Pour ce qui est du retour d'expérience, je propose que nous fournissions chaque semaine à la commission des finances un tableau de bord des différentes mesures de soutien aux entreprises.
Laurent Saint-Martin m'a interrogé au sujet des 20 milliards d'euros de prises de participations de l'État. Ces fonds sont destinés aux entreprises vulnérables et prioritaires cotées et leur seront fournis sous forme d'apports en capital, de prises de participation ou éventuellement de nationalisations, ces dernières devant être temporaires car l'État n'a pas vocation à diriger l'économie mais simplement à protéger les industries sensibles.
Les entreprises en difficulté sont éligibles aux prêts garantis par l'État, ce qui constituera l'une des modifications importantes de ce texte de loi : ainsi, toutes les entreprises soumises à une procédure collective depuis le 1er janvier 2020 peuvent accéder au dispositif – en revanche, cela n'aurait pas de sens d'en faire bénéficier celles qui sont en liquidation judiciaire.
Sur l'accord européen, ce sont 240 milliards d'euros qui vont être débloqués au titre du Mécanisme européen de stabilité, qui peut être mis en oeuvre dès lors que les spreads de taux d'intérêt entre la France et ses partenaires européens s'accroissent, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui : il n'y a donc pas de raison pour la France de recourir au MES, qui constitue cependant un filet de sécurité pouvant être utilisé à tout moment, personne ne sachant de quoi l'avenir sera fait.
Pour ce qui est des 100 milliards d'euros destinés au financement du chômage partiel, une partie de cette somme est effectivement destinée à la France, et il en est de même des prêts de la Banque européenne d'investissement : dans les semaines à venir, les entreprises françaises vont donc pouvoir disposer de 30 à 40 milliards d'euros de prêts à des taux particulièrement favorables, par l'intermédiaire de leurs agences bancaires et des guichets de la Banque publique d'investissement.
Je m'associe à l'hommage rendu par Joël Giraud à Bernard Stalter, président du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat. Celui qui était un ami personnel et un homme fondamentalement bon a beaucoup fait pour l'artisanat. Sa disparition a constitué un choc immense pour tous ceux qui l'ont connu.
En ce qui concerne le fonds de solidarité, j'insiste sur le fait qu'il me paraît plus raisonnable que le deuxième étage de ce dispositif, qui vient d'être porté à 5 000 euros, reste réservé aux entrepreneurs employant un ou plusieurs salariés et se trouvant confrontés aux difficultés les plus importantes. Si nous laissions les entrepreneurs sans salariés avoir accès à ce deuxième étage, nous prendrions le risque qu'il ne puisse plus remplir son usage, consistant avant tout à éviter les licenciements. Par ailleurs, c'est bien lorsqu'on a des salariés que l'on a le plus besoin d'un complément de trésorerie.
Nous sommes actuellement confrontés à un problème d'engorgement, puisque 900 000 entreprises ont déjà fait appel à ce fonds de solidarité. Si elles demandent toutes à accéder au deuxième étage, qui prévoit un traitement des dossiers au cas par cas au niveau régional, nous aurons du mal à traiter l'ensemble de ces dossiers de manière sereine et objective.
Véronique Louwagie et Mohamed Laqhila ont évoqué la question de la garantie du prêt à 100 %. Pour ma part, je n'y suis pas favorable. En effet, la garantie de l'État à 100 % sur les prêts bancaires n'est rien d'autre qu'un cadeau fait aux banques, qui n'attendent évidemment que cela pour pouvoir prêter de l'argent à n'importe quelle entreprise sans courir aucun risque – puisque si une entreprise ne parvient pas à rembourser son prêt, la perte en résultant sera à la charge de l'État. Il ne me paraît pas raisonnable pour les comptes publics de prendre à notre charge des pertes aussi importantes – cumulées, elles atteignent plusieurs milliards d'euros – pour des entreprises qui auraient nécessairement été en difficulté. En tout état de cause, il me semble normal de partager les responsabilités et qu'à ce titre, les banques aient à assumer au moins dix points de responsabilité sur les risques de pertes. Par ailleurs, quand on fait une comparaison avec l'Allemagne, il faut la faire jusqu'au bout : je rappelle que le taux d'intérêt des prêts garantis à 100 % par le Bund allemand est à 3 %, contre 0,25 % pour les prêts garantis par la France. Contrairement à ce que l'on entend trop souvent dire, notre dispositif est donc aussi généreux que celui qui s'applique outre-Rhin.
Je répète à Claudia Rouaux, qui a évoqué les risques de fracture sociale et territoriale, que la réduction des inégalités est l'un des grands enjeux du lendemain de la crise sanitaire, et un point auquel nous devrons porter une attention particulière dans le cadre de la relance.
Pour ce qui est de l'accès des entreprises au PGE, évoqué par Patricia Lemoine, je rappelle que toutes les entreprises cotées jusqu'à 5+ par la Banque de France bénéficient automatiquement du prêt. Celles qui sont cotées 5 ou 6 ou qui ont un compte auprès d'une néo-banque et qui, pour l'une de ces raisons, ne trouvent pas de prêt garanti peuvent s'adresser à la médiation du crédit, chargée de leur trouver une solution. Si cela se révèle impossible, en dernière instance, elles peuvent recourir au système d'avance remboursable : c'est alors l'État qui finance les dépenses immédiates qu'elles pourraient être obligées d'engager.
Charles de Courson nous a interrogés au sujet de l'avancement des négociations avec Air France : je ne répondrai pas sur ce point, car il me semble préférable d'attendre pour cela que les discussions aient abouti.
Je veux dire à Éric Coquerel que nous allons tout faire pour préserver l'unité de la zone euro. Au-delà des instruments que j'ai déjà cités, le fonds de relance que la France a proposé est absolument vital. Nous souhaitons que ce fonds soit financé par la levée de dettes communes uniquement pour le futur : les eurobonds qui mettent en commun la dette future et la dette passée ne sont pas accessibles aujourd'hui et il n'y aura pas de compromis possible au niveau européen sur ce type d'obligations. En revanche, j'estime que nous pouvons nous battre pour lever de la dette commune sur des dépenses d'investissement et sur un temps limité. L'intérêt de ce dispositif, c'est qu'il est moins coûteux pour les États que ne le serait de la dépense publique immédiate. Il permet également de mettre en commun des taux d'intérêt négatifs en Allemagne et à 1,87 % en Italie pour les obligations à dix ans, donc de disposer d'argent à plus faible coût et de possibilités d'investissement sur les dépenses nécessaires.
Enfin, pour ce qui est des dividendes, évoqués par Jean-Paul Dufrègne, je rappelle qu'aucune grande entreprise qui en aura versé ne pourra avoir accès aux prêts garantis par l'État ou au report de charges sociales et fiscales. C'est une obligation que j'ai moi-même déjà commencé à faire respecter en refusant de porter ma signature sur les demandes de prêt de certaines grandes entreprises qui avaient versé des dividendes.