La mission d'information sur le continuum entre sécurité et développement a été créée en mars 2019, il y a donc un peu moins d'un an, ce qui est un peu plus long que la durée de six mois que le bureau de notre commission a souhaité consacrer à nos prochaines missions d'information. Vos conclusions arrivent néanmoins en temps particulièrement opportun, puisqu'elles entretiennent un lien très étroit avec la réflexion aujourd'hui engagée dans le cadre de notre cycle géostratégique sur l'évolution de la conflictualité. Le thème sur lequel vous avez travaillé si intensément prend actuellement une résonance très particulière en raison, d'une part, de la concrétisation des menaces liées aux risques de la faiblesse, sur lesquelles insistait le livre blanc de 2013 – faiblesse des États, comme en Somalie, en République centrafricaine, au Yémen ; faiblesse aussi du lien politique ou social, et nous attendons avec intérêt vos analyses sur les pays du Sahel, que vous avez tout particulièrement étudiés à l'occasion d'un déplacement dans cette zone – et en raison, d'autre part, de réflexions actuelles sur les modalités de nos interventions, au-delà de la réponse militaire, avec un recours de plus en plus important à l'ingénierie développée depuis l'après-Guerre froide en matière de médiation, de désarmement, de réinsertion des combattants ou encore dans les domaines de la réforme du secteur de la sécurité ou de la justice transitionnelle et de la recréation du lien social. C'est là tout l'enjeu de l'articulation des trois « D » (défense, développement, diplomatie), auxquels il convient sans doute d'ajouter le « G » de « gouvernance ».
Il est essentiel de prendre en compte, nous rappelait Manuel Lafont Rapnouil, le directeur du centre d'analyse, de prévision et de stratégie (CAPS) du ministère des Affaires étrangères, que toute une série d'acteurs au sein des sociétés en guerre n'ont pas spontanément pour objectif de régler des conflits, et c'est à ceux-là aussi qu'il importe de s'adresser pour les convaincre des bienfaits des dividendes de la paix. Seule, l'action militaire apparaît de plus en plus impuissante. Non qu'elle soit inutile : dans l'urgence, il faut bien résoudre le chaos conflictuel d'une région ou d'un pays ; mais, pour apporter une solution durable aux crises, il doit être recherché d'autres réponses à l'insécurité humaine, et c'est précisément ce sur quoi vous avez réfléchi en vous appuyant sur des exemples précis, mais en faisant l'effort – et c'est tout l'intérêt de votre travail – de tirer des recommandations plus générales susceptibles de s'appliquer à une grande variété de situations.