… qui a défendu devant l'Assemblée ce texte qui permet de combler un certain nombre de lacunes.
Imaginée en réaction à la censure du Conseil constitutionnel, cette proposition de loi prend un relief nouveau avec la crise douloureuse liée à l'irruption du covid-19. En effet, il n'y a pas une filière agricole qui ne soit perturbée, les flux d'échanges sont stoppés net, les rayons de supermarché sont parfois vides, la restauration hors foyer est à l'arrêt. Mais nous voyons aussi de nouveaux modes de consommation émerger, lesquels favorisent généralement les circuits courts.
À défaut d'information claire sur l'origine et la qualité des produits alimentaires, le consommateur se tourne, quand il le peut, vers la relation directe avec le producteur. C'est ainsi que sous ses apparences de liste à la Prévert, cette proposition de loi est devenue d'une importance capitale dans la perspective certes d'un retour à la vie normale, mais avec des consommateurs qui seront encore plus attentifs à la qualité et à la provenance de ce qu'ils mangent.
Pour illustrer mon propos, permettez-moi de commenter plusieurs articles. L'article 1er A va faciliter l'accès des consommateurs aux informations sur les produits alimentaires achetés en ligne, de même que l'article 2, qui encadre ces dispositifs sur les plateformes de vente en ligne. Nous le savons, avec la crise sanitaire, la vente en ligne et autres drives ont pris une place inédite dans les comportements d'achat des Français, d'où l'importance garantir à ceux-ci une information complète, quel que soit le mode d'acquisition.
L'article 2 bis, qui étend l'obligation d'affichage des origines aux viandes porcines, ovines et aux volailles dans les établissements de restauration, doit également être vu comme un outil stratégique de reconquête pour les filières françaises. Privées pour certaines de leurs débouchés, il leur faudra retrouver une place de choix sur nos tables dès lors que la restauration pourra reprendre son activité.
Je souhaiterais aussi citer l'article 8, en m'adressant directement à vous, monsieur le ministre, car il instaure l'obligation de déclaration de récolte dans le secteur vitivinicole. Pour avoir défendu il y a fort longtemps une proposition de loi sur ce même sujet, je sais que la viticulture traverse une crise profonde et certains vignobles demandent au Gouvernement l'accès à la distillation pour leur production excédentaire, afin de s'engager sur la voie du redressement. Certes, le virus n'est pas le seul fautif, les taxes iniques imposées par les États-Unis ayant, dès l'automne, fragilisé ce secteur. Cependant, face à ce drame, qui est autant de nature structurelle que conjoncturelle, il n'y aura pas de solution durable sans un effort des producteurs de vin pour ajuster leur production à la réalité des débouchés du marché. Je vois dans l'obligation de déclaration de la récolte une étape essentielle pour que chacun prenne sa part de responsabilité et que l'indispensable dialogue entre les bassins de production et l'autorité régulatrice se fasse en toute transparence.
Enfin, l'article 5 bis, qui est le seul encore en discussion, a trait à l'étiquetage des bières. L'histoire de la brasserie française est formidable, puisque partie d'une production strictement industrielle, elle s'est muée en un véritable réseau de brasseries artisanales, qui nous ont permis, grâce au talent des maîtres brasseurs, de retrouver la diversité des bières faites en proximité. La bière, c'est beaucoup d'eau, un peu de malt et de céréales, une pincée de houblon et enfin une particule de génie du maître brasseur. Mais ce que beaucoup ignorent, c'est que la production française de houblon, cette liane qui apporte l'arôme au brassin, a failli disparaître totalement. En effet, jusqu'au début des années 2000, l'essentiel de la production nationale, surtout localisée en Alsace, était presque exclusivement vendue à un seul client américain ; il s'agissait donc d'un produit d'export ultramondialisé.
Or, lorsque la France a refusé, à juste titre, de s'engager dans la seconde guerre d'Irak, le brasseur Anheuser-Busch, pour ne pas le citer, a dénoncé son contrat d'achat. « Pas de houblon français dans la bière des valeureux GIs ! », disait-il.
Vous imaginez le choc pour les producteurs ! Il leur a fallu des années de travail pour s'en remettre, pour diversifier les variétés, pour adapter les surfaces, pour apprendre à produire en utilisant moins de produits phytosanitaires ou, parfois, en production biologique. Bref, grâce à leur travail, ainsi qu'au génie des maîtres brasseurs, nous avons retrouvé la diversité et la typicité des bières.
Je rêve d'une histoire analogue pour l'ensemble des productions et des filières françaises. Pour que cela puisse réussir, il faut un étiquetage efficace et transparent, qui permette aux consommateurs de se rendre compte du travail réalisé en amont.