Madame Bonnivard, 330 personnes ont été déférées pour violences intrafamiliales, 82 ordonnances de protection ont été délivrées ainsi que 91 ordonnances de placement provisoire pour des mineurs en danger. Si ces données témoignent d'une continuité de l'activité, il m'est difficile d'établir une comparaison par rapport aux mois antérieurs, car la situation globale étant totalement différente une telle comparaison n'aurait pas de sens. Les chiffres montrent en tout cas que l'activité reste soutenue s'agissant de contentieux qui sont notre priorité.
C'est parce que nous avons souhaité prendre en compte la réalité pour lutter contre l'éviction de leur logement des victimes de violences intrafamiliales que, avec Marlène Schiappa et la haute fonctionnaire à l'égalité femmes-hommes de mon ministère, nous avons construit une plateforme nationale permettant de trouver, avec nos partenaires, une solution concrète afin de reloger le conjoint violent et de permettre ainsi son éloignement. J'ai signalé qu'il y avait eu dix saisines de la plateforme vingt-quatre heures après son ouverture : il faut évidemment ramener ce nombre aux deux jours de fonctionnement de cet outil.
Je ne prétends pas que l'ensemble des mesures déjà prises pour soutenir les avocats permettra aux plus fragiles d'entre eux de trouver toutes les solutions nécessaires, mais, si j'ai tenu à ce qu'ils bénéficient du fonds de soutien – les 1 500 euros qui peuvent devenir 2 000 euros sous certaines conditions –, si nous avons fait en sorte, avec mes collègues, qu'ils s'inscrivent dans l'ensemble des dispositifs prévus, c'est parce que nous avons conscience que, après deux mois de grève, la crise actuelle place les petits cabinets d'avocats en particulier dans une situation de très grande fragilité. C'est pour moi un souci de tous les instants de travailler à l'appui économique des différents cabinets d'avocats, et des divers types de structures et d'organisations que les avocats ont mis en place. Nous poursuivrons dans ce sens.
Monsieur Habib, nous avons travaillé avec l'ensemble des acteurs des juridictions économiques : ils attendent un appui procédural et juridique ainsi que la mise en oeuvre de certains dispositifs techniques, mais, à ce stade, je n'ai pas entendu formuler de demandes concernant les moyens.
Je l'ai dit clairement s'agissant des juridictions en général : je souhaite qu'elles puissent bénéficier de collaborateurs ponctuels – cette réponse ne vaut pas spécifiquement pour les tribunaux de commerce. Nous faisons déjà appel aux magistrats à la retraite dans certaines situations ; nous amplifierons cette démarche, au moins le temps de résorber les dossiers accumulés.
Vous me signalez fort aimablement que l'ordonnance du 25 mars est illisible ; puisque nous prenons tous cela avec philosophie, je transmettrai au directeur des affaires civiles et du sceau. Sachez que, s'agissant des délais des procédures collectives, initialement, tout le monde était d'accord : il fallait une prorogation qui permette une sécurité juridique. Aujourd'hui, plus personne n'est d'accord : chaque secteur d'activité considère qu'il lui faut un délai réduit spécifique. Nous présenterons, mercredi prochain, une ordonnance rectificative sur ce sujet – nous essayons de rassembler les demandes qui nous parviennent, en particulier, du secteur du BTP et de l'immobilier qui souhaite avancer plus rapidement.
Monsieur le président Lagarde, vous signalez qu'un certain nombre de surveillants ne portent pas de masques – dont acte. Cela s'est dit, j'ignore si c'est toujours vrai au moment où nous parlons. Reste que je tiens à souligner le fait que le directeur de l'administration pénitentiaire a pris huit directives en la matière : nous accompagnons pas à pas le travail remarquable des personnels de l'administration pénitentiaire. Chaque semaine je m'entretiens avec les directeurs interrégionaux – nous travaillons ainsi vraiment en symbiose. L'une des circulaires, celle du 31 mars, donne des instructions très précises sur le port du masque.
Vous êtes ensuite revenu sur la question des conjoints violents. Vous m'interrogez plus précisément sur les bracelets anti-rapprochement, qui sont l'une des innovations de la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille. J'ai toujours dit qu'ils ne pourraient être utilisés qu'à partir du 1er septembre : il a fallu passer des marchés publics et saisir la CNIL, puisque la protection de données personnelles est en jeu. En attendant, et en particulier en cette période, nous donnons un nombre important de téléphones grave danger – TGD – qui sont un moyen de protection.
Ensuite, en ce qui concerne le tracking, Marie-Laure Denis, présidente de la CNIL, et moi-même avons des positions très protectrices des libertés personnelles et qui se veulent le plus conformes possible à la charte fondamentale que vous avez adoptée en 2018.
Enfin, pour ce qui est du débat parlementaire, ne nous méprenons pas ! J'ai toujours affirmé que la question du tracking supposait la tenue de nombreux débats, y compris au Parlement. Or il est beaucoup trop tôt, alors que nous ne savons même pas quel projet nous évoquons – ni même si projet il y aura –, pour que je puisse vous dire quelle sera la nature de ce débat, quand il aura lieu et de quelle manière vous y serez associés. C'est tout à fait impossible et vous-mêmes, d'ailleurs, déciderez-vous peut-être de vous saisir du sujet qui, pour l'heure, j'y insiste, n'est pas à l'ordre du jour.
Vous m'avez interrogée, monsieur Saint-Martin, sur le premier bilan des mesures économiques prises avec les tribunaux de commerce. Il est beaucoup trop tôt pour vous répondre : l'ordonnance n'a été prise qu'il y a une dizaine de jours. On ne peut donc encore savoir si ce sont les procédures collectives ou au contraire les conciliations qui sont préférées. Je suivrai le dossier avec une grande attention dans le cadre, en particulier, de mes contacts réguliers avec les tribunaux de commerce.
Le moment présent montre par ailleurs à quel point le numérique est essentiel et c'est bien parce que nous avions renforcé les réseaux que nous avons pu développer considérablement la visioconférence : nous sommes ainsi capables d'en avoir 8 000 en même temps. Nous avons également renforcé nos connexions numériques, si bien que nous pouvons en avoir 30 000 en même temps sur l'un de nos réseaux sécurisés. Nous avons en outre donné des ultraportables plus rapidement : nous en installons 500 par semaine, y compris pour les personnels de greffe, pour un total de 3 000 ultraportables distribués depuis le début de l'urgence sanitaire. Bref, nous déployons autant de moyens qu'il est possible. Tout n'est pas parfait, loin de là, il reste beaucoup à faire et c'est bien pourquoi la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice prévoit un investissement important dans le numérique.
M. Son-Forget est pour sa part revenu sur les objectifs fixés par les ordonnances concernant la diminution de la pression carcérale. Notre politique n'est pas « anti-carcérale » ; je réfute cette expression. Je crois au contraire que la prison peut être utile, que les peines de prison sont nécessaires à condition qu'elles soient prononcées à bon escient puis exécutées. Mais il n'est ici question que des fins de peine : sont concernées soit des personnes qui sont à deux mois de la fin de leur peine et sont dès lors assignées à domicile, soit des personnes à six mois de la fin de leur peine, dès lors convertie en travail d'intérêt général. De surcroît, ces personnes ne sont jamais laissées sans contrôle. Nous sommes ainsi parvenus à une solution d'équilibre.