J'aimerais connaître le point de vue non de l'INRA ou du chercheur, mais votre appréciation personnelle au travers de votre expérience de chercheur, de responsable à l'INRA, sur le point suivant. Le pêcheur privé de ses moyens professionnels n'est pas responsable de la pollution au chlordécone, puisqu'il n'est pas l'État des années 1970 et 1980 ayant donné l'autorisation d'exploiter des produits dangereux. Ce pêcheur qui ne détient que rarement des terres agricoles n'est pas responsable de la pollution des sols. Pourquoi serait-il victime et ne ferait-il l'objet d'aucun égard en termes d'indemnisation ? On ne peut plus pêcher sur environ deux tiers des côtes. Le petit agriculteur qui pratique l'agriculture vivrière autour des grandes habitations, issue de l'époque coloniale, est victime de la pollution de sa terre par percolation sans avoir épandu le moindre kilo de chlordécone. Le monsieur qui a travaillé honnêtement dans les champs est aussi une victime. Moi qui adore l'igname, le chou et tous les tubercules qui représentent la nourriture quotidienne, notamment quand on est pauvre, je deviens victime.
Que penseriez-vous de la mise en oeuvre d'une campagne d'indemnisation claire et nette, et d'une campagne de prise en charge de Santé publique France destinée à connaître le niveau de contamination éventuelle par prélèvements sanguins ? Que penseriez-vous d'un plan d'indemnisation des victimes du chlordécone, notamment pour les personnes atteintes d'un cancer de la prostate, en dépit de l'affirmation déplacée selon laquelle il n'y aurait pas de lien mais qu'il y aurait peut-être 8 à 10 % de personnes touchées ?