Dans ce contexte, n'est-il pas légitime de condamner l'attitude de la Turquie et de renforcer notre coopération avec Chypre, dont nous sommes déjà le deuxième partenaire militaire, derrière la Grèce ?
Au-delà des réassurances qu'il donne à Chypre, la France a un intérêt direct à la conclusion de cet accord de défense : d'une part, Chypre constitue un point d'appui important pour nos opérations militaires en Méditerranée orientale et une escale pour les opérations hors de la région ; d'autre part, l'île serait une plateforme essentielle dans la perspective d'évacuation de nos ressortissants depuis le Liban, sachant qu'il est difficile d'écarter le scénario d'une crise majeure dans la région.
Par comparaison, notre coopération militaire avec l'Albanie est plus faible. La défense albanaise est elle-même assez modeste, bien qu'elle se modernise lentement, à la faveur des objectifs fixés par l'OTAN, que l'Albanie a rejointe en 2009. Malgré tout, nous avons intérêt à développer notre relation de défense avec ce pays.
En premier lieu, nous bénéficierons du renforcement de la coopération autour de certains problèmes sécuritaires – criminalité organisée, trafic de drogue, radicalisation – qui, de proche en proche, ont des répercussions sur notre pays.
Par ailleurs, l'Albanie mérite d'être encouragée dans l'amélioration des relations avec ses principaux voisins : la Serbie, la Macédoine du Nord et la Grèce. L'Albanie est un pays à l'influence stabilisatrice dans les Balkans, région dont l'histoire récente a montré la fragilité.
Ne perdons pas non plus de vue le fait que les Balkans suscitent l'intérêt de plusieurs grandes puissances qui ne partagent pas toujours nos valeurs. Il importe donc de renforcer les liens avec cette région qui aspire toujours à rejoindre l'Europe. Certes, en octobre dernier, la France a opposé son veto à l'ouverture des négociations d'adhésion avec l'Albanie et la Macédoine du Nord, madame la secrétaire d'État. L'élargissement, lorsqu'il se fait sans les peuples, contribue nécessairement à la défiance à l'égard des institutions européennes : quoi qu'il en soit, une pédagogie de l'élargissement auprès de nos concitoyens sera indispensable pour concrétiser la perspective européenne à laquelle cette région aspire.