Il y a un mois presque jour pour jour, nous avions fait ici même un choix collectif : protéger les Français contre le coronavirus en acceptant de mettre volontairement l'économie à l'arrêt, ou au moins de la faire ralentir très fortement. C'était une décision assumée par le Gouvernement et, je le crois, par l'ensemble d'entre nous, sur tous les bancs. Dans la foulée, nous avons adopté un premier plan d'urgence qui avait plusieurs objectifs : soutenir le tissu productif et les entreprises pendant cette phase d'arrêt, en particulier leur trésorerie, et protéger les emplois et les compétences.
Aujourd'hui, nous examinons un nouveau projet de loi de finances rectificative, qui a d'abord pour objet de « recharger », pour reprendre le mot du ministre de l'action et des comptes publics, les crédits nécessaires, portés à 110 milliards. Si nous sommes à sec, il faut bien faire le plein ! Nous resserrons aussi les mailles du filet de sécurité économique que nous avions collectivement tissé il y a un mois.
Je tiens au passage à saluer le travail de tous les députés, sur tous les bancs, depuis un mois : ils se sont faits les garants de la bonne application des mesures adoptées, et les retours du terrain ont largement nourri la construction, la coconstruction même, de ce collectif budgétaire. Je parlerai d'ailleurs de « PLFR bis » plutôt que de « PLFR 2 », tant la continuité est forte.
Quelque 9 millions de salariés bénéficient du dispositif d'activité partielle, qui fonctionne bien. Nous le dotons donc de 15,5 milliards d'euros supplémentaires, dont 10,5 milliards à la charge de l'État. Ce sont autant de salariés que nous faisons ainsi échapper au chômage, et dont nous préservons par la même les compétences pour faire repartir notre économie demain.
À ce jour, 900 000 petites entreprises de moins de dix salariés ont fait appel au fonds de solidarité : ce sont autant d'éléments de notre tissu productif qui sont maintenus à flot, et c'est heureux. Pour répondre aux besoins massifs qui se sont fait jour, nous portons la contribution de l'État de 750 millions à 5,5 milliards d'euros ; grâce aux autres contributeurs que sont les régions, les assureurs et quelques entreprises, ce fonds est ainsi doté de plus de 7 milliards d'euros.
Nous avons constaté, sur le terrain, que certaines conditions imposées dans la mouture initiale étaient trop restrictives. Je remercie le Gouvernement d'avoir entendu les parlementaires, ce qui l'a conduit à abaisser le seuil de perte de chiffre d'affaires de 70 à 50 % et à instaurer un calcul sur la base du chiffre d'affaires moyen des douze derniers mois plutôt que sur celle du seul mois précédent. Ces aides sont exonérées d'impôt. Enfin, le plafond, actuellement de 2 000 euros, sera porté à 5 000 euros.
Les banques ont accordé des prêts garantis à hauteur de 90 % par l'État à 200 000 entreprises, pour 10 milliards d'euros. Jusqu'à présent, les entreprises en difficulté étaient systématiquement exclues du dispositif, en application de la règle classique de la garantie de Bpifrance ; là encore, grâce au travail collectif, les entreprises en redressement judiciaire ou en procédure de sauvegarde pourront en bénéficier si elles sont passées sous ce statut après le 1er janvier 2020.
À ce filet de sécurité aux mailles resserrées, le présent projet de loi de finances rectificative ajoute de nouveaux dispositifs, que je ne ferai que citer : pour doter l'État d'une capacité de prises de participations massives, le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » disposera de 20 milliards supplémentaires ; pour protéger les entreprises les plus fragiles, les crédits du FDES__ le fonds de développement économique et social __ sont portés à 1 milliard d'euros ; pour protéger les entreprises exportatrices du risque d'impayés, le plafond de l'assurance crédit de court terme pour l'export est rehaussé à 5 milliards d'euros ; enfin, un amendement gouvernemental crée un nouveau programme d'avances remboursables, qui sera doté de 500 millions d'euros.
En commission, nous avons enrichi le texte afin d'accroître encore la résistance de ce filet de sécurité : sur une proposition de Mme Dominique David, les artistes-auteurs seront dispensés de l'obligation de justifier d'un numéro SIRET pour être éligibles au fonds de solidarité ; nous apportons aussi un soutien spécifique aux ménages fragiles, comme le ministre de l'action et des comptes publics l'a dit, par le transfert de 880 millions d'euros ; nous facilitons l'approvisionnement en masques en alignant leur régime fiscal sur celui des biens de première nécessité, le taux de TVA qui leur est applicable étant ramené de 20 à 5,5 % – cette demande émanait de plusieurs bancs, et je salue le consensus qui s'est dégagé.
Nous examinerons ensemble 372 amendements, ce qui devrait nous amener assez tard ce soir.
Je réaffirme devant vous, en ouvrant ce temps de travail commun, que personne, aucune entreprise, aucun emploi, aucun citoyen, aucun territoire de la République ne doit être laissé de côté.