Monsieur le député, je vous ai connu plus nuancé dans vos analyses. L'énervement perceptible chez les uns et les autres est sans doute un effet de la tempête qui s'est abattue sur la France…
Je ne pense pas que la France ait été humiliée, car elle a tenu bon. Humiliée, elle l'aurait été si nous avions accepté le compromis à seize heures trente, alors que le Conseil s'est terminé à six heures du matin. Je n'ai pas voulu lâcher.
Vous savez très bien qu'il n'est pas possible d'annuler la mesure. Vous connaissez le fonctionnement des conseils européens : la France était isolée ; j'ai été le seul à m'opposer à la position de la Commission. À l'arrivée, il y avait deux solutions : soit on votait le compromis, soit on ne le votait pas, ce qui revenait à perdre toutes les avancées positives que nous avions obtenues.
Sur le sujet de la pêche en mer Celtique, je n'ai cessé d'être en contact avec les pêcheurs et le président du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins, une personne très écoutée mais qui a parfois des positions bien différentes selon qu'il parle avec moi ou avec les pêcheurs bretons – ce qui est bien normal. Le stock en mer Celtique est un vrai problème, nous le savons tous. Je me suis opposé à la position proposée par le commissaire européen, celle du « raise line », c'est-à-dire de la levée des filets, car cela ne règle pas le problème. Seule l'Irlande l'a demandée, mais cette solution a été acceptée par tous les pays de l'Union européenne, sans aucune exception, hormis la France – je tiens à le souligner.
On ne peut pas dire que la France n'est pas écoutée, seulement, dans l'Union européenne, c'est la majorité qui l'emporte. L'enjeu du Conseil, partagé par les pêcheurs français et les autres États membres, était de parvenir à une augmentation du total autorisé des captures en contrepartie de mesures complémentaires de gestion : nous l'avons obtenu et sommes pleinement mobilisés sur ce sujet. Une réunion trilatérale s'est tenue avec la France, la Commission et la présidence du conseil, assurée par la Finlande. Cela montre bien que nous avons fait monter la pression au point de permettre de débloquer partiellement la situation. J'ai réussi à convaincre le commissaire européen d'un compromis, celui que l'application du raise line soit décalée de cinq mois.
De ces cinq mois, il en reste désormais quatre pour travailler. Le commissaire sera à Paris demain et après-demain ; je le rencontrerai jeudi matin pour lui indiquer que je conteste totalement la méthode retenue aujourd'hui par la Commission : elle n'est pas acceptable car elle se fonde seulement sur quelques études qui n'ont pas été validées par l'ensemble des parties. Personnellement, je m'appuie beaucoup sur l'étude de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer – IFREMER.
Ce matin encore, j'étais avec le président de la région Bretagne, et nous avons abordé ce sujet. Je souhaite que nous trouvions une autre solution pour sortir de la crise. Il existe un problème de gestion durable, et tous les pays doivent être logés à la même enseigne : peut-être la pêche sera-t-elle fermée durant quelques semaines ? Mais, dans ce cas, elle sera fermée pour tout le monde. Il n'est pas question que nous acceptions la situation actuelle, qui n'est pas satisfaisante. Après-demain, je ferai au commissaire une contre-proposition, afin qu'il puisse la porter au niveau européen. Je lui ai très clairement dit que la position actuelle a été proposée par l'Irlande sur la base d'études que nous contestons. J'ai donc demandé à l'IFREMER de travailler avec le comité national et le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins et les services de la direction des pêches maritimes et de l'aquaculture – DPMA – , pour obtenir un résultat que j'espère positif.