Intervention de Alain Thirion

Réunion du mercredi 8 janvier 2020 à 15h30
Mission d'information sur l'incendie d'un site industriel à rouen

Alain Thirion :

Si je comprends bien, c'est la formalisation du message qui est diffusée par les canaux officiels. Effectivement, le fait de faire passer ce type de message est vraiment une question qui se pose.

En ce qui concerne les différents périmètres, Mme Vidal, vous soulevez deux questions différentes. La première porte sur la manière de transmettre un message sur les territoires concernés. Cela va au-delà du périmètre, ce sont des territoires. L'outil, nous l'avons. Il s'appelle GALA. Il fonctionne plutôt bien. Il a été utilisé, mais dans un deuxième temps. Il peut là aussi y avoir un travail de protocolisation sur le contenu des messages. Nous devons être capables de dire ce qu'il se passe, ce que vous devez faire, combien de temps cela va durer et quelles sont les communes qui sont concernées. Ce travail peut se faire par l'intermédiaire d'une circulaire. Cela fait partie des premières leçons que nous avons commencé à tirer du phénomène de Lubrizol. Il faut utiliser ce produit, c'est incontestable. Si demain, nous avions d'autres outils d'alerte, nous aurons la même logique, c'est-à-dire qu'il faut travailler sur l'outil et en avoir plusieurs – le cell broadcast en est un – mais il faut aussi travailler sur le contenu du message, et définir à qui nous le faisons passer. Ce qui est valable dans le département l'est aussi dans les départements voisins parce que nous avons eu des inquiétudes et des remontées d'informations de départements pour lesquels, objectivement, le risque était nul ou extrêmement faible.

Mais comme il n'y avait pas d'information, l'inquiétude s'est développée. Nous avons même eu un contact avec l'ambassadeur de Belgique en France, puisqu'il s'inquiétait de savoir si la Belgique était touchée ! Il faut à tout prix structurer l'organisation de notre information. Nous étions très mobilisés sur la gestion stricte de la crise et cet élément d'information, nous l'avons laissé au préfet de département, comme nous le faisons classiquement. Si cela concerne plusieurs départements, peut-être un travail de structuration doit-il être réalisé, y compris au niveau de l'information et du message.

Deuxièmement, la « Journée à la japonaise » a été mise en oeuvre une fois, en Guadeloupe. Elle n'a pas été complètement évaluée. Cela fait partie des travaux. Comme vous l'avez senti, je suis assez attaché à cette démarche. La réflexion concernant le projet de loi sur les risques outre-mer intègre cette notion de « Journée à la japonaise ». Les risques naturels là-bas sont très élevés. Par conséquent, on se dit qu'il faut à tout prix rentrer dans cette logique. En métropole, pourquoi pas ? Cela a du sens que, sur l'ensemble du territoire, nous adoptions cette logique. Après tout, une journée par an, ce n'est pas grand-chose. Faut-il le faire sur tous les territoires ou d'abord ceux qui sont les plus exposés ? Les cas diffèrent entre un risque sismique, comme nous l'avons eu en Ardèche, un risque de submersion ou industriel. Il faut adapter la nature et le contenu des formations. Mais que l'on puisse réfléchir à un contenu et travailler sur cette question-là est plutôt une bonne idée.

Existe-t-il des obstacles ? Quand on veut, on peut... Nous devons pouvoir y arriver. Peut-être faut-il le faire par étapes. Je ne suis pas pessimiste. Au contraire, on constate une sensibilité plus forte sur les questions de Sécurité civile au sein du territoire. Les choses changent. Par exemple, faire fonctionner une sirène à Nice il y a dix ans n'était même pas envisageable. Aujourd'hui, nous l'avons fait deux fois en l'espace de 15 jours. On observe une prise de conscience qui est à connecter avec une autre réalité : la population est très informée, même si elle ne l'est pas toujours bien. L'information va très vite. Nous devons faire passer un certain nombre de messages qui doivent nous permettre de développer cette culture de sécurité civile qu'au fond, tout le monde appelle de ses voeux.

