Présidence de M. Éric Woerth, Président
La commission entend MM. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, et Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, sur le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2020 (n° 2820) (M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général).
Mes chers collègues, nous recevons MM. Bruno Le Maire, Gérald Darmanin et Olivier Dussopt qui nous présentent le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2020. Le Haut Conseil des finances publiques a adopté hier son avis relatif à ce projet de loi, lequel vous a été communiqué par courriel ce matin. Sans suspens, je voterai ce nouveau projet de loi de finances rectificative. Les chiffres sont impressionnants : 110 milliards d'euros de soutien à l'économie ; 8 % de récession ; 9 % de déficit public ; une dette augmentée de 15 %. C'est un plongeon de nos finances publiques et de notre économie, mais avec un objectif que nous partageons : soutenir l'économie et éviter la faillite de nos entreprises et le chômage.
Si elle ne porte pas sur les chiffres, la vraie question est de savoir comment accompagner la reprise, la réponse dépendant en grande partie de la vitesse à laquelle notre économie va redémarrer. L'effort est à ce point massif qu'il ne pourra être supporté longtemps, ni financièrement ni socialement. Quelle est votre stratégie de reprise économique ? S'annonce-t-elle rapide, comme il semblerait, ou plus lente ? Avez-vous déterminé si des secteurs d'activité devaient reprendre plus vite que d'autres, et dans quelles conditions ? Le Président de la République a annoncé un plan dans le domaine du tourisme. Y a-t-il d'autres plans de soutien à des filières fermées administrativement ? Votre report d'impôts et de charges pour les entreprises n'est-il pas en réalité une annulation ? Enfin, nul ne peut penser que la France redémarre seule. Certains pays, comme l'Autriche ou l'Allemagne, ont déjà commencé à redémarrer : comment coordonner la reprise de notre économie ?
Nous sommes confrontés à une crise sanitaire brutale, dont chacun mesure dans sa vie quotidienne et auprès de ses proches la violence. Nous sommes également confrontés à un bouleversement économique sans équivalent dans l'histoire contemporaine : tous les pays sont touchés ; l'économie réelle est touchée ; et la crise ne s'arrêtera que lorsqu'une réponse au virus sera trouvée. La crise, contrairement à certaines interprétations, n'est pas celle d'une économie en surchauffe, mais au contraire, d'une économie à l'arrêt, dont la date et les modalités de redémarrage sont incertaines.
Cette crise n'est pas une affaire de semaines, ni de mois, mais d'années. L'économie ne se résume pas à la croissance. C'est aussi le travail, la dignité qu'elle apporte ; c'est le financement de notre modèle social, du progrès technologique dont nous avons besoin pour garder notre place parmi les nations qui comptent dans le monde. Parce que l'économie est touchée au coeur, nos civilisations modernes sont touchées au coeur. La stratégie de reprise ne peut s'inscrire que dans la longue durée. Elle commencera progressivement. À la demande du Premier ministre, nous travaillons avec Jean Castex, notamment, pour augmenter le rythme de l'économie française, qui tourne au ralenti. L'industrie, par exemple, tourne à 60 %. Avec une stratégie de déconfinement adaptée, il nous faudra retrouver un rythme plus normal. La clé de la réussite du déconfinement sera la sécurité sanitaire des salariés, sur laquelle nous ne transigerons pas ; elle est la condition pour que la reprise se fasse de manière confiante.
Il faudra également réfléchir à une stratégie de relance, laquelle se fonde, à mon sens, sur quatre piliers. Le premier, c'est l'investissement, qui garantit la qualité de nos produits et des technologies. Le deuxième pilier sera le soutien à la demande, dans la mesure où l'épargne de précaution qui se construit aujourd'hui ne se débloquera pas du jour au lendemain et que les consommateurs auront des comportements attentistes. En troisième lieu, certains secteurs devront faire l'objet d'un soutien spécifique : le tourisme, l'hôtellerie, la restauration, l'industrie automobile, l'industrie aéronautique ou encore le transport aérien. Enfin, la coopération européenne est indispensable. Si nous décidons – ce que je crois sage – de soutenir les salaires les plus modestes, les salaires des personnes non qualifiées qui nous ont permis de mener une vie à peu près normale pendant le confinement, faisons attention à ce que l'Allemagne n'ait pas, quant à elle, une stratégie de modération salariale, au risque de nous retrouver avec le même retard que ces vingt dernières années.
La crise nous fait courir des risques considérables. Le premier est celui qui touche notre tissu productif : faillites en cascade et disparition de pans technologiques importants de notre industrie. Le risque est également de voir certains de nos concurrents, en particulier les géants du numérique, qui disposent de réserves de liquidités considérables se chiffrant à des dizaines de milliards d'euros, accentuer leur domination. Le risque est aussi de voir le taux d'épargne augmenter face aux incertitudes, au détriment du financement de notre économie. Les encours du livret A et du livret de développement durable et solidaire ont augmenté de 50 % entre mars 2019 et mars 2020. Leurs encours bruts ont plus que doublé entre mars 2019 et février 2020, pour passer de 1,5 milliard d'euros à 3,8 milliards d'euros. Or ce n'est pas d'épargne que nous avons besoin, mais d'investissement.
Le risque est encore de voir les grands équilibres mondiaux bouleversés. Pour la deuxième fois de son histoire, la zone euro est confrontée au défi de la solidarité, à une échelle incomparable avec celle de 2010-2011. Soyons clairs : soit la zone euro est unie et elle se renforcera ; soit elle est divisée et elle disparaîtra. Elle ne survivra pas à l'aggravation des différences de développement économique entre ses membres. L'Allemagne est en train de dépenser 4 % de son PIB pour soutenir son économie. L'Italie, pour sa part, en dépense 2 %. Or, au regard de leurs niveaux de développement économique, c'est l'inverse qui serait raisonnable et bon pour la zone euro.
Les différences de rythme de reprise en Asie, aux États-Unis et en Europe pourraient également bouleverser l'ordre des puissances. La Chine en a parfaitement conscience et exploitera toutes nos faiblesses dans ce domaine. Les économies émergentes en Amérique du Sud et sur le continent africain pourraient être confrontées à des problèmes économiques insolubles, sources de graves déstabilisations, accentués par la chute du prix des matières premières, en particulier celui du pétrole. À son point le plus bas, le 30 mars, le prix du baril était à 23 dollars, soit trois fois moins cher qu'en janvier, alors que le pétrole représente 40 % des ressources budgétaires des pays d'Afrique centrale.
Enfin, il y a un risque pour nos démocraties, dans la mesure où je ne vois pas pourquoi les grands mouvements sociaux d'avant la crise, en France et dans le reste du monde, ne reprendraient pas après. S'ils sont gelés pour le moment, leurs causes restent les mêmes. Aussi peuvent-ils reprendre demain avec plus de violence et ajouter à la crise économique une crise politique. C'est pour cela que je considère que la question essentielle au lendemain de la crise sera celle de la lutte contre les inégalités économiques.
Mais cette crise offre aussi des occasions historiques. Elle nous permet, tout d'abord, de repenser notre économie nationale, en accélérant la transition vers une économie durable, en relocalisant certaines productions stratégiques, dans le domaine de la santé ou de l'énergie, dont dépendent notre indépendance, et en valorisant mieux le travail de tous ceux qui nous permettent de nous approvisionner, de nous soigner, de nous nourrir et de nous transporter. En janvier 2020, soit avant la crise, je disais qu'il fallait ouvrir des perspectives aux personnes les moins bien qualifiées et les moins bien rémunérées de notre pays. Je faisais également remarquer que, depuis 2008, la dynamique salariale était forte chez les personnes qualifiées et faible chez celles qui ne l'étaient pas, et que cela posait un problème de rémunération et de dignité par le travail. Aujourd'hui, le sujet est brûlant.
Nous avons, avant la crise, répondu à certains de ces défis, puisque nous avons relocalisé certaines activités, comme les batteries électriques, que nous avons mieux rémunéré les salariés gagnant le SMIC, grâce à la prime d'activité et à la défiscalisation des heures supplémentaires, et que nous avons investi massivement dans la transition écologique et l'économie circulaire. Mais nous devrons aller beaucoup plus vite et beaucoup plus loin au lendemain de la crise.
La crise nous offre aussi l'occasion de redonner du sens à la construction européenne. Des réponses ont été apportées, depuis le début de la crise, notamment par la Banque centrale européenne. Les vingt-sept ministres des finances ont obtenu la semaine dernière un dispositif de soutien immédiat de 540 milliards d'euros, par le biais de la Banque européenne d'investissement, du Mécanisme européen de stabilité et de la procédure de financement du chômage partiel, qui est la preuve que l'Europe est capable de décider vite et fort. Nous avons également mis sur pied, à la demande de la France, un fonds de relance pour lequel nous demandons qu'il soit financé par la mise en commun de la dette future, pour une durée limitée, sur des investissements liés à la crise. Cela nous paraît une proposition raisonnable et crédible qui doit pouvoir convaincre nos partenaires européens. Il est essentiel que nous puissions investir vite, sans quoi nous verrons s'accroître les écarts par rapport à la Chine ou aux États-Unis, et l'Europe perdra la possibilité d'être un continent véritablement souverain au XXIe siècle.
Enfin, c'est l'occasion de refonder un ordre multilatéral plus efficace et plus juste, notamment pour soutenir les pays en développement. Nous avons demandé que le FMI procède à une allocation de 500 milliards de dollars de droits de tirage spéciaux pour soulager immédiatement les États les plus fragiles. Nous continuerons à défendre cette idée. Le G20 à venir permettra de confirmer, pour la première fois, un accord entre tous les créanciers du G20 et du Club de Paris, la Chine, l'Inde et les pays du Golfe pour engager un moratoire sur la dette des pays les plus pauvres. Voilà bien la preuve que nous pouvons relancer le multilatéralisme, auquel nous sommes attachés.
C'est dans un tel contexte que nous vous présentons le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2020. L'estimation de la baisse de croissance pour 2020 a été révisée à 8 %, un chiffre aussi provisoire qu'il est sévère, puisque son évolution dépend de la situation économique internationale et des risques de reprise de la pandémie. Il est donc à prendre avec toutes les précautions d'usage, sinon plus. Nous retrouvons dans le projet de loi de finances rectificative les choix simples, massifs et immédiats que nous avons proposés dès le début du mois de mars, pour répondre à la crise.
