Elle me paraît efficace puisque le Parlement pourra ainsi contrôler la bonne exécution de ces crédits.
Au-delà du projet de loi de finances rectificative (PLFR), les entreprises pourront bénéficier de mesures de trésorerie à hauteur de 35 milliards d'euros en demandant le report dès le mois de mars de leurs charges fiscales et sociales. Certaines pourraient même être – nous aurons le débat avec le Gouvernement en séance publique – annulées.
Ce PLFR répond en premier lieu à l'exigence constitutionnelle de sincérité budgétaire. En effet, dans les cas où il apparaît que les grandes lignes de l'équilibre économique et financier défini par la loi de finances de l'année se trouveraient, en cours d'exercice, bouleversées, ce qui est manifestement le cas, il revient au Gouvernement de déposer un tel texte.
Conformément à la loi organique, tout PLFR doit comporter un article liminaire retraçant l'état des prévisions du solde structurel et du solde effectif de l'ensemble des administrations publiques et un article d'équilibre qui présente les données générales de l'équilibre budgétaire et fixe les plafonds de dépenses.
Dans le cas de ce PLFR, il actualise le tableau de financement de l'État pour 2020 en tenant compte de son nouveau besoin de financement, désormais estimé à 245,6 milliards, contre 230,5 milliards en loi de finances initiale pour 2020.
Les nouvelles prévisions du Gouvernement ont le mérite de placer un curseur sur l'impact de la crise sanitaire actuelle sur le solde public. Le déficit public des administrations pour 2020 est désormais estimé à 3,9 % du produit intérieur brut, contre 2,2 % en loi de finances initiale, ce qui correspond à une dégradation de 1,7 % du PIB.
L'impact de la crise sanitaire et des mesures d'endiguement entraîne une forte augmentation du déficit conjoncturel : 1,4 % de PIB. Elle traduit la forte progression de l'écart de production, différence entre le PIB effectif et le PIB potentiel. Nous nous trouvons dans un cas exceptionnel qui crée donc un déficit conjoncturel.
Les nouvelles mesures exceptionnelles et temporaires s'élèvent à 0,3 % de PIB, soit environ 9 milliards d'euros. Elles correspondent à des dépenses supplémentaires de lutte contre la crise qui sont en partie compensées, comme le prévoit le projet de loi, par le produit d'une amende de 2,1 milliards dont le groupe Airbus doit s'acquitter.
En revanche, le déficit structurel des administrations publiques demeure, et c'est très important, inchangé, en cohérence avec le fait que les mesures nouvelles ont un caractère temporaire et que les pertes de recette anticipées découlent uniquement de la dégradation de la conjoncture.
Le déficit structurel se maintient donc à 2,2 % de PIB, ce que le Haut Conseil des finances publiques a validé dans son avis du 17 mars 2020 sur le projet de loi.
S'agissant de l'État, le déficit budgétaire s'établit désormais pour 2020 à 108,5 milliards d'euros, au lieu des 93,1 milliards que prévoyait la loi de finances pour 2020, soit une augmentation de 15,4 milliards.
Cette augmentation résulte d'une perte de recettes fiscales de 7,2 milliards et d'une augmentation des dépenses de 8,2 milliards.
Il convient évidemment de considérer ces premières estimations avec prudence. Si les hypothèses retenues par le Gouvernement ont le mérite de prendre en compte avec honnêteté l'ampleur du choc actuel, il est évident que son ampleur et ses effets ne peuvent être connus avec certitude à l'heure où nous parlons, compte tenu des circonstances exceptionnelles que nous vivons.
Le Haut Conseil des finances publiques, en tout cas, estime que ce projet de loi de finances rectificative est sincère et qu'il n'enfreint pas les règles européennes relatives aux circonstances exceptionnelles. Il sera toujours temps, si la situation évolue, d'ajuster ces prévisions, mais ce n'est pas la priorité aujourd'hui. La priorité qui nous rassemble, c'est de sauver les entreprises, d'éviter que leur trésorerie ne s'assèche et de sauver l'emploi.
C'est dans la tourmente que nous faisons l'épreuve des solidarités qui nous unissent. La solidarité s'exerce envers tous : nos voisins, nos proches, nos aînés, mais aussi les membres du corps médical, les collectivités territoriales et les entreprises. Cette solidarité passe par l'État et par ses services publics, qui nous protègent. La solidarité nous unit aussi à nos partenaires européens : l'Union européenne apporte de puissantes réponses au défi économique et sanitaire que nous devons affronter ensemble. J'en profite pour saluer l'annonce d'une garantie des prêts bancaires de 1 000 milliards au niveau de l'Union et la souplesse dont a fait preuve la Commission européenne dans l'application de nos règles communes. Je salue également l'action de la Banque centrale européenne, qui a annoncé le rachat d'obligations d'État et d'entreprises à hauteur de 750 milliards d'euros d'ici à la fin de 2020, ce qui contribue à stabiliser les marchés.
Mes chers collègues, nous sommes tous en guerre contre un ennemi sans visage, pour paraphraser le Président de la République. Cette guerre ne se terminera pas une fois le plus dur de la crise sanitaire passé : nous ne gagnerons cette guerre que si nous gagnons la paix, c'est-à-dire à condition d'en penser et d'en poser dès maintenant les termes. Après le temps de l'urgence viendra le temps de la relance mais, d'ici là, je veux rendre hommage une dernière fois aux blouses blanches, aux uniformes blancs qui se battent chaque jour pour endiguer la progression du virus. Une nation forte, c'est une nation qui protège chacun de ses membres : ses aînés, les plus fragiles, mais aussi ceux qui sont au front.