La crise du covid-19 a engagé l'État dans des dépenses publiques importantes pour soutenir notre système de soins, l'économie et – plus modestement, hélas – nos concitoyens les plus précaires. La crise a certainement rappelé à beaucoup les vertus de l'intervention publique, l'importance de services publics développés, notamment à une échelle de proximité. On a constaté combien il était indispensable d'accroître la dépense publique durant cette épreuve. La situation actuelle constitue une preuve supplémentaire, s'il en fallait une, qu'en période de grands bouleversements, de grands défis, l'intervention de la puissance publique constitue une nécessité impérieuse pour sortir par le haut de la situation. C'est ainsi que, durant la crise, le Gouvernement a fini par adopter – je dirais en dernier ressort – un principe simple : il est rationnel de s'endetter quand il y a urgence économique, sociale ou environnementale, d'autant plus quand les taux d'intérêt sont faibles.
Si cette crise fait passer notre dette publique à 115 % du PIB, il est fort à parier que l'augmentation ne s'arrêtera pas là, tant les besoins de financement public seront plus importants que jamais dans les mois, et même dans les années à venir, surtout si on pense que l'État – la puissance publique – , doit tenir un rôle de stratège pour relever des défis tels que la transition écologique ou le redressement de notre système de santé. Dès lors que cette dette s'accroît, même pour des raisons parfaitement légitimes, de grandes sirènes retentissent pour nous alerter sur les conséquences de ce fardeau. Nous devons apporter une réponse. Il semble, à nos yeux, essentiel d'éluder la solution habituelle, celle-là même qu'énoncent le ministre de l'économie et des finances ou le gouverneur de la Banque de France, affirmant qu'il faudra rembourser la dette dans un avenir proche.
En fait, aucun pays dans l'histoire n'a jamais remboursé sa dette publique en dégageant chaque année quelques économies. Infliger à notre pays de telles politiques budgétaires se révélerait à coup sûr mortifère – l'expérience grecque en est une preuve flagrante.