Le premier est celui de la préservation des compétences et des savoir-faire de nos salariés. Nous investissons massivement dans le chômage partiel, où se trouvent, à l'heure actuelle, 8,7 millions de salariés, qui bénéficient d'une indemnisation à 100 % au niveau du SMIC et à 84 % jusqu'à 4,5 SMIC, ce qui représente 24 milliards d'euros. C'est un investissement dans les compétences des salariés français, qui nous permettra de repartir plus vite à la sortie de la crise.
Le deuxième choix stratégique est le soutien à la trésorerie des entreprises, notamment grâce à la création d'une garantie exceptionnelle de l'État, à hauteur de 300 milliards d'euros pour tous les nouveaux prêts dont les entreprises auraient besoin. À cette date, 200 000 entreprises ont obtenu des prêts par ce biais, pour un montant total de 10 milliards d'euros.
Le troisième choix, c'est le soutien aux plus petites entreprises, aux TPE de moins de dix salariés. C'est le sens du fonds de solidarité qui a été créé dès le 31 mars et qui s'adresse à toutes les entreprises de moins de dix salariés et dont le chiffre d'affaires est inférieur à un million d'euros. Aujourd'hui, 900 000 entreprises y ont fait appel. Nous avons écouté les parlementaires, pour modifier les règles d'éligibilité, en abaissant de 70 à 50 % la perte du chiffre d'affaires entre 2019 et 2020.
Le quatrième choix, c'est la protection de nos entreprises les plus stratégiques, qui ont perdu de la valeur sur les marchés et pourraient être rachetées à vil prix, par des puissances étrangères ou par des fonds étrangers.
Si ces dispositifs fonctionnent, comme en témoignent les chiffres dont je viens de vous faire part, ils doivent aussi être améliorés. Les parlementaires m'ont fait remonter des propositions, qui nous ont conduits, avec Gérald Darmanin, à les modifier dans le nouveau projet de loi de finances rectificative, pour les rendre beaucoup plus efficaces et beaucoup plus larges d'accès.
Ainsi, le fonds de solidarité fait l'objet d'améliorations attendues par tous les entrepreneurs. Nous proposons de modifier la base de calcul de la perte du chiffre d'affaires. En mars 2019, du fait de la crise des gilets jaunes, les chiffres d'affaires étaient faibles, ce qui ne faisait pas du mois de mars une bonne référence. C'est pourquoi nous proposons de prendre comme référence la moyenne mensuelle du chiffre d'affaires des entreprises en 2019, ce qui permettra également de prendre en considération des entreprises créées il y a moins d'un an. En deuxième lieu, nous vous proposons d'élargir ce fonds aux entrepreneurs qui n'y étaient pas éligibles : les agriculteurs, membres d'un groupement agricole d'exploitation en commun, les artistes-auteurs, les entreprises en situation difficile, celles qui sont en redressement judiciaire ou en procédure de sauvegarde. Enfin, nous avons également décidé d'augmenter le plafond de l'enveloppe complémentaire dont peuvent disposer les entreprises au cas par cas ; cette enveloppe passera de 2 000 euros à 5 000 euros. Au total, ce fonds de solidarité, si vous adoptez ce texte de loi de finances rectificative, passera de un à sept milliards d'euros ; je tiens à remercier les régions pour leur contribution à hauteur de 500 millions d'euros, mais aussi les assureurs et certaines grandes entreprises pour leur participation.
Nous renforçons ensuite le dispositif de soutien aux entreprises stratégiques, par l'abondement du compte d'affectation spéciale Participations financières de l'État, que nous vous proposons de doter de 20 milliards d'euros.
S'agissant des prêts garantis par l'État, nous vous proposons que les entreprises entrées en procédure collective depuis le début de l'année puissent aussi être éligibles à ce dispositif, alors qu'elles ne le sont pas aujourd'hui.
Enfin, nous voulons apporter un soutien supplémentaire aux grandes PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI) de notre pays. Nous proposons donc un premier dispositif destiné aux entreprises de taille intermédiaire, jusqu'à cinq cents salariés, appuyé sur le renforcement du fonds de développement économique et social (FDES), porté de 75 millions d'euros à un milliard d'euros. Ce fonds aura vocation à financer des prêts directs et non plus des garanties, en contrepartie d'une restructuration de l'entreprise et de financements complémentaires.
Un second dispositif, que nous vous soumettrons par voie d'amendement, vise les entreprises de cinquante à deux cent cinquante salariés et instaure une enveloppe d'avances remboursables à hauteur de 500 millions d'euros. Ainsi, une entreprise de décolletage dans la vallée de l'Arve pourra-t-elle acheter immédiatement l'acier et l'aluminium dont elle a besoin pour pouvoir redémarrer, en payant ses fournisseurs, alors même qu'elle n'a pas de trésorerie. C'est une nouvelle illustration du choix que nous avons fait de protéger massivement le tissu productif français.
Comme l'a indiqué le Premier ministre, toutes ces mesures complémentaires vont faire passer le montant total du plan de soutien à notre économie en trésorerie et en dépense publique de 45 à 110 milliards d'euros. Cela portera le niveau d'endettement de la France à 115 % mais, en temps de crise, il faut faire des choix clairs : entre la dette et les faillites d'entreprise, nous avons fait le choix de la dette. Ce n'est pas un choix durable, et nous savons parfaitement qu'il faudra rétablir les finances publiques sur le long terme, mais c'est le seul choix responsable, qui permettra de retrouver un tissu productif en bon état de marche au lendemain de la crise et d'éviter des faillites en cascade, qui ne manqueraient pas de déboucher sur une crise sociale, en plus de la crise économique que nous vivons actuellement.
Grâce à ce nouveau PLFR, nous rechargeons en quelque sorte le premier PLFR. Les crédits destinés au chômage partiel sont portés à 24 milliards d'euros, qui seront financés par l'État et par l'Unédic. L'aide aux indépendants est portée à 7 milliards d'euros, soit une aide pouvant aller jusqu'à 8 000 euros défiscalisés par bénéficiaire.
Nous avons également revu le budget annexe Contrôle et exploitation aériens afin que les compagnies aériennes puissent surseoir au paiement de leurs taxes et charges pour les deux prochaines années. De même, les autres reports de charges sont maintenus.
Des mesures nouvelles vous sont également proposées : c'est le cas des 20 milliards d'euros alloués au compte d'affectation spéciale Participations financières de l'État et des crédits du FDES, qui passent de 75 millions à un milliard d'euros.
Ce PLFR intègre également, 2,5 milliards d'euros, que l'on pourrait appeler des crédits imprévisibles ou accidentels. C'est une pratique qui a cours dans les collectivités locales, et le Conseil d'État a, en l'espèce, considéré que, dans la mesure où ces crédits correspondaient réellement à des mesures exceptionnelles ou à des dépenses imprévisibles – dont il sera évidemment rendu compte au Parlement – ils étaient autorisés.
Une bonne part de ces crédits devrait d'ores et déjà être affectée, par voie d'amendement, à la prime de précarité annoncée ce matin par le Premier ministre, ce qui laissera un peu plus de 1,5 milliard d'euros à la disposition du Gouvernement pour répondre aux dépenses accidentelles et imprévisibles, sans qu'il soit nécessaire d'avoir recours à des décrets d'avance ou de convoquer de nouveau le Parlement.
Nous avons enfin prévu la défiscalisation et la désocialisation d'une prime exceptionnelle dans les trois fonctions publiques, ainsi que des dispositifs à destination du Pacifique, notamment le prêt de l'AFD pour un montant de 240 millions d'euros à la Nouvelle-Calédonie. Pour ce qui concerne la Polynésie française, elle est en discussion avec le Gouvernement pour bénéficier de mesures spécifiques.
D'autres éléments, qui ne figurent pas dans ce PLFR, sont tout aussi intéressants. Je pense en particulier aux 8 milliards d'euros destinés au budget de la santé, ainsi que l'avait annoncé le Président de la République à Mulhouse. Ces crédits relevant de l'ONDAM, ils ne nécessitent pas, pour être mis en oeuvre, l'adoption d'une loi.
En ce qui concerne, les collectivités locales, nous sommes en train de travailler avec Jacqueline Gourault et Sébastien Lecornu sur les solutions propres à compenser la diminution des recettes découlant des droits de mutation à titre onéreux, des impôts dits économiques ou de l'octroi de mer ultramarin. La perception de ces recettes étant décalée dans le temps, nous avons un peu de temps devant nous, tout comme pour les recettes afférentes aux transports ou aux déchets, relevant des budgets annexes.
J'insiste sur le fait que ces mesures constituent un plan d'urgence et non un plan de relance, ce qui explique l'absence de dispositions de relance en tant que telles. On a déjà cité les chiffres, qui font froid dans le dos : des dépenses publiques qui atteignent 61 % du PIB ; 43 milliards d'euros de recettes en moins – ce montant n'étant qu'une estimation ; 9 % de déficit, soit 183,5 milliards d'euros, c'est-à-dire le double de ce qui était prévu en loi de finances initiale ; quant à la dette publique, elle atteint désormais 115 % du PIB.
Pour ce qui concerne la stratégie fiscale et sociale du Gouvernement, le Président de la République a annoncé des annulations de charges pour les secteurs de l'hôtellerie, de la restauration, de l'hébergement, de l'événementiel et des arts et spectacles, qui sont – à l'exception de l'hôtellerie – les secteurs qui ont été fermés en premier et seront sans doute rouverts en dernier. Ces annulations sont pour l'instant évaluées à 750 millions d'euros. Elles ne concernent pas uniquement les entreprises qui ont demandé le report – ce qui serait assez injuste – mais l'ensemble des entreprises de ces secteurs. Il s'agit de mesures sectorielles sans précédent dans notre histoire budgétaire, non seulement par leur ampleur mais également par leur nature, puisqu'elles sont normalement interdites et nécessiteront donc des modifications législatives, que je vous proposerai dans les prochains jours. Par ailleurs, nous travaillons avec les ministres concernés sur les mécanismes de soutien complémentaires envisageables pour les secteurs du tourisme et de l'événementiel.
