C'est effectivement essentiel, monsieur Carrez : profitons de ces événements pour renforcer le pouvoir de contrôle du Parlement. Mon rôle n'est pas d'en décider à sa place, mais il est bon pour notre démocratie que le Parlement contrôle mieux ; c'est ma conception des institutions. Si le ministère de l'économie et des finances peut y contribuer en fournissant à votre commission les pièces dont elle a besoin, il le fera bien volontiers. En ces matières si sensibles, il faut savoir tirer les leçons de l'expérience de ces dernières années.
Quant à la comptabilité maastrichtienne, monsieur le rapporteur général, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), que nous avons saisi de la question, nous a indiqué qu'il lui paraissait possible de répartir ainsi les créances : 5 milliards d'euros en 2017, 5 milliards d'euros en 2018. Nous attendons maintenant les décisions d'Eurostat, organisme totalement indépendant, mais c'est bien parce que nous avons le feu vert de l'INSEE que nous avons réparti les créances en deux moitiés sur deux exercices budgétaires.
La possibilité de régler l'acompte de surtaxe le 20 décembre plutôt que le 15 décembre, avec cinq jours de décalage, n'est prévue que pour les sociétés qui clôturent leur exercice le 31 décembre, non pour celles qui clôturent leur exercice au mois de janvier ou de février. Cela peut effectivement poser une difficulté, que je propose, dans un souci de rapidité et d'efficacité, d'examiner la possibilité de résoudre cette question par simple instruction, mais, sur les 320 entreprises redevables, 80 % clôturent leur exercice le 31 décembre et cela représente 94 % du produit de l'impôt sur les sociétés. Le problème ne serait donc que marginal.
Le nombre d'entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 3 milliards d'euros est de 143, dont 109 sont bénéficiaires au titre des exercices clos en 2016. Ces 109 sociétés ont déclaré au total un chiffre d'affaires de 1 620 milliards d'euros, soit un chiffre d'affaires moyen de 14,9 milliards d'euros au titre des exercices clos en 2016. Le montant moyen de bénéfices est estimé, sur la base de ces chiffres, à 412 millions d'euros.
Quelques remarques sur ces chiffres. Premièrement, nombreuses sont les entreprises dont les bénéfices ont connu entre 2016 et 2017 de fortes variations. Deuxièmement, il y a effectivement une très forte concentration de l'IS sur les entreprises au chiffre d'affaires le plus élevé, puisque le ticket moyen est estimé à 412 millions d'euros ; cela explique que le produit de la taxe soit concentré sur les entreprises qui ont un chiffre d'affaires supérieur à 3 milliards d'euros. C'est une information importante à porter à votre connaissance. Les chiffres précis que vous avez demandés, monsieur rapporteur général, vous seront tous évidemment transmis par courrier dans les meilleurs délais.
Monsieur Carrez, reprenons bien la séquence pour aller au fond du sujet et ne laisser planer aucune ambiguïté sur les décisions prises.
La CJUE a effectivement rendu son arrêt au mois de mai dernier. Au mois de juillet, nous nous sommes réunis et, au mois de septembre, j'ai présenté, avec Gérald Darmanin, le projet de loi de finances pour 2018. Dans le même temps, le Conseil d'État a saisi le Conseil constitutionnel d'une question prioritaire de constitutionnalité. Le projet de loi de finances et la trajectoire budgétaire présentée, qui va jusqu'en 2022, prévoient 5,7 milliards d'euros de provisions au titre du remboursement anticipé par nos services de cette taxe jugée illégale. Pourquoi pas 10 milliards d'euros ? La raison en est simple : si la décision du Conseil constitutionnel avait été la transposition rigoureuse de l'arrêt de la CJUE, ne devait être remboursée qu'une partie de la taxe, celle qui concerne les filiales, non les sociétés mères. Le Conseil constitutionnel a pris une option différente. Je reconnais très humblement que nous n'avions pas envisagé l'hypothèse d'une annulation complète de la taxe par le Conseil constitutionnel, avec demande de remboursement intégral ; c'est une décision sensiblement plus dure que l'arrêt rendu.
L'évaluation de notre ministère était fondée à partir du moment où la CJUE estimait que seul un remboursement partiel était nécessaire. Le Conseil constitutionnel est parfaitement libre d'aller plus loin, et je ne critique évidemment pas sa décision. Je constate simplement qu'elle est beaucoup plus dure que l'arrêt, sur lequel se fondait notre estimation. D'autre part, le Conseil constitutionnel a estimé que ce remboursement était d'application immédiate. Cela justifie ce dépôt rapide d'un projet de loi de finances rectificative. En outre, si nous attendons le collectif de fin d'année, nous n'aurons pas de paiement sur 2017. Or nous voulons et sommes contraints de faire un remboursement dès 2017. Le projet de loi de finances rectificative de fin d'année sera promulgué le 30 décembre, soit postérieurement à la date limite du 20 décembre, à respecter pour que les sommes soient encaissées en 2017. Je réponds de manière très détaillée à la question de Gilles Carrez parce qu'elle est très importante. Nous devons engager des remboursements avant la date limite du 20 décembre.