Mesdames, messieurs les députés, je tiendrai un propos liminaire, qui devrait répondre en partie à vos questions, auquel j'apporterai ensuite des compléments.
L'incendie de l'usine Lubrizol, site classé Seveso « seuil haut », survenu de nuit, au cours des premières heures du jeudi 26 septembre dernier, a suscité une profonde inquiétude dans l'ensemble de la population rouennaise et, plus largement, parmi nos concitoyens concernés par les conséquences du panache de fumée. Il a engendré de nombreuses interrogations – légitimes – sur les effets de cet accident industriel sur la santé. Je souhaite donc vous expliquer ici de manière méthodique les actions engagées par mon ministère.
S'agissant tout d'abord des mesures de gestion de crise et de la diffusion des premières recommandations sanitaires, je tiens à vous indiquer que l'ensemble de mes services, le centre opérationnel du ministère de la santé, l'Agence régionale de santé de Normandie, les agences sanitaires nationales – Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), Santé publique France –, ainsi que l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) ont été mobilisés dès la nuit de l'incendie pour appuyer les services de la préfecture de région.
Les priorités ont été la prise en charge d'éventuelles victimes ainsi que l'évaluation des effets sanitaires immédiats du panache de fumée, compte tenu de la présence de très nombreux produits toxiques stockés en masse sur le site. Les recherches de toxiques dans l'air, réalisées en urgence par les sapeurs-pompiers du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) 76, ont permis de rassurer les services de santé et la population concernant les risques sanitaires immédiats. En effet, aucune substance toxique présentant des concentrations pouvant induire un risque sanitaire aigu majeur n'a été détectée dans le panache. Toutefois, pour prévenir l'effet des fumées sur la population se trouvant sous le panache, notamment pour les personnes les plus sensibles, et pour assurer une prise en charge adaptée, mes services ont, dès le matin du 26 septembre, recensé dans la Région Normandie et dans les régions limitrophes les capacités d'hospitalisation en réanimation en cas de détresse respiratoire. Les capacités de renforcement du Samu de Seine-Maritime en équipes médicales et en matériel ont également été identifiées en urgence. Ces dispositions n'ont heureusement pas dû être mises en oeuvre. Les indicateurs d'activité remontés par le Samu et les établissements de santé du secteur – autrement dit, les services d'urgence – ont également été surveillés très attentivement dès le 26.
Ces informations ont permis de constater l'absence de cas graves en lien avec l'incendie et d'observer un recours modéré aux services d'urgences hospitaliers ; on a ainsi enregistré cinquante et un passages aux urgences sans critère de gravité en lien avec cet événement le 26 septembre.
Mes services se sont dès les premières heures attachés à définir des recommandations sanitaires permettant de limiter l'exposition des populations aux particules émises par l'incendie puis aux retombées. Nous avons ainsi immédiatement donné des conseils à la population pour éviter les contacts avec les suies : nettoyer son environnement « à l'humide » en se protégeant, ou encore éviter toute consommation d'aliment souillé, notamment dans les potagers. De nouvelles recommandations, plus spécifiques, ont ensuite été diffusées par mes services, qui portaient, par exemple, sur la gestion des déchets verts ou la conduite à tenir pour les sports en extérieur.
Je suis venue à Rouen, sur le site de Lubrizol, dès le lendemain de l'incendie, pour soutenir les secours et les professionnels de santé, mieux comprendre la situation sanitaire et le ressenti, dire ce que nous savions et ne savions pas, et m'assurer en particulier de la mesure en temps réel et du suivi des conséquences sanitaires sur le terrain.