En ce qui concerne les impôts, seules la taxe sur les salaires et l'impôt sur les sociétés sont reportés, et il n'y a donc pas d'annulation de fiscalité, laquelle serait contraire au droit européen selon lequel une telle annulation sectorielle serait assimilable à une aide d'État. Sans doute notre stratégie fiscale globale devra-t-elle être rediscutée au lendemain de la crise, mais nous nous concentrons pour l'instant sur la part patronale des prélèvements obligatoires, les salariés qui reprendront leur travail demain étant, bien entendu, de nouveau assujettis aux cotisations qui financent leur protection sociale.
En ce qui concerne la fonction publique, les primes aux agents publics n'apparaissent pas dans les crédits ouverts au sein du PLFR puisque nous considérons que les primes allouées aux fonctionnaires d'État sont finançables en gestion. En d'autres termes, c'est le schéma de fin de gestion qui nous permettra d'ajuster les crédits correspondant à la masse salariale, de manière que les ministères puissent payer l'ensemble des traitements jusqu'à la fin de l'année.
Pour traduire notre reconnaissance vis-à-vis des agents publics, nous avons mis en place un dispositif propre pour chacun des trois versants de la fonction publique – je précise qu'il s'applique aux titulaires comme aux contractuels. Dans la fonction publique hospitalière, les heures supplémentaires qui, d'ordinaire, sont le plus souvent placées sur un compte épargne-temps (CET) ou récupérées, seront payées et majorées de 50 %. Ce paiement s'accompagnera en outre du versement d'une prime forfaitaire défiscalisée et désocialisée de 1 500 euros, dans les départements les plus exposés ainsi que dans les établissements ayant accueilli des malades du Covid-19 sur le reste du territoire. Dans les départements ou les établissements qui n'ont pas été confrontés au virus, la prime s'élèvera à 500 euros. Pour ce qui concerne les EHPAD, la réflexion est encore en cours, car la multiplicité des employeurs et des statuts nous oblige à quelques travaux complémentaires. L'ensemble de ces dépenses seront comptabilisées comme des dépenses sociales.
Pour la fonction publique d'État, il s'agit, là encore, de reconnaître le surcroît de travail des agents publics de l'État, et de les en remercier avec une prime, défiscalisée et désocialisée, d'un montant maximum de 1 000 euros, dont les ministères pourront verser tout ou partie en fonction de l'engagement et de la durée de l'engagement de chaque agent pendant la période de confinement. Évidemment, les agents en autorisation spéciale d'absence ne peuvent y être éligibles.
Dans la fonction publique territoriale enfin, les collectivités pourront, dans le cadre du principe de libre administration, décider ou non de l'attribution de cette prime aux agents, en choisissant elles-mêmes les agents qui en bénéficient, dans la limite de 1 000 euros.
Le second point ayant un impact sur les finances publiques est la question des congés. Une ordonnance a été prise ce matin qui, dans un mouvement de convergence avec le secteur privé, permet aux employeurs publics de décompter cinq jours de RTT aux agents en autorisation spéciale d'absence, pour la période passée du 16 mars au 16 avril, et d'imposer cinq jours de congés ou de RTT pour la période à venir, jusqu'à la fin du confinement. Pour les agents en télétravail, les employeurs pourront également imposer cinq jours de congés ou de RTT pour la période à venir, mais sans mesure rétroactive. Les collectivités pourront faire de même, si elles le souhaitent. À cela s'ajoute tout un train de mesures plus techniques concernant des basculements de reliquats de congés en CET. Je tiens à rappeler enfin ici que, contrairement aux salariés du privé, les agents publics en autorisation spéciale d'absence conservent l'intégralité de leur traitement.
Nous n'en sommes plus à prévoir la croissance mais la récession, et vous nous avez dit, monsieur le ministre de l'économie, qu'il faudrait plusieurs années pour reconquérir le territoire perdu. Mais ce qui nous intéresse dans l'immédiat, c'est de savoir qui, parmi les acteurs économiques, sera déconfiné le 11 mai, et comment, puisque beaucoup d'entreprises ne sont pas administrativement fermées mais qu'elles sont dans l'incapacité de travailler. Quelles sont vos pistes pour rétablir l'activité, sachant que nous ne corrigerons pas les chiffres effrayants de ce PLFR sans une reprise de cette activité ?
Par ailleurs, nous vous avions demandé que, chaque semaine, vos services fassent parvenir à la commission des finances un document de suivi du premier PLFR – notamment sur la garantie des crédits et le fonds de solidarité –, qui détaille l'application des mesures que nous avons votées, par département.
Afin de tuer moi aussi tout suspense, j'annonce que je voterai ce PLFR. Cela étant, tout en considérant légitimes vos préoccupations concernant la relance et la reprise de notre économie, je resterai, pour ma part, très court-termiste dans l'examen de ce texte. La priorité en effet est de savoir si nous sommes capables de maintenir nos entreprises à flot jusqu'au 11 mai, puis dans les jours et les semaines qui vont suivre.
En effet, nous savons que la reprise du travail ne se fera pas en un jour et qu'il convient donc, tout d'abord, de se concentrer sur ce que le ministre du budget appelle la recharge budgétaire du premier projet de loi de finances rectificative, grâce à ce que je qualifierai de PLFR bis, puisque nous sommes dans la continuité de ce que nous avons voté il y a un mois.
Pourriez-vous être plus précis sur l'utilisation concrète qui pourrait être faite de certains crédits prévus par ce texte ? 2,5 milliards d'euros de crédits sont ainsi non répartis : ces crédits pour dépenses accidentelles sont en effet une chose originale, pour ne pas dire exceptionnelle, dont nous comprenons bien qu'elle est imposée par le contexte. Ils pourraient servir notamment à financer la prime pour les ménages les plus modestes, mais pourriez-vous nous en dire plus ? De même, pourriez-vous préciser davantage ce que vont financer les 8 milliards de crédits exceptionnels affectés au système de santé ? Enfin, pouvons-nous avoir des indications sur la manière dont vont être ciblés les 20 milliards d'euros destinés aux prises de participations de l'État, ainsi que l'augmentation très significative du fonds de développement économique et social, même s'il ne s'agit pour l'heure que de financements ou d'aides à la trésorerie potentiels ?
Le soutien financier à notre économie a plus que doublé par rapport au premier PLFR examiné le mois dernier, et il serait intéressant que vous nous précisiez le niveau de consommation des deux programmes qu'il créait. Le montant du plan global intègre les mesures de trésorerie dont peuvent bénéficier les entreprises, et je souhaiterais savoir quel est le montant de charges fiscales et sociales ayant effectivement fait l'objet d'un report en mars et avril, et ce que cela représente en pourcentage du total des charges en principe dues sur cette période.
Vous avez mentionné les annulations de charges, à hauteur de 750 millions d'euros, pour les secteurs de la restauration, de l'hôtellerie, du tourisme, de l'événementiel et de la culture. Pouvez-vous nous confirmer qu'elles n'ont pas vocation à être intégrées, même en partie, dans ce PLFR ?
S'agissant du fonds de solidarité, pouvez-vous nous éclairer sur le niveau des contributions attendues et effectives des régions et des assureurs ? Qu'en est-il des autres contributeurs ? Vous avez mentionné des grandes entreprises : pouvez-vous nous donner leur identité et les montants de leurs contributions ?
Au sujet de la garantie de l'État pour les prêts de trésorerie aux entreprises, pouvez-vous nous préciser à quelles entreprises en difficulté son octroi serait désormais ouvert, par catégorie de défaillance – ce qu'on appelle en droit des entreprises les procédures collectives, de la procédure de sauvegarde, en passant par le redressement judiciaire, jusqu'à la liquidation judiciaire ? J'aimerais également savoir à compter de quelle date de constat de cessation de paiement les dossiers pourront être acceptés.
Outre la neutralisation fiscale et sociale des aides versées par le fonds de solidarité, le texte prévoit d'exonérer les primes destinées aux agents publics. Pouvez-vous nous repréciser les principales caractéristiques de cette prime et nous préciser le nombre de départements qui seraient concernés par la prime de 1 500 euros ?
Par ailleurs, envisagez-vous des mesures en faveur de l'action sociale – je pense notamment à l'aide sociale à l'enfance : les agents de ce secteur pourront-ils également bénéficier d'une prime exonérée de charges fiscales et sociales ?
Eu égard à la forte secousse subie par le secteur du transport aérien, pouvez-vous nous dire quelles sont les mesures supplémentaires envisagées par le Gouvernement pour le soutenir, au-delà du budget annexe mentionné par le ministre de l'action et des comptes publics ? Au-delà des aides de trésorerie, des prises de participation sont-elles prévues et, le cas échéant, sont-elles déjà intégrées dans les vingt milliards d'euros apportés au compte d'affectation spéciale Participations financières de l'État ?
Enfin, chacun se réjouit des accords budgétaires obtenus au niveau européen, et je tiens ici à saluer l'action du ministre de l'économie et des finances en ce sens. Je partage en tout point les propos que vous avez tenus sur l'enjeu historique que revêtent ces dernières semaines pour l'Union européenne et la zone euro. S'agissant de cet accord, cent milliards d'euros ont été fléchés pour le financement de l'activité partielle par la Commission européenne. Pouvez-vous nous préciser si une part de cette enveloppe est destinée à la France et, si c'est le cas, comment cette somme viendra-t-elle compléter l'effort national déjà fourni en la matière ?
Toujours sur le plan européen, pouvez-vous nous préciser les causes et les conséquences du relèvement du prélèvement sur les recettes en faveur de l'Union européenne, prévu par ce présent texte à hauteur de presque deux milliards d'euros ?
Je voudrais commencer par rendre hommage, au nom de l'ensemble de mon groupe et, je pense, de l'ensemble des parlementaires et des ministres présents, à Bernard Stalter, qui était président du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat (CMA France). Il alliait humanité, compétence et convivialité, et je crois que, s'il était encore parmi nous, il nous suivrait dans cette session de la commission des finances. J'adresse aussi des sympathies attristées à sa famille, et en particulier à son épouse.
Pour compléter les propos de notre rapporteur général, j'aimerais avoir des informations quant à la répartition précise sur le sol français des 540 milliards d'euros issus de fonds européens – et aux différentes actions qui vont être menées grâce à eux sur notre territoire –, de même pour les 100 milliards prévus par le plan gouvernemental.
