Le secteur audiovisuel public est concerné au premier chef par la révolution numérique et il s'en est d'ailleurs très bien emparé. France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, l'INA, ARTE et TV5 Monde ont fait des efforts très importants pour s'adapter à l'évolution des usages, efforts souvent sous-estimés par le grand public.
Dans un contexte où les barrières entre télévision, radio, numérique, diffusion en linéaire ou à la demande ont de moins en moins de sens, les sociétés nationales de programme ont mené à bien des projets communs comme la chaîne de télévision franceinfo, ou les matinales France Bleu-France 3.
Cependant, l'organisation actuelle, éclatée, crée des freins organiques, juridiques et pratiques. Le projet de loi prévoit de rassembler France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'INA au sein d'un groupe dont la société mère sera une holding – France Médias.
Cette réorganisation doit permettre de donner les moyens à l'audiovisuel public de faire face à une concurrence mondialisée et de constituer un média global. France Médias devra assurer un rôle de pilotage stratégique, sans interférer dans la gestion opérationnelle de ses sociétés filles. France Médias doit rester une structure légère, dont le rôle sera d'encourager les synergies en matière d'immobilier, de formations et de systèmes d'information.
L'article 59 du projet de loi réécrit entièrement le titre III relatif à l'audiovisuel public de la loi du 30 septembre 1986, en réorganisant et en clarifiant les missions de service public et les obligations des sociétés afin de recentrer l'audiovisuel public sur ce qui le distingue des sociétés privées : parler de tout le monde, à tout le monde. Les missions de service public sont réorganisées autour de cinq grands objectifs : la cohésion sociale, l'information, la culture, l'action extérieure et l'éducation. Monsieur le ministre, nous souhaitons ajouter un sixième objectif – le divertissement – car le service public doit se distinguer par sa capacité à proposer un divertissement de qualité et à présenter de façon attrayante la culture, la science ou l'histoire.
Comme Aurore Bergé, je souhaiterais également que la responsabilité particulière du service public audiovisuel à l'égard de la jeunesse soit inscrite de façon plus explicite dans ce projet de loi. Je proposerai un amendement en ce sens.
La gouvernance des organismes de l'audiovisuel public est modifiée pour tenir compte de leur réorganisation. Elle sera plus professionnelle et plus indépendante. Le conseil d'administration de France Médias comportera douze membres. Ses modalités de désignation assurent un équilibre entre prérogatives de l'État actionnaire, contrôle de l'ARCOM – garante de l'indépendance de l'audiovisuel public – et pouvoir de nomination du Parlement.
Les relations financières avec l'État seront régies par une convention stratégique pluriannuelle conclue entre l'État et France Médias pour l'ensemble du groupe. La holding sera chargée de répartir les ressources publiques dont elle sera affectataire entre ses sociétés filles. La convention sera transmise avant signature aux commissions parlementaires compétentes. Celles-ci seront aussi destinataires d'un rapport d'exécution annuel avant l'examen de la loi de règlement. Enfin, elles seront informées de la répartition annuelle prévisionnelle des ressources publiques entre France Médias et ses filiales. La holding devra justifier les écarts entre les prévisions de la convention et le rapport d'exécution.
Le projet de loi réaffirme en outre le financement de l'audiovisuel public par le produit de la contribution à l'audiovisuel public. Le financement de France Médias par une taxe affectée constitue une des garanties de l'indépendance de l'audiovisuel public. Monsieur le ministre, comme vous, je suis attachée à la pérennité de ce financement.
Je serai favorable à ce que l'on autorise la publicité en soirée sur France Télévisions pendant la retransmission d'événements sportifs d'importance mondiale. Cette mission de service public est particulièrement coûteuse. Ces cas resteraient exceptionnels, mais cela permettrait de financer une partie des droits des événements afin qu'ils continuent à rester accessibles à tous sur les chaînes du service public.
Nous devons trouver un moyen juridique afin que la richesse des contenus audiovisuels des chaînes publiques soit reprise en intégralité par les box internet, puisque c'est ainsi que la majorité de nos concitoyens reçoit désormais les chaînes de télévision. Les sociétés audiovisuelles publiques offrent des contenus très riches – programmes locaux ou régionaux, versions originales (VO) ou françaises (VF), renvois vers d'autres programmes linéaires ou à la demande, podcasts, et surtout versions adaptées pour les personnes malvoyantes (audiodescription) et pour les personnes sourdes et malentendantes. Monsieur le ministre, comment faire en sorte que cette richesse de contenus parvienne à tous nos concitoyens et ne soit pas limitée par des économies de moyens technologiques ?