Truquer une étude d'impact ou la rendre insincère, c'est une chose ; truquer une tribune du Monde, c'en est une autre. Dans la tribune en question, Antoine Bozio, l'inspirateur même de la réforme, reprend l'étude d'impact, selon laquelle les effets seront neutres pour les 50 % des plus hautes pensions, alors que les deux quartiles du bas y gagneront. Il demande comment cela est possible en baissant la part des retraites dans le produit intérieur brut. La réponse, ajoute-t-il, n'est pas affirmée explicitement dans l'étude d'impact, mais s'y trouve en filigrane : l'âge de départ à la retraite sera relevé. Or les effets de cette hausse ne sont pas comptabilisés, notamment les nombreux salariés qui ne réussiront pas à travailler jusqu'au moment de leur retraite. C'est déjà ce qui se passe depuis dix ans, avec le relèvement progressif des seuils de la retraite : une étude de la Cour des comptes de juillet 2019 indique que, sur cette période, le montant total de RSA versé aux personnes âgées de 60 à 64 ans a augmenté de 157 %. Cela veut dire que les gens ne parviennent d'ores et déjà plus aujourd'hui à travailler jusqu'à la retraite, et que l'on remplace une retraite méritée par de l'allocation de pauvreté.