J'aimerais également revenir sur les entreprises les plus fragiles. Dans son allocution, le Président de la République a évoqué les plus fragiles d'entre nous, qu'il s'agisse des personnes ou des entreprises. Un certain nombre de très petites entreprises (TPE), commerçants et artisans sans salariés, ne vont pas forcément bénéficier du prêt garanti par l'État (PGE), du fait des jurisprudences bancaires qui ont cours – et même si nous y travaillons, notamment avec Nadia Hai, Anne-Laure Cattelot et Marie-Christine Verdier-Jouclas –, soit parce qu'elles se trouvent dans un secteur d'activité pré-exclu par certaines banques, soit parce qu'elles ont un très petit chiffre d'affaires. Il y a en la matière des disparités entre départements et il faut que nous prenions des mesures fortes à ce sujet.
De même, le fonds de solidarité risque de ne pas concerner les entreprises qui n'ont pas de salariés ; celles-ci toucheront uniquement la première partie de l'aide, et rien d'autre, et se trouveront en grande difficulté.
Vous nous présentez un deuxième PLFR. Le premier était bâti sur une durée de confinement d'un mois et un retour à la normale rapide. Celui-ci est également établi sur la base d'un retour rapide à l'économie antérieure et d'un surcroît de croissance aux trimestres suivants. Pensez-vous que cette situation est envisageable pour les semaines qui viennent, ou prévoyez-vous de nous présenter un autre PLFR d'ici à un mois, et encore d'autres par la suite ? N'aurait-il pas été plus judicieux de présenter directement un PLFR qui aille encore plus loin pour soutenir d'un seul coup notre économie, comme l'ont fait les Allemands ?
Les mesures qui sont prises doivent être immédiatement opérationnelles ; elles doivent pouvoir être mises en oeuvre facilement et rapidement. Or il y a eu du flou sur l'application des dispositifs du premier PLFR ; envisagez-vous de prendre en compte cette réalité et de les simplifier ?
La garantie de l'État aux prêts accordés par les banques – le PGE – est à ce jour de 90 %, mais un certain nombre de voix se font entendre pour qu'elle soit portée à 100 %, à l'instar de ce qui a été fait en Allemagne ; êtes-vous prêts à accepter cette évolution ?
Enfin, les critères d'éligibilité au fonds de solidarité sont actuellement trop restrictifs. Il y a des trous dans la raquette – en particulier le cas des mandataires sociaux, celui des entreprises en difficulté et la situation des professions libérales. Envisagez-vous de revoir drastiquement ces critères d'éligibilité ?
Permettez-moi tout d'abord de saluer, au nom du groupe Mouvement démocrate et apparentés, l'action du Gouvernement en général et votre engagement et celui de vos ministères en particulier. La crise actuelle est exceptionnelle et imprévisible ; elle appelle la mobilisation et le soutien sans faille de toute la nation pour sauver des vies mais aussi des emplois. Je salue toutes celles et tous ceux qui ont toujours contribué à l'économie de notre pays, et qui luttent dans certains cas pour leur survie – je pense notamment aux TPE, aux commerçants, aux artisans et aux professions libérales.
On ne peut raisonnablement pas ignorer les réponses fortes apportées dans ce deuxième PLFR, qui selon moi sont à la hauteur de l'enjeu. Je ne peux que saluer l'engagement de l'ensemble des parties prenantes, qui ont su réagir avec rapidité et efficacité par la mise en place d'un plan d'aide massif, que ce soit le fonds de solidarité, le PGE ou le chômage partiel. Au-delà de l'aspect strictement financier, c'est un message fort envoyé non seulement aux entreprises de notre pays, mais aussi à l'ensemble de nos concitoyens. La situation est grave, voire dramatique pour certains, et il convient d'apporter des solutions d'exception et adaptées. Lundi, le Président de la République a réaffirmé publiquement l'impérieuse nécessité de continuer à soutenir massivement notre économie, en allant encore plus loin pour ne laisser personne au bord du chemin. Parmi les mesures de ce deuxième PLFR, je tiens à saluer celles prises en faveur des entreprises fragiles ou en difficulté, avec notamment l'intervention du fonds de développement économique et social (FDES) et la prise en compte des entreprises en sauvegarde ; encore faut-il préciser ces points-là.
Concernant le PGE, les banques de dépôt étant des entreprises comme d'autres, je crains que certaines d'entre elles soient réticentes à prendre un risque, même si celui-ci n'est que de 10 %. Je rejoins ici ma collègue Véronique Louwagie : monsieur le ministre, ne pensez-vous pas que, pour suivre le cap tracé par le Président de la République, l'État doive garantir 100 % des prêts accordés aux entreprises délaissées par le réseau bancaire ?
La France est confrontée à une crise sanitaire inédite, liée à l'épidémie du Covid-19, d'une gravité exceptionnelle en temps de paix pour notre société, notre économie et nos finances publiques. Ce projet de loi de finances rectificative pour 2020 présente un rapport sur l'évolution de la situation économique et budgétaire qui permet d'en prendre la pleine mesure. Des incertitudes demeurent sur la situation sanitaire, le déconfinement, les répercussions socio-économiques et le contexte international. Les hypothèses macroéconomiques prévoient une récession en 2020 : le recul du PIB serait de 8 % et ce serait donc la quatrième fois que la France entrerait en récession depuis 1950. Ce scénario entraîne une dégradation des finances publiques, un déficit public à 9 % et une dette publique à 115 % du PIB. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles : la consolidation des moyens instaurés par la première loi de finances rectificative était indispensable et nécessaire. Cependant, il faudrait faire davantage pour limiter les conséquences économiques et sociales de la crise.
En matière économique, il existe des insuffisances : des entreprises fragilisées ne remplissent pas les critères pour bénéficier du fonds de solidarité et sont confrontées à des problèmes bancaires ; des commerces de proximité peuvent certes bénéficier du report des charges, mais cela s'avère insuffisant car les trésoreries ne suivent pas. Aussi une annulation des charges est-elle envisagée pour certains secteurs d'activité.
En matière d'état d'urgence sociale, il ne faut pas sous-estimer l'accroissement des inégalités et des fractures sociales et territoriales. Le Président de la République a certes annoncé une aide d'un milliard d'euros pour les familles les plus modestes, mais celle-ci ne figure pas dans ce texte. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur cette mesure de justice sociale, ainsi que sur les primes octroyées aux fonctionnaires en reconnaissance de leur mobilisation exemplaire face à cette crise majeure ?
Enfin, notre groupe déposera des amendements visant à aider les ménages modestes et les étudiants précaires, mais aussi à soutenir des secteurs économiques, des acteurs associatifs et le monde de la culture.
Notre groupe tient d'abord à saluer les mesures d'urgence prises par le Gouvernement pour soutenir massivement nos entreprises et protéger leurs salariés. Ce deuxième PLFR, en portant l'effort de 45 à 110 milliards d'euros, permet de combler de nombreux trous dans la raquette, concernant notamment les plus fragiles de nos entreprises.
Des difficultés nous sont remontées par le terrain : de trop nombreuses entreprises se voient encore aujourd'hui refuser l'accès au PGE. Ce sont bien évidemment les plus fragiles, et ce n'est pas acceptable au regard de la garantie qui est apportée par l'État. Il nous paraît nécessaire que l'État puisse continuer à mettre la pression sur le secteur bancaire pour que l'ensemble des acteurs jouent le jeu. Il serait d'ailleurs intéressant de disposer de chiffres quant à ces refus.
Par ailleurs, des difficultés se font jour pour les entreprises ayant comme unique courtier des néo-banques qui, ne disposant pas de l'agrément d'établissement de crédit, ne peuvent octroyer de crédit à leurs clients. Les entreprises concernées doivent-elles se tourner vers la Banque publique d'investissement (Bpifrance), ou bien actionner le nouveau système d'avance remboursable proposé par l'État avec l'enveloppe dédiée de 500 millions d'euros ?
Le scénario du Gouvernement mise sur un retour assez rapide à la normale, avec une consommation qui rebondirait au second semestre. Ne craignez-vous pas que, dans ce contexte si particulier – vous l'avez dit, monsieur le ministre de l'économie et des finances, le taux d'épargne est actuellement très important –, nombre d'entreprises et de consommateurs limitent leurs dépenses et adoptent, comme c'est le cas depuis plusieurs années, un réflexe d'épargne de précaution ? Dans ces conditions, comment soutenir un plan de relance actif de notre économie ?
Enfin, et comme le souligne le Haut conseil des finances publiques, ce PLFR 2 ne procède pas à une programmation de l'ensemble des recettes et des dépenses des administrations publiques ; pouvez-vous nous en donner les raisons ?
5 à 10 % des entreprises sont écartées du PGE du fait de leur cotation insuffisante par la Banque de France – ce sont toutes celles cotées 5+ et au-delà. Le Gouvernement, monsieur Le Maire, serait-il prêt à accroître le taux de garantie de 90 à 95 ou 96 % pour sauver ces entreprises fragiles ?
Dans le cadre de la crise sanitaire, le Gouvernement propose d'inscrire vingt milliards d'euros au titre d'un programme nouveau, intitulé Renforcement exceptionnel des participations financières de l'État dans le cadre de la crise sanitaire. Pourquoi créer un programme nouveau, alors que des chapitres tout à fait suffisants figurent déjà dans la loi ? Et où en êtes-vous des négociations avec Air France, Airbus, Aéroports de Paris (ADP) et d'autres entreprises publiques ?
Enfin, monsieur Darmanin, le Gouvernement propose d'inscrire 2,5 milliards d'euros en dépenses accidentelles. Celles-ci ne correspondent pourtant pas tout à fait aux dépenses accidentelles et imprévisibles évoquées dans l'article 11 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Pourquoi n'avez-vous pas créé directement un programme pour mettre en place un dispositif d'aide à nos concitoyens les plus modestes, sous la forme d'une prime de précarité et à hauteur d'un milliard d'euros ? C'est la même chose pour les plans sectoriels d'exonération de charges sociales et patronales, à hauteur de 750 millions d'euros pour les secteurs de l'hôtellerie, de la restauration, de l'événementiel et de la culture.
Plus de cent milliards d'euros ont été injectés dans l'économie ; cela correspond à peu près au plan prévu dans l'Avenir en commun, le programme de la France insoumise en 2017, pour la transition énergétique, les services publics et la santé. Plutôt que de moquer notre programme et Jean-Luc Mélenchon qui le portait, ce qu'ont fait à l'époque les partisans de la pensée unique, on aurait peut-être dû gagner du temps en investissant pour mieux préparer le pays à une telle épidémie.
