Venons-en justement au fond.
L'article 1er de la proposition de loi vise à transformer en un crédit d'impôt la réduction d'impôt au titre des frais d'hébergement dont bénéficient les personnes âgées accueillies dans les établissements et les services spécialisés. On sait que le reste à charge des personnes en EHPAD est un réel problème, auquel nous devons nous attaquer de manière urgente. En effet, si les prestations de soins sont couvertes à 100 % et celles relatives à la section « dépendance » aux deux tiers, les prestations de la section « hébergement » – hôtellerie, restauration, animation – sont à la charge des ménages. Selon la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques – DREES – , le reste à charge, même si l'on tient compte des aides diverses qui peuvent être octroyées, atteint 1 850 euros par mois. Dans 75 % des cas, il excède les ressources courantes de la personne âgée.
De plus, transformer la réduction d'impôt en crédit d'impôt permettrait de toucher les personnes les plus modestes, qui ne paient pas, ou peu, d'impôts. En effet, contrairement à ce qui se passe avec la réduction d'impôt, si le crédit d'impôt est supérieur au montant de l'impôt, le surplus donne lieu à un remboursement par la direction générale des finances publiques, la DGFIP.
S'agissant du maintien à domicile, la transformation en 2017 de la réduction d'impôt en crédit d'impôt a été relativement efficace. C'est pourquoi le groupe Les Républicains considère qu'il s'agit d'une piste intéressante pour réduire le reste à charge dans les EHPAD et soutient cette mesure.
Les articles 2, 3 et 4 de la proposition de loi concernent le handicap. Le texte vise tout d'abord à supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans le versement et le plafonnement de l'AAH. Cette mesure est demandée depuis longtemps par de nombreuses associations. Nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter à plusieurs reprises, en particulier lors de l'examen de précédentes propositions de loi, qui ont toutes été rejetées par la majorité. J'avais également appelé l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur ce sujet dans une question écrite datée du 22 mai 2018.
Or les arguments qui nous ont été opposés jusqu'à présent ne m'ont pas convaincu. Le premier est celui de Mme la secrétaire d'État, qui nous avait livré une démonstration mathématique en mars 2019. N'ayant pas son talent, je vais tenter de la synthétiser : l'adoption de cette mesure aurait pour conséquence d'abaisser les plafonds applicables et de diminuer le montant de l'allocation pour près de 57 000 ménages. Néanmoins, madame la secrétaire d'État, c'est le Gouvernement qui a les clés pour écarter de telles conséquences ! C'est à vous de fixer les barèmes en fonction de la loi pour éviter qu'il y ait des perdants.
En outre, pour justifier le rejet de chacun des articles de la proposition de loi par la commission des affaires sociales la semaine dernière, on nous a dit que l'AAH était un revenu de solidarité active – RSA – amélioré et adapté aux personnes handicapées, et non une compensation financière du handicap ; elle n'aurait donc pas vocation à être individualisée. Or le RSA est une aide temporaire visant à faciliter le retour au travail, tandis que l'AAH est une aide financière liée à une certaine incapacité de travailler. Il n'est donc pas juste d'assimiler l'AAH au RSA.
Vous avez également argué que l'individualisation de cette allocation reviendrait à nier la situation familiale du bénéficiaire et que la solidarité familiale doit prévaloir sur la solidarité nationale. Vous tolérez donc que, dans notre pays, la France, en 2020, on conseille aux personnes en situation de handicap de ne pas se marier ou de divorcer pour avoir un niveau de vie plus décent. Nous n'avons décidément pas le même projet de société.