Je vous donnerai mes sources ! Nous savons par ailleurs que 95 % des Guadeloupéens et 92 % des Martiniquais sont imprégnés de chlordécone. Si vous n'allez pas plus loin, est-ce parce que l'État ne vous suit pas ? Une prudence généralisée vous empêche-t-elle de conclure au caractère extrêmement dangereux du chlordécone ? Cette dangerosité a été constatée dès 1990, puisqu'on a alors interdit son usage, en accordant, toutefois, des prolongations incroyables. Dites-nous tout.
Gilles Bloch. Il faudrait peut-être réorienter vos questions, en tenant compte du fait que l'INSERM est un organisme de recherche, et non un organisme qui prend des décisions de politique sanitaire ou de réglementations sur les produits phytosanitaires. L'INSERM est un organisme qui produit des résultats de recherche et qui les valorise en les diffusant le plus largement possible, en particulier à travers les expertises collectives que j'ai décrites. On ne peut pas nous montrer du doigt sur tous les sujets, s'agissant de l'exposition de la population antillaise à la chlordécone. Nous avons travaillé sur ces sujets lorsqu'ils sont apparus dans le radar des questions scientifiques. Nous avons une équipe active sur le terrain en Guadeloupe depuis que l'on sait qu'il y a un risque. La manière dont vous nous montrez du doigt me paraît disproportionnée.
S'agissant des chiffres, en termes d'épidémiologie, pour ma part, il n'y a pas un surrisque majeur de cancer de la prostate aux Antilles aujourd'hui. Quand on regarde les données épidémiologiques globales, les chiffres de l'incidence du cancer de la prostate sont du même ordre de grandeur que dans des populations génétiquement comparables ailleurs dans le monde. Il est vrai que l'étude épidémiologique Karuprostate montre un surrisque, qui apparaît de façon dose-dépendante avec l'exposition à la chlordécone. Je pense que vous avez parlé de ce sujet avec le porteur de l'étude : ce surrisque, en termes de surincidence du cancer de la prostate dans la population, n'induit pas une surincidence majeure. Nous sommes à la limite du détectable.