J'observe qu'il n'y a pas de recettes fiscales dans ce PLFR et qu'une fois de plus, vous ne mettez pas à contribution les revenus du capital – je pense à la remise en oeuvre au moins provisoire d'un impôt sur la fortune (ISF).
Monsieur Le Maire, vous avez dit que la zone euro ne survivrait pas à un développement économique différencié. Je voudrais donc savoir comment vous allez préparer la France à la fin de la zone euro, puisque vous-même avez évoqué la différence entre l'Allemagne et l'Italie pour ce qui est du pourcentage de PIB consacré à la relance économique. Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on va vers un développement différencié et même vers une guerre économique. L'Allemagne s'y prépare et c'est à mon avis la raison pour laquelle elle a chichement accordé un fonds de garantie européen de 540 milliards d'euros tout en attribuant 640 milliards de garantie à ses seules entreprises. La solution serait que la Banque centrale européenne (BCE) rachète directement les dettes des États pour les annuler, au moins en ce qui concerne les dépenses provoquées par le coronavirus, un peu à la manière de ce que font les Américains.
Enfin, monsieur Le Maire, vous avez parlé de relocalisations ; c'est un mot que j'aime bien entendre, surtout dans ce contexte où l'on observe que nous souffrons d'un problème de souveraineté sanitaire. Je vous ai écrit il y a quelques mois à propos de l'entreprise Péters Surgical qui produit des pompes indispensables pour faire fonctionner les respirateurs. Elle ferme en juin, alors qu'elle produit aujourd'hui quatre fois plus que d'habitude pour fournir les hôpitaux. Si l'épidémie avait commencé en juillet, nous n'aurions pas disposé de ce matériel. Allez-vous nationaliser cette entreprise afin que, dans ce domaine, nous soyons souverains ?
Dans la situation que nous vivons, il faut en effet mobiliser tous les moyens disponibles. Travaillez-vous sur des hypothèses pour mobiliser les gros patrimoines et les gros revenus ? Cela me semble indispensable.
Les entreprises créées après le 1er février 2020 sont toujours exclues du fonds de solidarité ; c'est un trou qu'il faut combler.
Monsieur Le Maire, vous avez évoqué les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC). Vous vouliez dire, je suppose, que la transparence s'appliquera et qu'il y aura autant de droits que d'associés. Pouvez-vous le confirmer ?
Il faut que les nombreuses entreprises artisanales qui n'ont pas de salariés et qui souffrent actuellement puissent également être éligibles au fonds de solidarité.
Vous aviez par ailleurs annoncé que les grands groupes versant des dividendes ne pourraient pas bénéficier d'aides publiques. Comment comptez-vous traduire ce voeu en une future mesure, et êtes-vous prêt à le faire ?
Pour ce qui est du retour d'expérience, je propose que nous fournissions chaque semaine à la commission des finances un tableau de bord des différentes mesures de soutien aux entreprises.
Laurent Saint-Martin m'a interrogé au sujet des 20 milliards d'euros de prises de participations de l'État. Ces fonds sont destinés aux entreprises vulnérables et prioritaires cotées et leur seront fournis sous forme d'apports en capital, de prises de participation ou éventuellement de nationalisations, ces dernières devant être temporaires car l'État n'a pas vocation à diriger l'économie mais simplement à protéger les industries sensibles.
Les entreprises en difficulté sont éligibles aux prêts garantis par l'État, ce qui constituera l'une des modifications importantes de ce texte de loi : ainsi, toutes les entreprises soumises à une procédure collective depuis le 1er janvier 2020 peuvent accéder au dispositif – en revanche, cela n'aurait pas de sens d'en faire bénéficier celles qui sont en liquidation judiciaire.
Sur l'accord européen, ce sont 240 milliards d'euros qui vont être débloqués au titre du Mécanisme européen de stabilité, qui peut être mis en oeuvre dès lors que les spreads de taux d'intérêt entre la France et ses partenaires européens s'accroissent, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui : il n'y a donc pas de raison pour la France de recourir au MES, qui constitue cependant un filet de sécurité pouvant être utilisé à tout moment, personne ne sachant de quoi l'avenir sera fait.
Pour ce qui est des 100 milliards d'euros destinés au financement du chômage partiel, une partie de cette somme est effectivement destinée à la France, et il en est de même des prêts de la Banque européenne d'investissement : dans les semaines à venir, les entreprises françaises vont donc pouvoir disposer de 30 à 40 milliards d'euros de prêts à des taux particulièrement favorables, par l'intermédiaire de leurs agences bancaires et des guichets de la Banque publique d'investissement.
Je m'associe à l'hommage rendu par Joël Giraud à Bernard Stalter, président du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat. Celui qui était un ami personnel et un homme fondamentalement bon a beaucoup fait pour l'artisanat. Sa disparition a constitué un choc immense pour tous ceux qui l'ont connu.
En ce qui concerne le fonds de solidarité, j'insiste sur le fait qu'il me paraît plus raisonnable que le deuxième étage de ce dispositif, qui vient d'être porté à 5 000 euros, reste réservé aux entrepreneurs employant un ou plusieurs salariés et se trouvant confrontés aux difficultés les plus importantes. Si nous laissions les entrepreneurs sans salariés avoir accès à ce deuxième étage, nous prendrions le risque qu'il ne puisse plus remplir son usage, consistant avant tout à éviter les licenciements. Par ailleurs, c'est bien lorsqu'on a des salariés que l'on a le plus besoin d'un complément de trésorerie.
Nous sommes actuellement confrontés à un problème d'engorgement, puisque 900 000 entreprises ont déjà fait appel à ce fonds de solidarité. Si elles demandent toutes à accéder au deuxième étage, qui prévoit un traitement des dossiers au cas par cas au niveau régional, nous aurons du mal à traiter l'ensemble de ces dossiers de manière sereine et objective.
Véronique Louwagie et Mohamed Laqhila ont évoqué la question de la garantie du prêt à 100 %. Pour ma part, je n'y suis pas favorable. En effet, la garantie de l'État à 100 % sur les prêts bancaires n'est rien d'autre qu'un cadeau fait aux banques, qui n'attendent évidemment que cela pour pouvoir prêter de l'argent à n'importe quelle entreprise sans courir aucun risque – puisque si une entreprise ne parvient pas à rembourser son prêt, la perte en résultant sera à la charge de l'État. Il ne me paraît pas raisonnable pour les comptes publics de prendre à notre charge des pertes aussi importantes – cumulées, elles atteignent plusieurs milliards d'euros – pour des entreprises qui auraient nécessairement été en difficulté. En tout état de cause, il me semble normal de partager les responsabilités et qu'à ce titre, les banques aient à assumer au moins dix points de responsabilité sur les risques de pertes. Par ailleurs, quand on fait une comparaison avec l'Allemagne, il faut la faire jusqu'au bout : je rappelle que le taux d'intérêt des prêts garantis à 100 % par le Bund allemand est à 3 %, contre 0,25 % pour les prêts garantis par la France. Contrairement à ce que l'on entend trop souvent dire, notre dispositif est donc aussi généreux que celui qui s'applique outre-Rhin.
Je répète à Claudia Rouaux, qui a évoqué les risques de fracture sociale et territoriale, que la réduction des inégalités est l'un des grands enjeux du lendemain de la crise sanitaire, et un point auquel nous devrons porter une attention particulière dans le cadre de la relance.
Pour ce qui est de l'accès des entreprises au PGE, évoqué par Patricia Lemoine, je rappelle que toutes les entreprises cotées jusqu'à 5+ par la Banque de France bénéficient automatiquement du prêt. Celles qui sont cotées 5 ou 6 ou qui ont un compte auprès d'une néo-banque et qui, pour l'une de ces raisons, ne trouvent pas de prêt garanti peuvent s'adresser à la médiation du crédit, chargée de leur trouver une solution. Si cela se révèle impossible, en dernière instance, elles peuvent recourir au système d'avance remboursable : c'est alors l'État qui finance les dépenses immédiates qu'elles pourraient être obligées d'engager.
Charles de Courson nous a interrogés au sujet de l'avancement des négociations avec Air France : je ne répondrai pas sur ce point, car il me semble préférable d'attendre pour cela que les discussions aient abouti.
Je veux dire à Éric Coquerel que nous allons tout faire pour préserver l'unité de la zone euro. Au-delà des instruments que j'ai déjà cités, le fonds de relance que la France a proposé est absolument vital. Nous souhaitons que ce fonds soit financé par la levée de dettes communes uniquement pour le futur : les eurobonds qui mettent en commun la dette future et la dette passée ne sont pas accessibles aujourd'hui et il n'y aura pas de compromis possible au niveau européen sur ce type d'obligations. En revanche, j'estime que nous pouvons nous battre pour lever de la dette commune sur des dépenses d'investissement et sur un temps limité. L'intérêt de ce dispositif, c'est qu'il est moins coûteux pour les États que ne le serait de la dépense publique immédiate. Il permet également de mettre en commun des taux d'intérêt négatifs en Allemagne et à 1,87 % en Italie pour les obligations à dix ans, donc de disposer d'argent à plus faible coût et de possibilités d'investissement sur les dépenses nécessaires.
Enfin, pour ce qui est des dividendes, évoqués par Jean-Paul Dufrègne, je rappelle qu'aucune grande entreprise qui en aura versé ne pourra avoir accès aux prêts garantis par l'État ou au report de charges sociales et fiscales. C'est une obligation que j'ai moi-même déjà commencé à faire respecter en refusant de porter ma signature sur les demandes de prêt de certaines grandes entreprises qui avaient versé des dividendes.
Monsieur le président, vous avez exprimé le souhait que soit communiqué chaque semaine à la commission des finances un état de l'application du premier PLFR, faisant si possible apparaître la répartition des mesures prises dans chaque département. Je vous communiquerai une information mensuelle.
Il est très difficile de rendre compte des décaissements effectués chaque semaine, mais je m'efforcerai de vous tenir informés en temps réel des mouvements budgétaires – pour ce qui est des prêts, je laisserai le soin à M. le ministre de l'économie de vous apporter lui-même une réponse.
Monsieur de Courson, je me permets de vous rappeler que la dotation pour dépenses accidentelles est prévue par l'article 7 de la LOLF. Mettre en oeuvre cet article 7 – ce qui n'avait jamais été fait jusqu'à présent – va permettre de débloquer 2,5 milliards d'euros. Il appartiendra à votre rapporteur général de déduire des 2,5 milliards d'euros les 880 millions d'euros correspondant à la prime de précarité, afin de les affecter au ministère concerné. La dotation pour dépenses accidentelles sera bien utile pour recharger certains droits, notamment au profit des indépendants.
