La réforme des retraites actuellement examinée dans cette assemblée suscite, comme chacun le sait, des interrogations et des réactions d'adhésion, mais aussi des craintes.
J'aimerais rappeler, au nom du groupe du Mouvement démocrate et apparentés, que cette réforme est non seulement nécessaire pour refonder un système de retraites qui n'est ni juste ni lisible, mais encore légitime et attendue, car elle résulte d'un long travail de concertation.
Il importe, au-delà des craintes exprimées par une partie de la population, de bien définir ce dont on parle. Les choix opérés dans cette réforme sont guidés par un impératif de justice sociale. Ils relèvent de nombreux défis, notamment la prise en considération des évolutions démographiques et économiques à venir.
La protection sociale, dans son ensemble, s'inscrit dans le temps long. Il n'existe pas de modèle type, de schéma parfait. Néanmoins, celui proposé par le Gouvernement nous semble constituer un véritable pacte intergénérationnel, plus juste et plus durable. Ce projet, qui dessinera le cadre de notre système de retraites, garantira aussi la pérennité de notre système par répartition.
L'efficacité des dispositifs naît aussi de la cohérence des grandes réformes sociales que nous nous attachons à mener avec constance.
Notre action reste orientée par de nombreuses interrogations et la volonté de relever de grands défis. Quelle part de la richesse nationale souhaitons-nous consacrer aux retraites par répartition ? Quel niveau de vie voulons-nous assurer aux futurs retraités ? Comment susciter à nouveau l'adhésion et la confiance ? Comment refonder un nouveau pacte social, nourri de dialogue franc et direct, pour une société plus unie, dans laquelle l'humain prime ?
« Si l'homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout » écrivait Albert Camus. Cette citation résume bien les enjeux de cette réforme, dans laquelle ces deux priorités sont conjuguées. La justice est respectée – et je parle bien ici de justice sociale : le système sera plus juste, pour ceux ayant connu des carrières hachées et pour les femmes ; il sera également plus solidaire des petits revenus. La liberté est aussi présente : celle, pour chacun, de décider de son âge de départ à la retraite de manière éclairée, en disposant de l'ensemble des éléments susceptibles de guider son choix.
Cette réforme repose sur trois piliers – l'universalité, l'équité et la solidarité.
Au sein du Mouvement démocrate, nous accordons une vigilance particulière à trois principes, qui nous semblent déterminants. La garantie du niveau des pensions tout d'abord : elles ne doivent pas baisser, quels que soient les bouleversements que connaît la société. Ensuite, les droits acquis et les spécificités de chaque carrière doivent être pris en considération dans la transition vers la fin des régimes spéciaux. Enfin, les réserves constituées par différentes professions doivent être intouchables.
Cinq grands aspects de cette réforme nous semblent prioritaires. Premièrement, il faut sécuriser les garanties accordées aux Français, grâce à une gouvernance pérenne et indépendante ; efficace dans la durée, elle laissera toute leur place aux partenaires sociaux.
La pénibilité doit être prise en considération et les conditions de travail difficiles doivent être reconnues.
La famille, avec les évolutions qu'elle connaît, représente également un sujet important.
Il faut respecter la liberté d'organiser sa fin de carrière, et de transmettre les compétences et le savoir acquis durant des décennies aux jeunes générations.
Nous devons reconnaître l'engagement de chacun, et surtout de chacune, en faveur des autres, pour la société ou dans le monde associatif. Ce travail invisible, effectué notamment par les aidants, est très souvent assuré par les femmes et n'est presque jamais valorisé ni récompensé.
À titre personnel, je serai particulièrement attentif aux évolutions proposées pour le système de retraite des fonctionnaires. Les nouvelles modalités de calcul constituent un bouleversement dont les conséquences seront très concrètes. J'observerai précisément les modalités de convergence vers le système cible, qui seront étalées sur quinze ans afin d'éviter une transition brutale.
J'aimerais enfin dire un mot sur l'importance du dialogue social, qui constitue selon moi la clé pour une réforme réussie et à la hauteur des enjeux. L'ouverture de la conférence de financement la semaine dernière, chargée de trouver un accord concernant l'équilibre financier du système de retraite d'ici à 2027 en est l'exemple. La gouvernance doit reposer sur un pacte social fort, dans lequel chacune des représentations syndicales fait valoir son avis. Car la démocratie consiste avant tout à valoriser et considérer la voix de chacun ; c'est savoir partager le pouvoir et les décisions, en bonne intelligence collective.