Il y a déjà plus d'un mois, notre groupe a été le premier, il faut le reconnaître, à poser la question de la distinction entre catastrophe naturelle et catastrophe sanitaire : il nous semblait évident que les pertes d'exploitation que connaissent actuellement les entreprises auraient dû être garanties par les contrats d'assurance. Mais de fait, ce n'est pas le cas. Il faut donc réfléchir à une solution pour l'avenir, peut-être en constituant un groupe de travail sur le sujet, même si, bien entendu, cela ne sera pas de nature à rassurer les entreprises aujourd'hui concernées.
Dans cette affaire, les assureurs ont très mal communiqué. Certes, ils ont accepté de verser un peu d'argent – je pense que les 3,2 milliards évoqués par la Fédération française de l'assurance seront effectivement distribués – , mais de façon diffuse et peu lisible. Leur contribution au fonds de solidarité – d'abord 200 millions d'euros, puis finalement le double – ne couvrira qu'une partie des pertes d'exploitation subies par les plus faibles, d'autant que cette aide est mutualisée. Tout se passe comme s'ils ne donnaient pas cet argent de bon coeur, comme s'ils hésitaient à revendiquer leur acte.
Il y a surtout un manque de visibilité. Ils auraient pu verser la même somme en expliquant qu'elle était destinée à indemniser – après une retenue de 10 ou 15 % – une partie des pertes d'exploitation subies, du moins pour les entreprises éligibles au fonds de solidarité. Il était possible de faire plus, dans le respect des contrats signés. Cela étant, une crise de cette ampleur entraîne évidemment un risque systémique : on ne peut donc pas demander aux assureurs de couvrir de manière globale des pertes d'exploitation pour lesquelles il n'existait pas de couverture contractuelle. Personne ne souhaite fragiliser le secteur avant même la sortie de crise.
J'en viens à la question de la sinistralité. Va-t-elle augmenter ou baisser au cours de la crise ? Intuitivement, on pourrait estimer qu'elle sera au bout du compte plus faible, ce qui ouvrirait la voie au remboursement d'une partie des cotisations. Mais les assureurs disent qu'en réalité, la crise aura de multiples conséquences qui auront pour effet d'augmenter le taux de sinistralité. C'est possible, mais il faudra le vérifier.
Enfin, il ne faudrait pas déshabiller Pierre pour habiller Paul, autrement dit en demander tellement aux sociétés d'assurance qu'elles ne seraient plus en mesure, demain, de couvrir d'autres sinistres.
Il reste que pour l'instant, le secteur de l'assurance a échoué dans son traitement de la crise. Il devra se rattraper à l'avenir, en communiquant plus clairement, en expliquant son action, et surtout en rendant celle-ci plus visible auprès des assurés.