En ce qui concerne la contribution au fonds de solidarité, beaucoup d'annonces ont été faites. Je précise que l'État y a contribué, mais aussi des entreprises privées. Pour ce qui est des régions, seules deux d'entre elles, à savoir l'Occitanie et la Bretagne, ont d'ores et déjà fait savoir qu'elles procédaient au paiement des sommes annoncées. Enfin, les assurances ont à ce jour effectué deux versements, l'un de 100 millions d'euros, l'autre de 85 millions d'euros : il manque donc 15 millions d'euros par rapport à ce qui avait été convenu au terme de la première négociation menée par M. le ministre de l'économie – qui vous dira peut-être un mot au sujet de la deuxième négociation.
À l'heure actuelle, ce sont 684 millions d'euros qui ont été dépensés sur le total de 750 millions d'euros prévus par l'État pour les indépendants : il devient donc urgent, soit que le nouveau PLFR soit voté, soit que les régions versent leur contribution. Par ailleurs, 514 000 indépendants ont déjà reçu l'argent qu'ils attendaient, et je ferai parvenir à votre commission un état faisant apparaître comment cette somme se répartit département par département ainsi que les reports de charges ne faisant pas partie du fonds mais pouvant se cumuler avec celui-ci.
Pour ce qui est des 8 milliards d'euros affectés à la santé, je rappelle qu'ils relèvent des crédits de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) et non du PLFR. Ils comprennent 4 milliards d'euros affectés au financement de Santé publique France afin de permettre l'achat de masques, d'équipements de protection individuels, de produits de santé, d'équipements nécessaires à la réponse sanitaire, notamment dans les hôpitaux publics, conformément aux annonces faites par le Président de la République à Mulhouse. Il s'agit également des dépenses supplémentaires des établissements sociaux et médico-sociaux, notamment des EHPAD, du versement des primes annoncées par le ministre de la santé, ainsi que du surcoût lié aux indemnités journalières (IJ) versées en raison d'arrêts de travail dus au coronavirus – en tout, cela représente 4 milliards d'euros.
Mme Louwagie a estimé que l'application des dispositifs du premier PLFR était encore floue, ce qui ne me paraît pas justifié, puisque toutes les organisations syndicales et patronales saluent le travail accompli par le Gouvernement en matière budgétaire, fiscale et sociale.
Plusieurs d'entre vous, notamment des membres du groupe Socialistes et apparentés, estiment que la trésorerie des entreprises se trouve en péril dans la mesure où elles ne bénéficient que de reports de charges. Je rappelle qu'à l'heure actuelle, toute entreprise peut bénéficier d'un report de ses charges. C'est automatiquement le cas pour tous les indépendants et, pour ce qui est des autres entreprises, il suffit qu'elles adressent une demande en ce sens aux URSSAF.
Nous souhaitons majorer les heures supplémentaires des personnels soignants et non soignants de la fonction publique hospitalière sur l'ensemble du territoire et, pour ce qui est de la prime forfaitaire qui sera versée à ces mêmes personnels, évoquée par M. Saint-Martin et Mme Rouaux, je précise qu'elle sera de 1 500 euros dans les 28 départements les plus exposés – ce chiffre de 28 départements peut naturellement augmenter en fonction de la situation sanitaire – ainsi que dans les 128 établissements situés dans d'autres départements qui ont accueilli des patients atteints par le Covid-19. Son montant sera de 500 euros dans les autres départements ainsi que dans les établissements n'ayant pas accueilli de malades atteints du Covid.
Pour ce qui est de la prime versée aux fonctionnaires d'État, elle sera d'un montant de 1 500 euros maximum. Il reviendra aux ministères de décider quels agents sont éligibles et pour quel montant – celui-ci pouvant être fractionné en trois tiers. Quant à la prime versée dans la fonction publique territoriale, ce sont les collectivités qui décideront de verser ou non cette prime aux agents de leur territoire ou à certains d'entre eux et son montant sera plafonné à 1 000 euros.
Je m'associe à M. le rapporteur général pour saluer l'accord obtenu avec les États membres de l'Union européenne. C'est un signal fort qui est ainsi adressé à la communauté internationale, conformément à ce que souhaitait le Président de la République. La France a été très active pour faire avancer ce dossier et les efforts de M. le ministre de l'économie et des finances ont fini par payer, ce dont nous nous félicitons.
Vous avez également obtenu une augmentation conséquente de la contribution des assureurs, monsieur le ministre, et nous saluons la promesse qu'ils vous ont faite de verser 1,5 milliard d'euros en fonds propres aux entreprises qui en ont besoin.
Le PLFR contient lui aussi des avancées considérables, notamment l'intégration au dispositif du PGE des entreprises entrées en procédure collective après le 31 décembre 2019. Cependant, les entreprises ayant des fonds propres négatifs mais des résultats nets positifs, par exemple les start-up, ne sont pas éligibles à ce dispositif. Qu'envisagez-vous pour qu'elles le soient ?
Quelles sont les hypothèses d'évolution des taux d'intérêt au cours des mois à venir ? Par ailleurs, en ce qui concerne la baisse des charges des entreprises les plus fragiles, qu'est-il prévu de faire au sujet de la redevance des professionnels, une question particulièrement sensible dans le secteur de l'hôtellerie, puisque la redevance continue à être due alors même que les chambres sont inoccupées depuis plusieurs semaines ?
Il en est de même du versement transport (VT), dont les employeurs doivent toujours s'acquitter alors qu'il correspond à un service qui n'est pas rendu dans la période actuelle.
Si on a pensé aux salariés et aux chefs d'entreprise, les conjoints collaborateurs – notamment des femmes d'artisans et de commerçants – ne bénéficient d'aucun soutien.
Enfin, le déblocage des fonds d'intéressement et de participation est-il envisagé, et le cas échéant selon quelles modalités ?
Premièrement, la France n'a jamais levé autant de dettes – entre 350 milliards d'euros et 400 milliards d'euros cette année. Pouvez-vous nous indiquer comment ces opérations ont été sécurisées par la BCE ?
Deuxièmement, monsieur le ministre de l'action et des comptes publics, vous avez évoqué les primes et le soutien à ce que j'appelle l'urgence alimentaire. Pouvez-vous nous confirmer que toutes les annonces faites postérieurement aux mesures contenues dans le PLFR présenté ce matin en Conseil des ministres sont comprises dans la somme de 2,5 milliards d'euros que vous avez citée ?
Troisièmement, pouvez-vous nous préciser ce qui va être fait pour les étudiants qui se trouvent dans une situation précaire après avoir perdu le petit boulot qu'ils avaient pour financer leurs études ?
Si je salue l'abandon des 750 millions d'euros de charges dans le secteur de l'hôtellerie, il me semble qu'on pourrait également accompagner les entreprises subissant des pertes d'exploitation, notamment en fonds propres en haut de bilan. Ces pertes pourraient faire l'objet d'un remboursement au moment de la cession, grâce à une mesure fiscale adaptée. Cependant, c'est au niveau local que l'accompagnement peut se faire au plus près des entrepreneurs, notamment avec les nouvelles compétences données aux régions en matière de gestion des fonds de solidarité. Il faut se mettre en « mode start-up » car, si nos entreprises n'ont plus de chiffre d'affaires, elles ont un très gros potentiel. Messieurs les ministres, seriez-vous favorables à l'installation d'une agence régionale associant les intercommunalités, afin de donner plus de cohérence aux interventions effectuées en faveur des entreprises ?
Par ailleurs, ne pensez-vous pas qu'il soit temps de revisiter la loi PACTE ? En effet, tous ces processus nécessitent une intervention législative qui va couvrir tout le volet entrepreneurial.
Quand le plan relatif au secteur de la restauration sera-t-il annoncé et mis en oeuvre ?
Nombre de voix se font entendre pour essayer de faire en sorte que les bailleurs sociaux puissent baisser les loyers des populations les plus touchées par cette crise ? Avez-vous prévu des mesures en la matière ?
Moratoire, allégement ou annulation ? La dette de l'Afrique s'élève à 365 milliards de dollars. La France, via le Président de la République, a pris des engagements très fermes au début de la semaine et aujourd'hui. Monsieur le ministre de l'économie, que pouvez-vous nous dire sur cette question ?
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous faire le point sur la situation des fonctionnaires détachés à l'étranger ?
Je souhaite revenir sur la question des entreprises qui faisaient l'objet d'une procédure collective avant le 31 décembre 2019. Il faut éviter qu'elles soient victimes d'une double peine. Aussi est-il important que nos ministres se penchent sur ce dossier.
Vous avez indiqué que la prime pour les agents publics et les fonctionnaires serait défiscalisée et désocialisée. Peut-on espérer une désocialisation des aides versées par le fonds de solidarité afin d'être dans l'équité et le parallélisme des formes ?
Avons-nous des marges de manoeuvre pour faire des propositions sur les toutes petites entreprises et les travailleurs indépendants créés entre le 1er février et le 1er mars, car il y a là un manque ?
Pour accéder au PGE, il faut notamment ne pas avoir eu d'incidents bancaires, pas de rejet de chèque – sujet qui n'est pas anodin – ni de rejet de prélèvements. Or plusieurs indépendants ont vu leurs cotisations employeurs prélevées en mars par l'Urssaf rejetées, ce qui bloque l'accès au PGE. Pensez-vous qu'il soit possible de sortir les rejets de prélèvement des conditions d'accès au PGE ?
Comme vous l'avez dit, la filière hôtellerie-café-restauration et plus globalement la filière touristique française est touchée de plein fouet par la crise. L'absence d'annonce de date de reprise, même partielle, progressive ou aménagée, à quelques semaines seulement de la saison d'été est dramatique et fait peser un risque majeur sur la survie même des entreprises, sur leurs emplois et sur les territoires touristiques. Au-delà du plan annoncé, envisagez-vous un horizon de reprise pour la filière ? Ses acteurs sont prêts à travailler à des aménagements dès maintenant, mais ils ont besoin de visibilité.