J'en viens à présent à la surveillance et au bilan de l'impact sanitaire immédiat. Afin d'assurer une surveillance de la population dans les jours qui ont suivi l'incendie, j'ai saisi Santé publique France pour obtenir en urgence une synthèse des conséquences sanitaires observées. L'analyse des données de surveillance épidémiologique a montré un effet réel mais modéré : 259 passages aux urgences, surtout les premiers jours, puis 2 à 5 passages quotidiens. Il s'agissait essentiellement de pathologies asthmatiformes ou de consultations liées à des nausées, vomissements ou céphalées. Au total, 10 personnes ont été hospitalisées et sont sorties après un court séjour. Comme je l'indiquais, aucun cas grave n'a été rapporté durant cette phase aiguë, et ce bilan sanitaire a été confirmé par l'ANSES. Les cas signalés par les centres antipoison n'ont pas présenté un caractère clinique de gravité pouvant révéler la présence d'une substance porteuse de risques sanitaires élevés à court terme au sein de la population générale. La cellule d'appui psychologique instituée à Rouen du 2 au 11 octobre pour accompagner la population et assurer le soutien et l'écoute des habitants a reçu au total 47 personnes, surtout les premiers jours.
Je souhaite également vous apporter quelques précisions sur le contrôle de la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, lequel, rappelons-le, relève de la compétence pleine et entière de mes services. Une surveillance renforcée de la qualité de l'eau a été mise en oeuvre par l'ARS de Normandie, qui a réalisé des analyses immédiatement après l'incendie, en complément de celles effectuées régulièrement dans le cadre du contrôle sanitaire des eaux. Il convient de rappeler que le risque immédiat de contamination des eaux de consommation en Seine-Maritime était limité, car l'alimentation en eau de ce territoire est assurée par des ressources souterraines, qui ne proviennent ni de la Seine ni d'autres rivières. La surveillance renforcée a également été effectuée par les ARS des Régions Hauts-de-France et Grand-Est, également concernées par le panache. Ces analyses, qui ont été largement poursuivies depuis lors – un vaste plan de surveillance des captages ayant été défini pour un grand nombre de substances – ont permis de confirmer l'absence de contamination des ressources en eau destinée à la consommation humaine. L'eau du robinet a donc pu continuer à être consommée sans inquiétude et mes services, en lien avec les préfectures concernées, ont communiqué en ce sens auprès des populations.
Le ministère a suivi avec attention les résultats des analyses effectuées par les différents services de l'État pour caractériser la contamination dans les autres milieux, concernant notamment plusieurs substances préoccupantes telles que l'amiante, les dioxines, les hydrocarbures aromatiques polycycliques ou le plomb, pour ne citer que celles-ci. Notre objectif était d'adapter, le cas échéant, les recommandations sanitaires diffusées aux populations, mais cela n'a pas été nécessaire. En effet, les résultats d'analyses transmis à ce jour n'ont pas mis en évidence de données non conformes aux valeurs seuils.
J'en viens maintenant à une question cruciale, qui a légitimement suscité l'inquiétude des populations touchées : l'incidence de l'accident, à moyen et long terme, sur leur santé et celle de leurs enfants. Nous ne pourrons pleinement rassurer les habitants de ces territoires qu'au moyen d'une démarche rigoureuse d'évaluation quantitative des risques sanitaires et de surveillance épidémiologique adaptée des populations. Dès le 2 octobre, nous avons ainsi saisi l'INERIS et l'ANSES pour qu'ils procèdent à l'évaluation précise des conséquences de l'incendie, à moyen et long terme, sur l'environnement et la santé. Ce travail rigoureux est complexe mais essentiel. Il a été engagé en trois étapes. Il s'agissait, d'abord, d'identifier les contaminants susceptibles de s'être formés à la suite de l'accident et pouvant avoir des conséquences sanitaires. Les agences ont répondu sur ce point le 9 octobre, ce qui a permis de mettre fin à l'application des mesures de gestion préventives – je pense notamment aux séquestres du lait. La deuxième étape, engagée depuis l'arrêté préfectoral du 14 octobre dernier, consiste en une campagne ciblée de prélèvements – dans les sols, les végétaux – pour rechercher ces contaminants dans les milieux : c'est ce qu'on appelle la surveillance de pollution environnementale. Les services du ministère de la transition écologique et solidaire sont en charge du suivi de l'interprétation de l'état des milieux. La dernière étape consistera à réaliser, sur la base de l'ensemble des résultats disponibles, une fois tous les prélèvements opérés, une étude quantitative des risques sanitaires. Il s'agira d'analyser l'impact sanitaire potentiel, principalement pour une exposition chronique. L'arrêté préfectoral du 14 octobre a mis à la charge des exploitants Lubrizol et Normandie Logistique la réalisation de cette étude quantitative. Ses résultats, attendus au premier trimestre 2020, seront expertisés par les agences sanitaires nationales.
