hommes et de 0,4 % chez les femmes ; de 0,9 % chez les moins de 25 ans et de 1 % chez les plus de 50 ans.
Parallèlement, et paradoxalement, l'île a perdu 15 827 habitants entre 2011 et 2016, majoritairement des jeunes. Je vous laisse imaginer à quel niveau culminerait le taux de chômage si tous ces jeunes étaient restés sur place !
Cette situation surréaliste découle du fait que les politiques successives de l'emploi ont été, de tout temps, totalement déconnectées des contraintes de nos territoires : entre autres, un tissu économique composé à près de 90 % de très petites entreprises et de travailleurs indépendants, un record de créations mais aussi de destructions d'entreprises, une continuité territoriale qui n'est autre qu'un levier de migration, un taux de chômage moyen de 18 %, inconcevable dans l'hexagone.
La double crise – la double peine – économique et démographique exige donc des réponses de choc pour stopper la fuite des forces vives, la chronique d'un génocide économique programmé. Nos territoires n'en peuvent plus d'un service minimum républicain. Dans l'hexagone se multiplient les initiatives pour réduire, coûte que coûte, un taux de chômage de 8 %, considéré comme offensant. Huit pour cent ! Que dire alors lorsque ce taux atteint 18 % !
Nos populations aspirent à vivre chez elles, refusant le pis-aller de l'exode ou la fatalité ultramarine du chômage. Objectivement, les politiques nationales, de tous les temps et de toutes les tendances politiques, nous ont traités comme de simples appendices, lointains, trop différents, trop encombrants pour espérer une meilleure considération.
Nous en appelons donc au droit à une discrimination positive, afin de contrer les inégalités qui nous frappent et le risque de décohésion sociale, voire de chaos qui nous menace.
Décréter cause prioritaire le droit à l'emploi est une urgence si l'on veut permettre aux populations de se projeter dans l'avenir. Une politique de l'emploi systémique, adaptée et efficace doit être inclusive, afin de répondre efficacement aux enjeux actuels, notamment au déclin démographique, en s'appuyant sur une véritable politique des âges et de la famille, à travers l'accompagnement de nos aînés. À compétence suffisante, il faut donner la priorité à l'embauche locale. Il convient de rompre avec une vision éculée de la prétendue égalité républicaine.
L'intégration effective des Antilles dans le bassin caribéen est un dû, un processus naturel inéluctable, qui relève du bon sens. Pourquoi vouloir contrarier cette évolution ? Les tarifs aériens doivent être ajustés aux besoins de notre économie. La politique de mobilité doit être un outil permettant de sortir de l'exclusif colonial, décrété par Colbert et qui se perpétue aujourd'hui encore ! Elle doit favoriser le développement de courants d'affaires entre les îles de la Caraïbe.
Un billet d'avion de Fort-de-France à Pointe-à-Pitre ou à Cayenne atteint aujourd'hui des prix démesurés, exorbitants.