Il est indispensable de simplifier et d'élargir l'accès au fonds de solidarité, trop d'entreprises en étant encore exclues. Je rejoins les propos de mon collègue Marc Le Fur en ce qui concerne les conjoints collaborateurs qui sont en majorité des femmes et ne sont pas éligibles. Pourquoi inclure les charges dans le plafond des bénéfices de 60 000 euros au-delà duquel les entrepreneurs ne sont pas éligibles ?
Messieurs les ministres, je vous remercie pour tout ce qui a déjà été fait et tout ce qui est proposé.
Le Président de la République a annoncé un plan spécifique pour les cafés, hôtels et restaurants, le tourisme, le secteur événementiel, etc. En amont de ces secteurs, il y a des fournisseurs. Aujourd'hui, la chaîne de production des vignerons n'est pas complète, puisque, alors qu'ils continuent à s'occuper de leurs vignes, autrement dit que les charges continuent de courir, tous les salons ont été annulés et ils n'ont plus de trésorerie. Comme le confinement va perdurer pour ceux à qui ils vendent le vin, les vignerons risquent fort de subir des pertes. Des demandes très simples sont faites, mais je ne sais pas si elles relèvent du PLFR. Alors que l'on parle d'exonérations de charges pour les secteurs que je viens de citer, peut-on envisager aussi pendant le confinement une exonération des cotisations salariales pour les vignerons ?
Vous avez appuyé sur le bouton stop de l'économie de proximité le 15 mars. Quand allez-vous appuyer sur le bouton stop des charges ? Quand allez-vous neutraliser a minima les mois de fermeture administrative pour une exonération totale des charges ? M. Darmanin a évoqué le chiffre de 750 millions d'euros qui, s'il peut paraître énorme, me semble bien faible au vu des enjeux. Combien d'entreprises – petites entreprises, restaurateurs, etc. – peuvent résister deux ou trois mois sans aucune rentrée d'argent ? La commission des finances et le Gouvernement doivent avoir conscience que les reports de trésorerie ou les 1 500 euros du fonds de solidarité pour ceux qui y ont accès ne suffiront pas pour nombre de commerçants, d'artisans, de travailleurs indépendants et de professions libérales. Vous pouvez imaginer tous les plans que vous voulez, mais si vous n'annulez pas les charges sur plusieurs mois, la casse sera considérable. Je veux me faire le porte-parole de l'hôtellerie-restauration, de la gastronomie et du tourisme : messieurs les ministres, aidez-nous sinon on va tous crever !
Je voudrais revenir sur la proposition que j'avais faite d'utiliser autant que faire se peut l'épargne liquide des Français. Je ne comprends pas bien l'objet de la résistance opposée à cette proposition quand on sait que plus de 1 200 milliards d'euros d'argent liquide sont immédiatement disponibles et que l'endettement de l'État est détenu à 54 % par des non-résidents, ce qui correspond à une hémorragie qui frappe la demande, l'investissement et la croissance. Je souhaiterais qu'un grand emprunt d'État soit émis à destination du marché intérieur, afin de mobiliser une partie de l'épargne de ceux qui le veulent bien. Ce geste citoyen nous éviterait d'émettre des bons à l'étranger.
Comment avez-vous évalué les pertes de recettes – impôts sur le revenu et sur les sociétés, TVA et TICPE – et sur quelle période ?
Comment se fait-il qu'il y ait encore de trop nombreux dysfonctionnements au niveau de l'Agence de services et de paiement ? En effet de trop nombreuses entreprises ne parviennent toujours pas à se connecter pour demander l'autorisation de mettre au chômage partiel leurs salariés.
La Commission européenne a-t-elle commencé à déployer des moyens financiers, notamment en faveur de la France, dans le cadre des fonds structurels de l'Union européenne qui financent les dépenses de santé, ainsi que dans le cadre du dispositif qui finance des dépenses d'assurance chômage ?
Monsieur Le Maire, le fonds de solidarité français ne semble pas du tout être à l'échelle des besoins de nos TPE qui sont en danger. Il y a en France 2 millions d'entreprises de très petite taille qui réalisent 17 % de la valeur ajoutée nationale. L'Allemagne a mis 50 milliards sur la table, simplement pour soutenir ses très petites entreprises. Que comptez-vous faire pour sauver spécifiquement nos 2 millions de TPE françaises ?
L'aide exceptionnelle de solidarité répond à un besoin pour ceux qui ont très peu pour vivre. À l'heure où l'on constate que la pauvreté est un facteur aggravant de la maladie et de la mortalité, comme le montre ce qui se passe malheureusement en Seine-Saint-Denis, cette mesure, dont le calibrage vient d'être précisé par Olivier Véran, est nécessaire. Cette aide est évaluée à 225 euros environ par foyer pour deux mois, ce qui est significatif pour ces familles. Mais peut-être conviendra-t-il d'y revenir compte tenu de l'extrême fragilité d'une part significative des Français.
Bon nombre de travailleurs indépendants se retrouvent sans revenu. En 2004, pour relancer la consommation, le gouvernement de l'époque avait autorisé le déblocage exceptionnel du plan d'épargne entreprise (PEE) à hauteur de 10 000 euros. Sachant que plus de 60 % des travailleurs non salariés (TNS) possèdent un contrat de retraite de type Madelin, pourrait-on envisager une telle mesure pour leur apporter rapidement une rentrée d'argent ?
Je souhaite vous interroger sur le nouveau programme de 20 milliards pour le renforcement exceptionnel des participations financières de l'État. Pouvez-vous préciser quels secteurs et quelles entreprises sont concernés ? Vous parlez d'aider les entreprises qui en ont besoin. Pourriez-vous préciser quels sont ces besoins ? Il ne faut pas reproduire ce qui s'est passé en 2009, à savoir la mutualisation des pertes et la privatisation des profits.
Monsieur Le Maire, je souhaite revenir sur la question de mon collègue Éric Coquerel sur l'entreprise Péters Surgical à laquelle vous n'avez pas répondu.
Vous évoquez une décroissance de 8 % pour deux mois de confinement, ce qui ne me paraît pas beaucoup.
Si tout le monde demande le report de sa dette, ne risque-t-on pas de voir les taux d'intérêt augmenter par le simple jeu de l'offre et de la demande, ou bien faut-il uniquement compter sur la Banque centrale européenne ?
Madame Hai, je vous confirme que les entreprises à fonds propres négatifs ne peuvent pas avoir accès aux prêts garantis par l'État. Nous sommes en discussion avec la Commission européenne pour faire évoluer cette doctrine.
Messieurs Le Fur et Marilossian m'interrogent sur l'évolution des taux d'intérêt. Le spread français est relativement stable – autour de cinquante points de base – soit quasiment au même niveau qu'au début de l'année, d'abord en raison d'une bonne signature de la France. Les différentes agences, notamment Standard & Poor's, ont salué la solidité d'une signature qui tient aux réformes qui ont été menées depuis trois ans. Cela montre que les transformations économiques que nous avons engagées sont payantes puisqu'elles nous évitent d'avoir un écart de taux d'intérêt trop important par rapport à l'Allemagne. Ce n'est pas le cas d'autres États européens de la zone euro qui n'ont pas engagé les mêmes réformes structurelles et qui, de ce fait, ont des spreads plus élevés. Ainsi, l'Italie a un spread de 200 points de base, même si ce taux est plus bas depuis l'intervention de la Banque centrale européenne.
Je demeure assez réservé sur le déblocage des fonds d'intéressement et de participation, parce qu'ils ont vocation à financer les départs à la retraite et un certain nombre de dépenses complémentaires. S'agissant du dispositif Madelin, on peut poursuivre le débat en fonction de l'évolution de la situation, mais je rappelle que ce dispositif est fait pour préparer la retraite et surtout qu'il est libellé en actions. Libérer une partie de son contrat Madelin alors que les marchés sont très bas ne serait pas une très bonne affaire pour les épargnants. Cela peut constituer une solution de dernier recours, mais je pense que les dispositifs que nous avons instaurés sont plus intéressants.
Madame Rabault, je vous confirme que nous n'avons pas de difficultés à lever de la dette. Entre la loi de finances initiale et le projet de loi de finances rectificative, elle est passée de 205 à 245 milliards d'euros. Je le répète, le spread français est stable en raison des réformes économiques que nous avons menées depuis trois ans. J'ajoute que nous n'avons pas de difficultés à financer cette dette parce que la Banque centrale européenne est intervenue massivement pour racheter de la dette obligataire. Elle est intervenue dans un premier temps en annonçant 250 milliards d'euros de rachat de dette obligataire en 2020, et elle a annoncé il y a une dizaine de jours 750 milliards d'euros supplémentaires. Au total, la BCE va racheter pour 1 000 milliards d'euros de dette obligataire des États. Tout cela nous donne donc évidemment une marge de manoeuvre et nous permet de lever de la dette. La Banque centrale européenne a, de ce point de vue, parfaitement joué son rôle : les États peuvent se financer sur les marchés et financer des dépenses publiques aujourd'hui indispensables pour sauver l'économie. Comme il est très courant d'accabler l'Union européenne de tous les maux, je tiens à souligner que sans la zone euro et la BCE, nous serions en très grande difficulté pour financer nos mesures de soutien à l'économie. Cette fois-ci, la monnaie commune nous protège.
Monsieur Mattei, vous me demandez s'il faut réviser la loi PACTE. Pourquoi pas ? Cela fait partie d'un certain nombre de dispositions que nous pourrions prendre, notamment les mesures qui avaient été travaillées dans le cadre du Pacte productif.
S'agissant du plan de soutien à la restauration et à l'hôtellerie évoqué par M. Pupponi, je souhaite y travailler avec le ministre de l'action et des comptes publics dès la fin de la semaine, afin d'aboutir dans les premières semaines du mois de mai. Pour être tout à fait transparent, je ne suis pas capable de dire quand et selon quelles modalités les restaurants pourront rouvrir dans notre pays.
Nous ne pouvons pas courir le moindre risque avec la sécurité sanitaire des Français, qui reste la priorité absolue. Je ne peux donc pas prendre d'engagement sur ce sujet, même si je sais à quel point cette incertitude est pesante pour les restaurateurs, qui me contactent par dizaines, chaque jour. Lorsque nous aurons un peu plus de visibilité sur la situation sanitaire, nous préciserons ce qui sera autorisé.
Je vous rejoins totalement pour ce qui concerne les loyers et rencontrerai les grandes foncières d'ici à la fin de la semaine. Elles doivent faire davantage d'efforts pour prendre en charge les loyers, notamment ceux de certains commerçants.