Sur le SNU, plusieurs démarches ont d'ores et déjà été lancées, auxquelles nous avons associé un certain nombre de SDIS ; je pense à celui de Loire-Atlantique. Pour le moment, nous sommes très ciblés sur le secourisme. Faut-il aller au-delà ? Pourquoi pas ? Le SNU va être une machine assez lourde, va concerner beaucoup de monde. Il faut que nous réfléchissions à notre capacité à tenir la distance. Une fois que nous aurons mis en place ces outils, nous n'aurons pas à le faire une fois, deux fois, il faudra le faire tout le temps et avec tout le monde. Nous devons développer cette culture de sécurité civile dans le cadre du SNU. Nous y avons pensé, un certain nombre de démarches ont été conduites dans ce cadre-là. Nous ne pouvons pas envisager un SNU dans ce pays sans évoquer les questions de sécurité civile. Après, qu'y mettons-nous ? Combien de temps ? Comment ? Nous sommes dans une phase d'ajustement. Quand nous serons dans une phase industrielle, cela nécessitera une montée en puissance. Nous devons intégrer les conséquences que cela aura sur les organisations.

En ce qui concerne Météo France et l'analyse qui a été faite, j'avais en tête qu'ils avaient l'ensemble des éléments, qu'ils les ont complétés. Ils ont été capables, au cours de la journée dans l'après-midi, de fournir une analyse assez précise sur l'évolution du nuage, sa densité et la manière dont il allait évoluer sur l'ensemble des territoires. Cela a été très précieux. Ces experts sont à nos côtés et Météo France est arrivé au COGIC à 6 heures du matin. Cela nous permet de savoir qui il faut prévenir, quel type de message nous pouvons faire passer, et quels sont les risques liés à l'évolution météo. Dans ce domaine, nous avons d'ailleurs des outils d'anticipation et de cartographie qui nous permettent, pour des risques naturels, d'anticiper avec une précision extrêmement fine ce qui va arriver sur les différents territoires. C'est un élément de la performance de la Sécurité civile dans ce pays. Si nous n'avions pas ces experts, nous serions aveugles. Nous les améliorons encore.

Sur les campagnes de feux de forêt, nous avons davantage de démarrages de feu, mais avec un feu moyen de 300, 350 hectares. Pourquoi ? Parce que nous avons des phénomènes de guet. Nous savons exactement ce qu'il va se passer et nous intervenons extrêmement rapidement. C'est aussi un élément que nous pouvons indiquer sur Lubrizol. Le risque a été jugulé rapidement parce que nous sommes intervenus rapidement, que les moyens ont été mobilisés rapidement et que les réponses tactiques qui ont été mises en place l'ont été en fonction de la nature de l'évènement. Plus on attend, plus le phénomène prend de l'ampleur et plus on perd la maîtrise du phénomène, ce qui est plus compliqué ; je vous renvoie à l'actualité.

Quant au VDIP, il a fonctionné, mais pas aussi bien que nous l'aurions voulu. J'aurais aimé que le VDIP arrive le plus vite possible, ce qui a été le cas. Il a été capable rapidement de déterminer la liste des produits chimiques qui ont été utilisés. Mais là encore, nous devons être capables, en « protocolisant » le mode opératoire, d'aller plus vite encore que ce qui a été fait. Des marges de progression existent. Par la suite, nous avons fait plusieurs tests sur les autres VDIP. Si cela arrivait maintenant, nous aurions été peut-être un peu plus diligents, même si les éléments d'information ont été fournis au préfet en tout début d'après-midi. Il faut toujours rester humble par rapport aux risques, qu'ils soient naturels ou technologiques et industriels, parce que nous pouvons être confrontés à des phénomènes de très grande ampleur et l'actualité le montre. Le VDIP de Brignoles est exactement le même. Nous ne l'avons pas fait venir de là-bas parce que cela aurait pris forcément un peu plus de temps. Nous avons utilisé un dispositif du Laboratoire central de la Préfecture de Police en les faisant venir en hélicoptère pour confirmer les analyses du VDIP et gagner du temps.

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