L'histoire de la place des victimes dans notre droit pénal est longue et sinueuse. Nous partons de loin, puisque la fonction du ministère public consiste à poursuivre les infractions au nom de la société afin d'en punir les auteurs : historiquement, depuis que la justice pénale est une justice publique, elle ne laisse point de place aux victimes.
Cependant, face au préjudice subi par ces dernières, qui demandent légitimement à être prises en considération, le droit pénal s'est progressivement assigné un nouvel objectif : indemniser les victimes. La création d'un fonds de garantie assurant leur indemnisation constitua une avancée majeure. La vague d'attentats qui a frappé la France dans les années 1980 a conduit le législateur à concevoir un dispositif spécifique pour réparer les préjudices subis par les victimes. Le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme a alors vu le jour en 1986. Dès 1990, sa mission a été étendue à la prise en charge des victimes d'infractions de droit commun – celles qui nous préoccupent aujourd'hui.
Depuis sa création, le FGTI exerce ainsi une mission d'intérêt général au nom de la solidarité nationale. Il convient donc que la CIVI puisse être saisie le plus largement possible. Or, au gré des réformes et des décisions de justice successives, une ambiguïté s'est installée quant au délai de saisine de cette commission.
La loi du 15 juin 2000 a tout d'abord introduit une avancée en obligeant la juridiction saisie au fond à informer la victime de son droit de saisir la CIVI. Cependant, cette loi a également introduit une difficulté quant au point de départ du délai pendant lequel la victime peut saisir cette commission. Le texte laisse en effet entendre que, lorsque l'auteur de l'infraction a été condamné à verser des dommages et intérêts, le délai court à compter de l'information faite à la victime de son droit de saisir le fonds de garantie, et non plus à compter de la décision de justice définitive.
Par conséquent, la Cour de cassation applique à la lettre le texte du code de procédure pénale, ce qui pose plusieurs difficultés : outre le fait que le délai pour saisir la CIVI se trouve nécessairement réduit, cette interprétation, défavorable aux victimes, paraît en totale inadéquation avec la loi du 15 juin 2000 et crée une disparité entre les victimes. La proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui vise donc à clarifier le point de départ en précisant que le délai court à compter de la décision définitive.
Ce texte nous permet d'évoquer, plus largement, la question de l'indemnisation des victimes par le biais du FGTI. Je saisis l'occasion pour souligner que les procédures sont longues, pour des indemnisations parfois limitées. Nous devrions donc nous interroger sur les moyens accordés à ce fonds. Outre les infractions de droit commun, la recrudescence des attentats augure malheureusement d'une forte hausse de son activité. La prise en charge financière des victimes n'effacera pas les drames vécus, mais elle leur permettra d'envisager matériellement l'avenir. Elle doit être assurée conformément à ces enjeux.
Dans l'attente de nouveaux débats sur ce point, toute amélioration procédurale est bienvenue. La proposition de loi de notre collègue Jeanine Dubié permet une clarification de bon sens, facilitant le parcours d'indemnisation des victimes. Le groupe UDI-Agir la votera donc sans réserve.