Intervention de Jacques Marilossian

Séance en hémicycle du mardi 7 novembre 2017 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Défense

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Marilossian, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission de la défense nationale, mes chers collègues, la revue stratégique de défense et de sécurité nationale d'octobre 2017 a permis une analyse réaliste et exhaustive de la situation internationale. Aujourd'hui, la France est plus menacée, plus exposée dans un environnement stratégique incertain et instable. Dans un monde multipolaire, en mutation, nos forces sont engagées dans des crises sans cesse plus dures, face à des adversaires toujours mieux armés.

La revue stratégique a clairement défini les axes majeurs que notre pays doit poursuivre et qui justifient la nécessaire remontée en puissance de nos armées : consolider notre autonomie stratégique ; conserver un modèle d'armée complet et équilibré dans la durée ; porter une ambition européenne forte ; enfin, entretenir et faire prospérer notre industrie de défense.

Dans ce contexte, la marine nationale doit faire face à des enjeux stratégiques spécifiques. La mondialisation de nos intérêts nationaux est sans précédent. L'économie mondiale est devenue totalement dépendante des espaces maritimes – 90 % des échanges commerciaux, 95 % des communications intercontinentales.

Si la France a 4 082 kilomètres de frontières terrestres, ses frontières maritimes peuvent être estimées à plus de 19 000 kilomètres, dont seulement 5 800 kilomètres de côtes métropolitaines. La souveraineté de la France s'étend aujourd'hui sur une zone économique exclusive de 11 millions de kilomètres carrés. Cet espace maritime, le deuxième au monde, attise les convoitises en raison de ses ressources halieutiques et de son potentiel en hydrocarbures et ressources minérales, avec les fameux nodules polymétalliques.

Les zones maritimes sensibles se multiplient : détroit d'Ormuz, détroit de Bab-el-Mandeb, golfe de Guinée, canal du Mozambique, mer de Chine, Nouvelle-Calédonie ou océan Pacifique. Nous devons faire face à des menaces multipolaires de toutes natures : pêches illégales et destructrices, trafics de drogue, déni d'accès et bien sûr terrorisme.

Or nous avons connu pendant les quinze dernières années une baisse régulière des moyens en effectifs, en équipements et en maintenance, consacrés aux missions de la marine. Un constat lucide peut être dressé : l'ensemble des bâtiments et des effectifs sont en suractivité, bien au-delà du contrat opérationnel qui leur avait été fixé. La vétusté inquiétante de nombreux navires met en danger les équipages, menace les missions et augmente les coûts de maintenance. Des insuffisances capacitaires fragilisent nos opérations, menaçant sécurité et protection, et limitant les possibilités d'interventions stratégiques.

Notre zone économique exclusive et nos territoires d'outre-mer connaissent un déficit de présence et de protection inquiétant. L'arrêt technique majeur du porte-avions Charles-de-Gaulle représente quant à lui une indisponibilité de près de deux ans et se traduit donc par une limitation forte de notre capacité stratégique et surtout diplomatique. L'opérabilité est à améliorer, la présence des bâtiments à la mer n'étant que de 110 jours.

Nous conservons également des modes de gestion budgétaire annualisés, des modes de contractualisation contraignant pour nos industries – souvent contrat unique, au forfait – , sans distinguer prototype et production de série. Ces pratiques sont souvent dangereuses pour nos entreprises : non seulement elles augmentent les coûts de structure et les risques, mais elles fragilisent leur capacité d'investissement et d'innovation et les placent en position difficile dans la concurrence internationale.

Dans ce contexte de réduction des effectifs, de vieillissement des matériels et de limitation des moyens d'intervention, la marine nationale a su tenir son rang malgré tout, en assurant un engagement total au service des missions qui lui ont été confiées. Ses participations à de nombreuses missions internationales ont été unanimement saluées et ses interventions quotidiennes pour la protection de notre territoire et de nos citoyens méritent l'admiration de tous.

Dans ces conditions, le budget de la marine, dans le projet de loi de finances pour 2018, est un budget emblématique et charnière pour la marine nationale pour l'ensemble des programmes 146,178 et 212.

Dans un premier temps, il s'inscrit dans la continuité des exercices précédents, dans la trajectoire de la loi de programmation militaire et de son actualisation de 2015. Cela explique les principaux programmes de commande et de livraison de matériels pour 2018 – hélicoptères, avions Rafale, frégates, missiles, patrouilleurs, sous-marin, etc.

Dans un deuxième temps, ce budget présente une forte régénération et une forte remontée en puissance de nos armées. Cet effort se traduit essentiellement par une augmentation significative du budget consacré au maintien en condition opérationnelle : 512 millions d'euros en autorisations d'engagement et 237 millions d'euros en crédits de paiement.

Oui, le budget 2018 amorce la nécessaire remontée en puissance recommandée par la revue stratégique de défense et de sécurité nationale. Cette remontée en puissance devra trouver toute sa plénitude dans la loi de programmation militaire. La conclusion est donc évidente : avis favorable.

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