Ma question, madame la secrétaire d'État, porte sur les conditions de prise en charge des soins prodigués en France aux Français retraités établis à l'étranger, plus particulièrement hors de l'Union européenne. Deux éléments contribuent à limiter pour les intéressés les droits liés à la carte Vitale sur le sol national, et je le déplore. Le premier concerne l'instauration d'une durée minimale de quinze années de cotisation à un régime français pour pouvoir bénéficier d'une couverture maladie lors de séjours ponctuels en France. Le second, effet collatéral de l'extinction du statut d'ayant droit, concerne la situation des ayants droit majeurs d'un retraité français établi à l'étranger, qui sont le plus souvent des femmes. Ne pouvant justifier de la condition de résidence en France donnant accès à la protection universelle maladie, la PUMA, ces personnes ne sont donc plus couvertes pour leurs soins en France, alors qu'elles l'étaient auparavant.
L'accès à la prise en charge des soins en France constitue pour de nombreux retraités de l'étranger aux revenus très modestes la seule porte d'entrée vers un suivi médical de base et répond du même coup à un fort enjeu de prévention. En effet, le recours à une assurance privée ou à la Caisse des Français de l'étranger – la CFE – pour bénéficier d'une assurance santé en France ou à l'étranger n'est pas à la portée de toutes les bourses. À titre d'exemple, le montant de l'adhésion à la CFE pour la seule couverture des soins en France d'un couple de personnes âgées de plus de soixante ans s'élève à 260 euros par mois. Notons que les retraités n'ont accès aux offres de la CFE que s'ils ont cotisé au moins quinze années à un régime français, en application des nouvelles conditions introduites dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Autrement dit, même ceux qui auraient les moyens de se couvrir ne peuvent s'assurer s'ils ne sont pas en mesure de justifier de cette durée de cotisation minimale. En fin de compte, il y a fort à parier que les personnes concernées par cette restriction de droit vont tout simplement renoncer aux soins et, ainsi, grossir les rangs de nos compatriotes de l'étranger éloignés de tout dispositif sanitaire, qui souffrent voire décèdent de pathologies pourtant faciles à détecter et à soigner. Au Cameroun, par exemple, cinquante ressortissants français sont décédés en deux ans en raison de pathologies qui auraient pu être facilement soignées.
Lors de mes échanges avec les cabinets ministériels compétents, j'ai constaté que le Gouvernement n'était pas hostile à une évolution sur ces deux sujets. Je plaide quant à moi pour que la durée minimale de cotisation soit ramenée à dix ans et qu'un délai suffisant soit accordé aux nouveaux retraités pour leur permettre d'anticiper ces nouvelles règles. D'autre part, je souhaite vivement que la question des ayants droit majeurs soit rapidement résolue. Je forme enfin le voeu que nos concitoyens de l'étranger puissent être pleinement intégrés à la stratégie « ma santé 2022 », dont l'ambition est à saluer, de même que les efforts déployés en faveur des hôpitaux.
Il s'agit là d'une question de justice tout autant que d'un enjeu de santé publique. Notre pays vient de montrer qu'il était capable de mobiliser d'importants moyens pour prémunir nos concitoyens contre un risque sanitaire inquiétant. Il me semble qu'un effort pourrait également être déployé sans réelle incidence sur le budget de l'État en faveur de la centaine de retraités affectés par la modification des règles d'accès aux soins en France.