Nous nous trouvons aujourd'hui, comme à chaque fois qu'il est question de vie ou de mort, de santé, face à un sujet qui dépasse les clivages politiques – par ailleurs légitimes dans cette assemblée. La proposition de loi que vous examinez aujourd'hui n'a pas de couleur politique, elle ne rentre pas dans des cases partisanes : sa seule vocation est de sauver des vies.
Je me félicite que cet esprit transpartisan ait guidé les travaux de l'Assemblée, en séance comme en commission, en première lecture. Je ne doute pas que ce sera encore le cas aujourd'hui.
Certains faits sont demeurés inchangés depuis le début de nos échanges : chaque année, en France, 40 000 personnes meurent d'un arrêt cardiaque. Les arrêts cardiaques inopinés, qui n'ont aucune cause apparente, représentent 9 % des décès. Plus grave encore, lorsqu'un arrêt cardiaque survient, le taux de survie, dans notre pays, n'est que de 3 % à 4 %.
Si je dis que c'est plus grave, c'est qu'il suffit de jeter un oeil aux statistiques – même s'il est regrettable d'y avoir recours pour un sujet aussi sensible – des pays voisins pour constater que nous pouvons sans nul doute faire mieux : en Scandinavie et dans les pays anglo-saxons, le taux de survie en cas d'arrêt cardiaque monte à 20 %, 30 %, voire 40 %. Pouvons-nous renoncer et mettre de côté toute bonne initiative ? La réponse est évidemment non. C'est celle du Gouvernement et du Président de la République ; ce sera aussi, je n'en doute pas, celle de cette assemblée.
Un constat s'impose : plus des deux tiers des arrêts cardiaques surviennent en présence de témoins. Cela signifie que si un plus grand nombre de personnes étaient formées aux gestes qui sauvent et savaient comment intervenir et prendre en charge les victimes en attendant les secours, nous mettrions toutes les chances de notre côté pour améliorer le taux de survie en cas d'arrêt cardiaque. Le Président de la République a donc fixé un objectif : former 80 % de la population aux gestes qui sauvent, avec un délai raisonnable de dix ans.
C'est un objectif ambitieux ; pour autant, nous devons l'assumer tous ensemble. Il impose une implication constante de l'État et de tous les acteurs de la sécurité civile. Il exige de former à tous les âges – c'est ce que nous faisons, et devons continuer à faire.
Cet objectif doit nous rassembler – je sais que nous y tenons tous. Il aura des effets concrets sur la sécurité des Français, puisque sa conséquence sera immédiate : des vies sauvées, le taux de survie en cas d'arrêt cardiaque devant passer de 3 % à 10 %, ce qui représente 3 000 vies sauvées par an.
Pour résoudre un problème qui nous concerne toutes et tous, et dans la perspective d'une augmentation du nombre de citoyens formés – donc, demain, nous l'espérons tous, d'une multiplication des interventions susceptibles de sauver des vies lors de la survenue d'arrêts cardiaques – , nous devons adapter notre cadre législatif.
Cette proposition de loi est innovante. Je remercie M. Colas-Roy pour son implication en faveur de ce texte et, plus largement, des premiers secours. Je connais, monsieur le député, votre engagement indéfectible en la matière.
La création d'un statut propre à une personne qui intervient en cas d'arrêt cardiaque offrira une protection supplémentaire à ceux qui pratiquent les premiers secours, notamment les massages cardiaques ou l'utilisation d'un défibrillateur électrique. En effet, rien ne serait plus injuste que de les laisser risquer des poursuites en raison des actes qu'ils auraient commis en tentant de sauver une vie.
Le statut de citoyen sauveteur constitue donc une protection. Néanmoins, nous devons prendre garde à ce qu'il ne fragilise pas la notion de collaborateur occasionnel du service public. Il s'agit en effet d'une notion importante de notre droit et nous devons veiller, collectivement, à ce que son champ d'application ne puisse être réduit. J'ai toutefois bien compris, monsieur le rapporteur, que, dans l'acception que vous lui donnez, la notion de citoyen ne revêt qu'une dimension symbolique, liée à un comportement, et ne vise pas la qualité de citoyen en droit.
En outre, la proposition de loi contient des avancées que nous devons encourager, comme la sensibilisation des jeunes et des salariés, en vue de former le plus grand nombre possible de Français, en commençant dès l'école.
Ces dispositions s'inscrivent dans la droite ligne de la politique menée par le Gouvernement. Cette année, 80 % des élèves de troisième recevront une formation aux premiers secours.