Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du mardi 11 février 2020 à 15h00
Application du cinquième alinéa de l'article 13 de la constitution - prorogation du mandat des membres de la hadopi — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

Au terme de la procédure législative, la commission mixte paritaire a été conclusive. Nos deux assemblées ont en effet travaillé pour avancer dans la même direction, celle du maintien du droit de regard dont le Parlement dispose sur le pouvoir de nomination du Président de la République à certains emplois et fonctions publics. Nous avons abouti à un texte qui, s'il n'est pas parfait, constitue par certains aspects une avancée en matière de contrôle par le Parlement, essentiel à la garantie des droits et libertés et à la vie économique et sociale.

Le groupe Libertés et territoires est très attaché à la procédure prévue à l'article 13, mais elle mériterait d'être améliorée. Depuis la révision constitutionnelle de 2008 et l'instauration de l'alinéa 5 de l'article, le Parlement dispose, en théorie, d'un pouvoir de veto. Cependant, en raison de la règle imposant que l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions compétentes, ce droit de veto n'a jamais trouvé à s'appliquer dans le cas d'une nomination proposée par le Président de la République. Aussi, douze ans après son adoption, la question de l'effectivité de cette procédure se pose plus que jamais, compte tenu de l'exigence de transparence et d'exemplarité républicaine. Nous devons réfléchir à une évolution de la procédure actuelle en instaurant a minima un droit de veto à la majorité simple.

Les deux projets de loi qui nous ont été soumis ont été améliorés au cours de la navette parlementaire, notamment grâce à l'extension de cette procédure à de nouvelles nominations : celles du président de la CADA, du directeur général de l'OFII – en dépit de l'opposition du Gouvernement – mais aussi des directeurs généraux de l'ANSM et de l'ANSES. Cette extension est une bonne chose, même si nous aurions souhaité qu'elle englobe d'autres nominations relatives à la SNCF.

C'est sur ce point qu'une difficulté est apparue entre les deux assemblées. Il était prévu que le Parlement soit appelé à se prononcer non plus sur la nomination de chacun des dirigeants des trois établissements publics qui composent la SNCF, mais sur celle du seul dirigeant de la société nationale. En première lecture, je vous avais fait part des réserves de mon groupe à ce sujet. Que l'on fût pour ou contre la réforme, nous constations que le pouvoir de contrôle du Parlement serait, sur le papier, amenuisé. Dans le contexte d'ouverture à la concurrence du transport national de voyageurs et compte tenu des enjeux d'aménagement du territoire, il paraissait indispensable de maintenir le droit de regard du Parlement sur la nomination du dirigeant de la société SNCF Réseau.

Si nous n'avons pu parvenir à un accord, je note cependant qu'il a été proposé de réexaminer l'article 13 de la Constitution pour renforcer les prérogatives du Parlement. Notre groupe y souscrit totalement, à condition qu'une révision constitutionnelle soit présentée d'ici à la fin de la législature.

Nous constatons également que nos assemblées ont évité l'écueil consistant à considérer ces deux projets de loi comme de simples ajustements techniques dictés par des mesures prises au moyen d'ordonnances récentes. Cela n'aurait pas été acceptable, surtout dans le contexte de l'examen de la réforme des retraites, qui multiplie le recours aux ordonnances et qui nous oblige à légiférer pendant que les partenaires du dialogue social discutent du financement, sans avoir la moindre visibilité en la matière.

Sur le fond, certains aspects sont positifs, mais la méthode soulève plusieurs interrogations importantes. Le Parlement a été invité à tirer les conséquences de trois ordonnances qui n'ont pas encore été ratifiées, sur des sujets aussi importants que la police des jeux, la régulation des transports et l'organisation du réseau ferroviaire, ou encore le changement de dénomination du CSA prévu dans le projet de loi de réforme de l'audiovisuel, qui n'a même pas encore été voté par notre Parlement : c'est un non-sens !

Quoi qu'il en soit, chers collègues, étant donné les évolutions obtenues au cours des débats et même si nous estimons qu'il était possible de faire mieux, nous voterons en faveur de ces deux textes.

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