Le problème majeur avec votre proposition, monsieur Woerth, c'est qu'elle maintient des régimes qui ne sont pas démographiquement viables. Notre commission aurait pu être utilement éclairée par l'audition des spécialistes de l'histoire sociale en France. J'ai en effet découvert assez récemment qu'en 1990, au moment de la publication du Livre blanc de Michel Rocard, il existait encore une centaine de régimes spéciaux : chaque banque, chaque port autonome avait le sien – seul subsiste aujourd'hui celui du port autonome de Strasbourg, qui compte environ deux cents salariés –, sans compter les régimes spéciaux d'Alsace-Lorraine. Ces régimes, assis sur une base démographique extrêmement fragile, ont été progressivement intégrés dans le régime général, grâce à un dispositif de protection actuarielle des droits, impliquant pendant quelques années une légère surcotisation pour leurs adhérents. Entend-on aujourd'hui les salariés du système bancaire revendiquer le retour à un régime spécifique ?
Pensons aux jeunes qui ont déjà du mal à choisir leur avenir professionnel : faut-il en plus les obliger à réfléchir à leur système de retraite ? C'est le cadet de leurs soucis ! Nous leur proposons, nous, d'avoir tous les mêmes chances face à la retraite. Ce système, que nous souhaitons le plus équitable, possible, exige une transition qui accompagne la transformation en profondeur que nous opérons. C'est pour cela que nous agissons sur le temps long. Avis défavorable.