En complément, j'ai saisi Santé Publique France le 8 octobre afin de disposer d'un avis sur les actions de surveillance sanitaire à engager pour assurer le suivi à long terme des effets de l'incendie sur la santé des populations. L'agence Santé Publique France déclinera son action de la manière suivante : d'abord, une étude de santé déclarée en population, puis une enquête de bio surveillance, suivie d'une surveillance dans le temps des indicateurs de santé et, enfin, d'un suivi des travailleurs des deux entreprises et des intervenants sur site engagés pour la maîtrise du feu et la dépollution. Par l'étude de santé déclarée en population, l'agence a notamment pour objectif d'être à l'écoute de la population exposée aux fumées et aux retombées des suies. Les interrogations des habitants concernant les conséquences sanitaires seront recueillies lors des entretiens et des « focus groupes ». Des adultes et des enfants seront interrogés sur leur ressenti en termes de nuisances et de symptômes, d'incidences sur la qualité de vie et au regard des conséquences psychologiques et sociales. L'approche est donc pleinement participative. Les résultats de cette enquête pourront justifier des actions d'information et de prise en charge adaptées aux besoins et aux attentes de la population.
En parallèle, si l'interprétation de l'état des milieux – dont les résultats sont attendus aujourd'hui – et de l'évaluation quantitative des risques sanitaires conclut à l'existence d'un risque pour la santé de la population exposée, une enquête de bio surveillance – autrement dit, la mesure de certaines substances chimiques dans des prélèvements biologiques –, pourra être conduite. Les mesures obtenues seront alors comparées aux résultats du programme national de bio surveillance, afin de déterminer si l'incendie a pu surexposer la population rouennaise à des substances chimiques.
Par ailleurs, un suivi dans le temps des indicateurs de santé, tels que les pathologies cardiovasculaires, les pathologies pulmonaires, les cancers et les troubles psychologiques sera mené, dans le but d'identifier un éventuel excès de survenue de ces pathologies parmi la population exposée aux fumées et suies issues de l'incendie. Ce suivi, qui démarrera en juillet 2020 avec la réalisation de l'état sanitaire de référence – autrement dit, l'exposé de la situation avant l'incendie – permettra d'informer la population et les praticiens des conséquences potentielles de l'accident, et d'élaborer des préconisations concernant le suivi et la prise en charge des malades.
La quatrième approche de Santé Publique France concerne le suivi des travailleurs de l'entreprise et de ceux qui sont intervenus sur le site pour maîtriser le feu et dépolluer. Ce travail est coordonné par le groupe d'alerte en santé travail, animé par cette agence. Ce groupe, composé de spécialistes des risques pour la santé des travailleurs, pourra adresser des recommandations aux médecins du travail dans le cadre du suivi de cette population, qui a pu être particulièrement exposée aux fumées et aux suies.
Enfin, un groupe santé a été constitué au sein du comité pour la transparence et le dialogue mis en place par le préfet de Seine-Maritime. Constitué d'associations, de maires, de députés, de médecins libéraux et hospitaliers, de représentants des collectivités locales, il constitue l'interlocuteur privilégié de Santé Publique France et contribuera à la construction des enquêtes et à l'analyse des résultats, afin de privilégier une approche participative.
