Madame la ministre, avec votre réforme de l'assurance chômage, la nouvelle règle de calcul des indemnités fragilisera encore un peu plus les demandeurs d'emploi les plus âgés, puisqu'ils seront soumis à une période de référence plus longue pour le calcul du salaire journalier de référence. Ainsi, pour les demandeurs d'emploi âgés de 53 ans ou plus, une brève période d'activité en début de période de référence suivie d'une longue période d'inactivité pourra conduire à une diminution plus draconienne encore du salaire journalier de référence. Or nous savons que la capacité à retrouver un emploi à cet âge est moindre, et qu'elle n'est pas qu'une question de regard – j'y reviendrai.
Le projet de réforme des retraites ajoute de la vulnérabilité à cette précarité : il prévoit que nous travaillions plus longtemps, dans un système aligné par le bas, qui pousse à travailler davantage pour seulement espérer vivre dignement. Dans les pays que vous citez en modèle, les retraités vivant en dessous du seuil de pauvreté sont d'ailleurs bien plus nombreux que dans notre système actuel.
Pour la moitié des Français de 60 ans, voir reculer l'âge où ils pourront prendre leur retraite ne signifie pas qu'ils devront rester plus longtemps à leur poste : beaucoup devront patienter encore au chômage – avec de maigres indemnités – , au RSA, en arrêt maladie ou en invalidité, voire ne compter que sur eux-mêmes dans l'attente de leur pension, tout en figurant dans le halo du chômage.
Vous parliez tout à l'heure de regard ; mais l'ampleur des inégalités en matière d'état de santé et d'employabilité selon les catégories socioprofessionnelles invite à agir au-delà de la question du regard, et même au-delà de celle de la pénibilité. L'inégalité entre un cadre et un agent d'entretien dépend largement de choix d'organisation du travail de la part des entreprises, sur lesquels vous avez un pouvoir d'action. Allez-vous utiliser ce pouvoir, et comment ?