La présente proposition de résolution invite l'Assemblée nationale de notre République à se prononcer sur une mesure de salut public qui, si elle était adoptée, ne serait pas immédiatement appliquée, puisqu'il faudrait convaincre nos partenaires de sa nécessité et prendre pour cela des initiatives diplomatiques : du moins, elle donnerait la force aux représentants français d'agir pour obtenir son application au plan européen. Cette mesure est l'annulation de la dette publique des États européens.
Je sais ce que le mot « annulation » peut susciter de surprise et d'émoi. Nous pouvons donc le remplacer, si cela vous arrange, par « dette perpétuelle » ou « dette pour toujours sans intérêt ». Peu importe.
Je comprends également que l'on ne saisisse pas d'entrée de jeu que cette annulation ne spoliera ni ne ruinera personne puisqu'il s'agit de titres et de dettes des États qui sont dans le bilan actuel de la Banque centrale européenne.
Beaucoup d'entre vous apprendront avec étonnement, j'en suis certain, que 45 % du bilan de la BCE est constitué de dettes des États membres de l'Union européenne. Ainsi, cette banque centrale dont le statut a disposé qu'elle était indépendante – j'ai personnellement voté contre ce statut – n'a pas le droit de prêter aux États, mais elle a désormais celui d'encaisser les intérêts que ces derniers paient pour leur dette : en effet, elle a racheté entre-temps les titres des dettes souveraines qui se trouvaient dans les banques privées, afin de leur donner des liquidités et des certitudes que ne leur garantissaient plus ces titres de dette.
C'est donc 45 % du bilan de la BCE qui est constitué de dettes des États membres. Quant à nous, Français, 18 % de notre dette souveraine se trouvent dans les caisses de la Banque centrale européenne – 20 % pour les Allemands.
Pourquoi prendre une telle mesure ? Parce que nous avons impérativement besoin que l'État recouvre une capacité d'intervention économique maximale. En effet, si la joie du déconfinement, bien naturelle, peut donner ici et là le sentiment que la page est tournée, ce serait une illusion que de s'y laisser prendre.