Pour conclure, je voudrais vous livrer mon analyse de l'événement. Comme vous pouvez le constater, je me suis engagée dès le premier jour pour comprendre et expliquer la situation avec rigueur et en toute transparence. Je resterai engagée pour tirer toutes les leçons de la crise. Il convient de souligner le caractère singulier de cet accident industriel, qui a heureusement fait peu de blessés, mais qui a impliqué un très grand nombre de personnes. La gestion de crise liée à ce type d'événement est de fait intersectorielle et implique plusieurs ministères et services de l'État au niveau territorial. Malgré cette complexité, les services de l'État ont su mener – il faut le souligner – une action coordonnée et cohérente pour protéger les populations. Je voudrais insister sur la qualité et la diligence des expertises mobilisées dès les premières heures. De même, l'engagement de tous les professionnels de santé s'est révélé, à chaque fois, à la mesure des enjeux, et je tiens ici à les en remercier à nouveau. Je veux également souligner le rôle important de mes services dans la gestion de la crise. À la demande du Premier ministre, et en appui à la cellule post-accident activée à la préfecture de Seine-Maritime, la direction générale de la santé a accueilli et animé, dès le 1er octobre et jusqu'au 18 du mois, une cellule nationale d'appui, afin d'assurer un soutien aux autorités locales et à la cellule post-accident, et de coordonner les actions interministérielles, notamment pour mobiliser les bonnes expertises.
Cependant, malgré cette mobilisation d'ampleur et notre volonté de faire toute la transparence, nous n'avons pas su répondre aux inquiétudes légitimes de la population, notamment au sujet des risques sanitaires et environnementaux liés à d'éventuelles contaminations. Il conviendra donc de réfléchir collectivement à de nouveaux modes d'information et de communication auprès de la population – j'y reviendrai. Plus largement, il nous faudra mener dans les prochains mois une réflexion sur les modes de réponse à apporter, au niveau national, à ce type de crises. Les conclusions de votre mission d'information y contribueront évidemment.
Je vous remercie de me donner à présent l'occasion de répondre plus précisément à vos questions.
Quand je me suis rendue à Rouen, j'ai senti l'odeur, j'ai vu les fumées, j'ai ressenti, comme tout le monde, qu'un événement s'était produit. La pollution était, pour moi, de l'ordre du ressenti et de la constatation visuelle, indépendamment de toute notion de gravité ou de toxicité. On ne pouvait pas nier qu'un événement s'était produit, tant il était visible.
Nous connaissons l'ensemble des substances qui ont été déclarées par les responsables des deux usines ; je précise que toutes ne sont pas des CMR, et que toutes n'ont pas brûlé. Ce qui est plus difficile à expertiser, c'est l'« effet cocktail » créé par l'incendie. Nous connaissons la toxicité individuelle de chaque substance, y compris à l'état volatil, mais la consumation entraîne leur destruction, et on ne retrouve pas tout à fait les mêmes produits dans le panache de fumée. Ce sujet est du ressort du ministère de la transition écologique et solidaire. L'ANSES travaille sur les « effets cocktail » et sur l'incidence de la combustion sur ces produits.
La question des seuils de concentration des substances est pertinente car, en l'occurrence, elle se pose dans tous les milieux – dans l'air, l'eau et les sols. La surveillance en routine de la qualité de l'air est prévue par les textes, qui définissent notamment les polluants mesurés – parmi lesquels on peut citer l'ozone, les particules ou le dioxyde d'azote – et les seuils associés. En revanche, les polluants pouvant être émis lors d'un incendie sont multiples et ne sont pas mesurés dans le cadre de la surveillance de routine. L'ANSES mène des travaux de fond pour établir des valeurs toxicologiques de référence (VTR), afin d'évaluer les risques ; ces valeurs sont déterminées en fonction de l'avancement des connaissances et des risques sanitaires connus. L'ANSES établit une « priorisation » annuelle avec les ministères de tutelle, qui peuvent lui demander de définir une valeur de référence en situation d'urgence. Nous nous appuyons également sur les valeurs retenues par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), les seuils connus internationalement, mais – c'est l'une des difficultés que nous rencontrons, car chaque événement est unique – il n'en existe pas pour toutes les substances ni pour tous les types de contamination.
Madame Vidal, l'un des retours d'expérience les plus précieux de la crise concerne le rôle des professionnels de santé dans la communication auprès de la population. Nous ne nous sommes pas suffisamment appuyés sur eux, même s'ils ont été tenus informés. L'alerte et l'information des professionnels de santé au sujet de toutes les questions liées à la sécurité sanitaire des Français sont primordiales. Les praticiens sont en effet en première ligne, et les Français leur font confiance. À cet effet, nous avons à notre disposition deux dispositifs d'alerte. Le système MARS (« Message d'alerte rapide sanitaire ») permet l'envoi d'un message d'alerte aux établissements de santé, au Samu, au centre 15. Nous avons demandé à chaque structure de disposer d'un « contact alerte », auquel l'ARS peut adresser ses propres alertes, et qu'elle mobilise en cas de crise.
