Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention, d'une part, sur les récentes déclarations du parquet concernant les manquements de sécurité de la part des deux entreprises victimes de l'incendie, Lubrizol et Normandie Logistique ; d'autre part, sur les outils de dialogue et de concertation que le ministère compte mettre en oeuvre pour permettre une meilleure communication entre les différentes parties prenantes lors d'un accident industriel.
En premier lieu, le réquisitoire supplétif du parquet de Paris, en date du 19 décembre dernier, conclut à des manquements de sécurité de la part des deux entreprises. Parmi ces manquements, il est notamment reproché à Normandie Logistique de ne pas avoir mis à jour l'état des stocks, ce qui m'amène à conclure que l'entreprise n'était peut-être pas en mesure de connaître, à l'instant « t », les produits entreposés sur son site, et donc le risque associé. Bien que l'enquête soit en cours et qu'il convienne de s'astreindre à un devoir de réserve pour le bon déroulement de celle-ci, dans le respect de la présomption d'innocence, quelles mesures préconisez-vous pour que l'État puisse être tenu informé des produits stockés par une entreprise ? Ne peut-on pas envisager la mise en place d'un jeu de données périodiques partagé entre l'exploitant et les DREAL, afin de connaître les produits dangereux présents sur chaque site ? On pourrait, pour cela, s'inspirer du modèle de la contractualisation établie, dans un domaine qui n'est pas celui des accidents industriels, entre Enedis et les collectivités, qui définit les données devant être fournies par le concessionnaire à l'autorité concédante. À partir du moment où une entreprise est classée Seveso, peut-on envisager qu'elle transmette périodiquement la liste des produits qu'elle détient sur son site ?
La loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE, a introduit, à l'article L. 541-48 du code de l'environnement, la notion de plateforme industrielle, dont le décret d'application du 21 novembre 2019 précise les contours. Pourriez-vous nous préciser en quoi cette notion doit permettre de mieux anticiper les risques d'incidents industriels ?
En second lieu, vous avez précisé, lundi dernier devant le Conseil supérieur de la prévention des risques, le plan d'action que vous comptez mettre en oeuvre pour répondre aux défaillances constatées lors de la gestion de cette crise.
Je soutiens ardemment la modernisation des outils de dialogue et de concertation que vous avez annoncée et qui me semble nécessaire, dans un contexte où la parole de l'autorité publique est très rapidement mise en doute.
Je vous avais interpellée, le 2 octobre dernier, à l'occasion de votre audition devant la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur l'opportunité de réformer les commissions de suivi de site (CSS) pour que ces dernières deviennent les interlocuteurs privilégiés en cas de crise. Concrètement, je soutiens l'idée qu'il faut que les commissions de suivi de site, qui ont l'avantage de réunir l'ensemble des parties prenantes, élus locaux, associations locales, exploitants, salariés et administration, puissent assumer une double fonction : la première, en temps normal, étant de continuer à être un lieu d'information et d'échanges, afin que l'ensemble des acteurs puissent être informés de la vie du site industriel – par exemple, des projets des différents exploitants, des incidents qui ont eu lieu et des actions entreprises pour la prévention du risque – ; la seconde, en temps de crise, serait d'être le vecteur de diffusion d'une information cohérente, et cela à l'ensemble des acteurs. En d'autres termes, les CSS ne pourraient-elles pas permettre, en cas de crise, une communication ascendante et descendante plus fluide entre les autorités et les différents acteurs locaux concernés, dans l'idée notamment de mieux informer la population ?