Intervention de Henri-Luc Thibault

Réunion du jeudi 11 juillet 2019 à 17h00
Commission d'enquête sur l'impact économique, sanitaire et environnemental de l'utilisation du chlordécone et du paraquat comme insecticides agricoles dans les territoires de guadeloupe et de martinique, sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d'une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires

Henri-Luc Thibault, ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts, membre du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) :

Je rappelle que cette évaluation du plan chlordécone III nous est demandée alors que ce plan n'est pas arrivé à son terme. Il ne s'agit donc pas d'une évaluation ex ante ni d'une évaluation ex post, mais d'une évaluation in itinere, qui répond à un certain nombre de canons méthodologiques que nous allons nous attacher à suivre scrupuleusement.

Par ailleurs, ce plan chlordécone III a fait l'objet d'un certain nombre d'inflexions et de compléments par le truchement d'une feuille de route qui court sur la dernière période du plan soit 2019-2020. Nous devrons donc regarder de près ce qui a motivé ces inflexions et ces compléments. Enfin, avant même que nos travaux aient commencé, un plan chlordécone IV est déjà annoncé, pour lequel il nous est demandé de présenter des propositions ad hoc. L'exercice est donc quelque peu séculier, mais d'autant plus intéressant compte tenu de ses caractéristiques.

S'agissant de la méthode de notre travail, nous procéderons à une évaluation classique néanmoins fondée sur des critères auxquels nous sommes attachés. Le premier consistera à bien cerner les objectifs implicites et explicites du plan initial, et à chercher à savoir en quoi ils se rapportent aux enjeux environnementaux, économiques et sociaux affichés par un certain nombre d'acteurs.

La première tâche consistera donc à bien comprendre quels sont ces objectifs et s'ils sont pertinents au regard des enjeux, ce qui constitue un des critères classiques de l'évaluation. Le plan chlordécone III comporte 21 actions réparties sur quatre axes ; nous examinerons donc en quoi ces actions sont cohérentes par rapport aux objectifs affichés.

À cet effet, nous fonderons notre appréciation sur des éléments comme le calendrier ou l'expression de ces actions. Nous vérifierons ensuite, action par action, en quoi elles ont été efficientes et efficaces, si elles sont mesurables, si nous disposons d'indicateurs et si des cibles leur ont été associées ainsi que des jalons. Nous examinerons si des financements sécurisés et inscrits dans la durée sont attachés à ces actions et pour quelles périodes. Nous nous attacherons ensuite aux résultats, à ce qui en est observable sur le terrain et comment le plan documente les indicateurs, si tant est que ceux-ci existent.

En revanche, contrairement à ce qu'il se pratique habituellement dans les études d'évaluation, nous ne pourrons pas mesurer des impacts puisque ces éléments s'observent à plus long terme.

En fonction de ces éléments, pour ce qui regarde le plan initial, nous allons surtout nous pencher sur ce qu'il s'est passé pour ces actions au cours des années 2015 à 2018. Pour la période 2019-2020, sur laquelle porte la nouvelle feuille de route, nous examinerons ces nouvelles actions : s'attachent-elles à des objectifs différents ? Y a-t-il une continuité dans les objectifs poursuivis ? Nous tâcherons d'apporter des éclairages sur ces divers éléments que nous sommes déjà en train d'explorer.

Comme vous pouvez le constater, monsieur le président, ces méthodes très classiques n'ont rien d'original ; ce sont celles agréées par les institutions d'évaluation.

Par-delà ces questions de méthode, des demandes spécifiques nous ont été adressées. Elles touchent à la gouvernance retenue pour le plan chlordécone III : est-elle perfectible, le cas échéant sous quelle forme ?

Il nous a encore été demandé d'examiner un certain nombre des actions de ce plan avec une acuité particulière : les actions 1 et 2 sur les stratégies de moyen long terme ; comment ce plan chlordécone III – et en creux ceux qui l'ont précédé – s'inscrivent dans une vision de ce que serait le développement de territoires concernés par la pollution et la chlordécone principalement ? Une vision est-elle exprimée, est-elle implicite ou explicite ? Ce travail constituera une partie importante de notre démarche.

Il nous est aussi demandé d'évaluer l'action 4 qui concerne surtout la cartographie des sols, l'action 6 qui porte sur le programme JAFA, l'action 7 qui regarde les aliments, les actions 15, 16 et 18 relatives aux programmes de recherche, et les actions 19 à 21 consacrées à l'accompagnement des populations les plus exposées que sont les agriculteurs, les pêcheurs et les membres des organisations professionnelles.

À ce stade, nous sommes en à la période de l'analyse documentaire, nous avons rencontré un certain nombre d'interlocuteurs dans les administrations centrales, nous avons eu la chance de participer au récent comité de pilotage du plan chlordécone III organisé à Paris. Nous nous proposons de nous rendre sur place, et de rendre notre rapport dès que nous le pourrons, si possible avant la fin de l'année.

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