Nous disposons d'un outil plus large, la liste de diffusion « DGS-urgent », qui nous permet d'envoyer un message en temps réel aux professionnels de santé inscrits à un ordre, tels que les médecins, les pharmaciens, les infirmiers ou les podologues, pour ne citer qu'eux. Ce dispositif, institué en 2016 par la loi de modernisation du système de santé, a été profondément amélioré. Chaque praticien est désormais tenu de communiquer à son conseil de l'ordre une adresse électronique de contact. Les ordres, qui disposent des listes les plus à jour, sont donc associés au système d'information. La base de données compte aujourd'hui 823 000 professionnels, qui reçoivent des courriels sécurisés, pouvant être ciblés par département et par profession. Ces deux outils sont régulièrement utilisés dans le cadre des alertes sanitaires. À titre d'exemple, des messages ont été diffusés hier pour tenir informés les professionnels des effets d'un nouveau coronavirus en Chine, qui est à l'origine d'une épidémie.
Le ministère a par ailleurs conclu une convention avec le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens, afin de diffuser des messages liés aux alertes sanitaires, par le biais du dossier pharmaceutique.
Concernant Lubrizol, l'ARS a adressé une information synthétique aux Unions régionales des professionnels de santé (URPS) dès le jeudi 26 septembre. Les responsables de ces unions ont notamment été prévenus que la consommation d'eau n'était pas soumise à restriction. L'ARS n'ayant pas demandé à recourir aux outils nationaux, ils n'ont pas été utilisés. Il nous a semblé que les URPS ont peu communiqué avec leurs professionnels ou, du moins, qu'ils l'ont fait de manière inégale. Certains médecins se sont donc sentis isolés face à l'inquiétude de leur patientèle. Cependant, compte tenu des premiers résultats toxicologiques, de l'absence de remontée de cas grave ou inhabituel, il n'y a pas eu de recommandation de prise en charge particulière lors de la phase initiale de l'événement.
Enfin, nous avons mis en place très rapidement un numéro vert, pour que chacun puisse s'informer au niveau national, et nous avons alerté la presse régionale et nationale par des conférences de presse quotidiennes assurées, vous le savez, par le préfet, en lien avec l'agence régionale de santé, qui était à ses côtés.
Vous m'interrogez aussi, madame Vidal, sur d'éventuels effets secondaires à long terme : les enquêtes de Santé Publique France nous éclaireront parfaitement sur ce point. La présence d'amiante dans l'environnement, en tout cas, ne doit pas susciter de craintes. L'explosion du toit de l'usine a effectivement entraîné la propulsion d'amiante, mais seulement sous la forme de gros débris – dont la préfecture a organisé le retrait par des équipes ad hoc – et non de fibres. Le niveau de fibres d'amiante dans l'air et sur les sols n'est pas supérieur au seuil admis : il n'y a donc aucun risque de mésothéliome.
Monsieur le rapporteur, tout est fait pour que l'enquête épidémiologique soit lancée au plus vite, selon le calendrier qui a été annoncé. Mais nous devons, au préalable, disposer des résultats environnementaux, car nous ne pourrons rien faire tant que nous ne connaîtrons pas les substances que nous devons rechercher. Les principales substances toxiques connues n'ont pas été trouvées dans l'environnement, mais nous en cherchons à présent de plus rares, liées par exemple à un « effet cocktail ». Nous avons besoin de ces résultats pour proposer une surveillance ciblée sur un organe en particulier ou sur une population donnée. L'enquête de Santé publique France devrait débuter en mai 2020, lorsque nous disposerons de tous ces éléments. En attendant, nous veillons à recueillir le ressenti de la population et à la rassurer. Nous mènerons une enquête de bio surveillance si nous retrouvons dans l'environnement des substances toxiques issues d'un « effet cocktail ».