Le soutien à l'Afrique qu'a évoqué M. El Guerrab est un enjeu majeur, même s'il semble lointain. Si une catastrophe économique survenait en Afrique, elle poserait des difficultés directes à la France. Dans le cadre du G20, qui se réunira dans quelques instants, nous avons obtenu un moratoire sur la dette de 74 pays parmi les plus pauvres de la planète, pour un montant de 32 milliards d'euros. Comme l'a indiqué le Président de la République, d'ici à la fin de l'année, nous verrons au cas par cas, en fonction de la soutenabilité de la dette de ces États, si ce moratoire doit être transformé en annulation de dettes. Cela ne pourra se faire qu'au cas par cas, dans un cadre multilatéral. Il n'est en effet pas souhaitable qu'une fois la dette annulée, d'autres puissances prennent notre place dans ces États en termes d'influence et de coopération.
Mais il faut faire davantage et nous plaidons, comme je l'ai fait hier dans le cadre du G7, pour que le Fonds monétaire international (FMI) s'engage encore plus dans le soutien aux pays africains. La directrice générale du FMI a proposé d'augmenter les allocations de droits de tirage spéciaux (DTS) pour 500 milliards de dollars. Nous soutenons entièrement cette initiative, qui est peu coûteuse pour les États membres et très efficaces pour les États bénéficiaires. Si nous nous heurtons pour l'instant à un refus américain, nous estimons que ce déblocage est le bon instrument pour soutenir les pays africains.
S'agissant des entreprises en procédure collective avant le 31 décembre 2019, je confirme à Jean-Paul Dufrègne que nous travaillons sur ce sujet, qui fait partie des points sur lesquels nous négocions avec la Commission européenne.
Je certifie par ailleurs à Olivia Grégoire que les aides du fonds de solidarité sont à la fois défiscalisées et désocialisées.
Émilie Bonnivard, bien que je le souhaiterais, je ne peux pas vous donner d'horizon de reprise pour la filière tourisme et restauration, si vitale dans votre région de montagne. Nous donnerons des précisions dès que nous le pourrons, mais cette reprise dépendra totalement de la situation sanitaire et des procédures de déconfinement qui seront introduites.
Pour répondre à la question de nombreux députés, je rappelle que ce PLFR propose un élargissement massif du fonds de solidarité, non seulement aux groupements d'exploitation en commun (GAEC) mais aussi aux entreprises en procédure de redressement. Nous avons également décidé de doubler le plafond de 60 000 euros de bénéfices, pour tenir compte du conjoint collaborateur. Ces mesures semblent répondre à la préoccupation légitime des députés.
Quant aux viticulteurs que Marie-Christine Verdier-Jouclas a évoqués, ils participent à une discussion avec Didier Guillaume.
S'agissant des exonérations totales de charges soulevées par Fabrice Brun, je laisserai le ministre de l'action et des comptes publics répondre. Toutefois, le dispositif de chômage partiel prévoit que l'État verse les salaires : les entreprises n'ont donc pas de charges sociales à acquitter.
Michel Castellani a traité de la mobilisation de l'épargne des Français. Aujourd'hui, on constate en effet que les Français, confinés, épargnent beaucoup, ce qui est normal et que je ne critique absolument pas. Le volume des encours des livrets A et des livrets de développement durable et solidaire augmente fortement.
En revanche, au moment de la relance, la priorité ira à l'investissement, même si des mesures de soutien de la demande seront nécessaires. Sans elles, d'après les discussions que j'ai eues avec les économistes et certains chefs d'entreprise, le comportement de précaution risquerait fortement de l'emporter. Nous resterions alors avec des montants très élevés d'encours du livret A et du livret de développement durable et solidaire, ce qui nuirait à notre économie.
Enfin, pour répondre à Patrick Hetzel, le fonds de solidarité me semble tout à fait à l'échelle. Si la somme d'un milliard d'euros, prévue initialement n'était peut-être pas suffisante, elle a été portée à 7 milliards. À partir de début mai, nous envisageons d'aller plus loin pour l'hôtellerie, la restauration et le tourisme. Nous ciblerons là les secteurs qui ne pourront pas reprendre leur activité économique car ils continueront d'être fermés.
Rappelons que, parmi les 50 milliards d'euros de dépenses consenties par l'Allemagne, figurent les allégements ou reports de charges sociales et fiscales, qui représentent 15 milliards d'euros par mois en France. Le dispositif me semble donc comparable.
Je demanderai enfin à Sabine Rubin et à Éric Coquerel de me transmettre le dossier de l'entreprise qu'ils ont citée. Nous l'examinerons avec la plus grande attention.
Pour l'instant, aucune liste des commerces autorisés à reprendre leur activité à cette date n'a été établie. Un arrêté a simplement entraîné la fermeture de certains commerces, parmi lesquels les bars, les restaurants et les coiffeurs. La décision dépendra des modalités de déconfinement, sur lesquelles nous travaillerons avec Muriel Pénicaud dans les dix jours qui viennent.
Mme Rabault a évoqué la prime de précarité, qui recouvre en réalité quatre primes : la prime sociale dont parlait le Premier ministre ce matin ; la prime versée à la fonction publique hospitalière ; celle octroyée à la fonction publique d'État ; celle que pourront verser les collectivités locales, qui n'est pas compensée mais pour laquelle un outil juridique est du moins créé.
La prime pour la fonction publique d'État est versée en utilisant les crédits de fin de gestion. Les ministères en seront bientôt capables. Le montant global de cette prime est estimé à 300 millions d'euros, même si les employeurs doivent pouvoir la définir.
La prime pour la fonction publique hospitalière est plus élevée, conformément à ce qu'ont annoncé ce matin le Premier ministre et le ministre des solidarités et de la santé. Si elle n'est pas prévue dans le PLFR, elle figure bien dans les crédits de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM).
La prime précarité coûtera 880 millions d'euros, qui seront prélevés sur les 2,5 milliards d'euros de crédits de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles, par un amendement du rapporteur général. L'ensemble de ces montants est donc bien budgétisé.
Enfin, nous examinerons la situation des vignerons, sur laquelle Mme Verdier-Jouclas a appelé notre attention. Nous ne pouvons pas annuler les charges de toutes les entreprises qui connaîtront des difficultés, mais des dispositions spécifiques pour les secteurs de la pêche ou de la vigne pourront être discutées. Elles ne concerneront cependant que les charges patronales, car les cotisations salariales sont payées par les salariés pour la protection sociale, lorsque l'activité reprend. À l'heure actuelle, une grande partie d'entre eux est certainement au chômage partiel.
Quant à l'intervention de M. Brun, M. le ministre de l'économie et des finances a rappelé l'évidence.
Monsieur El Guerrab, j'ai bien noté votre question sur les fonctionnaires à l'étranger, au sujet de laquelle vous m'aviez également écrit. Le ministère des affaires étrangères m'a indiqué que les mouvements dans la fonction publique diplomatique seront réalisés autant que possible. Ils dépendront évidemment de la possibilité qu'auront les fonctionnaires français à l'étranger de se déplacer. Ceux qui ne pourront pas se déplacer seront prolongés dans leurs fonctions. Comme nous l'avons déjà fait pour les emplois de direction de l'État, nous saurons le faire par voie réglementaire pour les emplois de la diplomatie, si cela est nécessaire, et au cas par cas. Je vous répondrai par écrit sur ce sujet.
Pour répondre à la question de M. Jerretie, qui est très importante pour la commission des finances, les prévisions de baisse des recettes fiscales sont difficiles à établir.
Nous avons prévu environ 42,7 milliards d'euros de recettes en moins, soit 32 milliards de différence par rapport au premier PLFR. Les recettes de l'impôt sur le revenu diminueraient de 4,6 milliards par rapport à la première loi de finances rectificative, notamment en raison de la baisse de la masse salariale et, pour l'impôt à la source, des modifications des taux de prélèvement entre deux acomptes.
Les recettes de l'impôt sur les sociétés diminueront fortement, de 13 milliards, par rapport à la première loi de finances rectificative, soit de près de 20 milliards par rapport au budget présenté il y a trois mois, notamment parce que les marges financières des entreprises se réduiront.
Pour la taxe sur la valeur ajoutée, nous prévoyons une diminution de recettes d'environ 9 milliards par rapport à la loi de finances rectificative votée il y a trois semaines. Elle s'explique principalement par la baisse de la consommation des ménages, qui se maintient tout de même grâce à l'activité de la grande distribution.
Les recettes de l'impôt sur les sociétés risquent donc de baisser davantage que celles liées à la taxe sur la valeur ajoutée. Ce point devra toutefois être vérifié.
Enfin, pour la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE), la baisse de recettes d'un milliard sera sûrement dépassée car rares sont les voitures qui circulent actuellement.
Je suis prêt à apporter une réponse écrite pour les autres impôts, si ces éléments intéressent la commission. De nombreuses indications figurent par ailleurs dans les documents fournis.
Ce deuxième PLFR est bien calibré s'agissant de l'importance respective de l'offre et de la demande au sein de la présente crise. L'interruption de l'ensemble de l'économie a suscité un arrêt net de l'offre et quelques difficultés pour la demande. Les mesures du présent PLFR apportent un soutien majeur à l'offre et une correction des inégalités qui peuvent se créer sur la demande.
Comme le disait M. le ministre de l'économie et des finances, une tendance similaire sera observée lors de la reprise de l'activité. Dès ce texte de loi, nous voyons donc les rails sur lesquels nous nous engageons.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 15 avril 2020 à 15 heures 30
Présents. – M. Saïd Ahamada, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Francis Chouat, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, Mme Jennifer De Temmerman, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Bruno Duvergé, Mme Sarah El Haïry, M. Nicolas Forissier, M. Joël Giraud, Mme Olivia Gregoire, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Vincent Ledoux, M. Marc Le Fur, Mme Patricia Lemoine, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. Benoit Potterie, M. François Pupponi, Mme Valérie Rabault, M. Robin Reda, M. Xavier Roseren, Mme Claudia Rouaux, M. Fabien Roussel, Mme Sabine Rubin, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Olivier Serva, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth
Excusés. – M. Damien Abad, Mme Anne-Laure Cattelot, M. David Habib
Assistaient également à la réunion. – Mme Delphine Batho, M. M'jid El Guerrab, Mme Valéria Faure-Muntian, M. Guillaume Larrivé, M. Jacques Marilossian