Monsieur le président Mélenchon, vous m'avez épaté, je le dis franchement. Ce que vous avez proposé est absolument exceptionnel. Vous êtes très clairement le seul à l'avoir fait.
Évidemment, nous ne sommes pas d'accord sur tout. Je ne suis pas un grand spécialiste de la finance, loin de là – je connais mieux les varicelles.
Votre proposition porte sur deux points très différents. Premièrement, vous proposez que, globalement, la dette de la France soit en quelque sorte oubliée, ce qui ne me semble ni raisonnable ni raisonné.
Deuxièmement, vous proposez l'instauration d'une dette perpétuelle. Cette idée, essentielle, pourrait sauver notre pays, j'en suis absolument persuadé à titre personnel. C'est une évidence absolue.
Je ne suis pas le seul à le penser. Le gouvernement espagnol, socialiste, qui compte politiquement plutôt parmi mes amis, a exactement les mêmes idées que les vôtres, et demande : « Nom de nom, pourquoi ne pas instaurer un tel type de dette ? »
Un économiste nommé George Soros, que l'on ne comptera pas parmi les idiots – comme Éric Raoult – , considère, lui aussi, que l'idée n'est pas complètement stupide. Tout peut se passer très calmement, à droit constant, sans aucun problème.
La situation deviendrait plus compliquée, s'il fallait rediscuter l'article 123 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne – en faveur duquel je n'ai pas voté. C'est simple, je n'ai voté en faveur d'aucun accord européen, si bien que je peux aborder ces questions avec beaucoup de calme.
Votre proposition a deux composantes. La première implique de rediscuter les traités européens pour parvenir à un nouvel accord. La deuxième, en revanche, peut être appliquée à droit constant, et ne gêne personne.
Les Espagnols le demandent, Soros le demande, des gens intelligents et beaucoup d'économistes s'y intéressent. C'est une évidence absolue.
Je ne sais pas combien de temps il me reste, parce que trois minutes trente pour un groupe, c'est quand même terrible ! Plus il y a de groupes, moins il y a de possibilités de s'exprimer : c'est absolument terrible.
Je voudrais dire une dernière chose, très simple. Vous l'avez souligné, monsieur le président : il y a la guerre et il y a des dettes. À l'époque de Philippe le Bel, c'était facile, on brûlait les Templiers. Au temps des Capétiens, c'était simple, on virait les banquiers lombards en Hollande ou en Italie. En revanche, on perdait tout l'argent.
On peut accepter un certain nombre de choses… Le Brexit rappelle le comté d'Artois, mais c'est un mauvais exemple, parce que cela s'est mal terminé : Robert III d'Artois est passé chez l'ennemi et il en est mort. Tout cela est très logique. La dette de l'Allemagne a été effacée en 1953 : sans cette annulation, où en serions-nous aujourd'hui ? En 1947, la dette française représentait 297 % du PIB : nous étions laminés. Est-ce que l'Assemblée nationale aura l'intelligence de dire, aujourd'hui : « On arrête tout ça » ? Le Président de la République a dit que nous étions en guerre : eh bien, faisons une guerre !
Voilà, c'est tout ce que je voulais dire. Malgré toutes nos différences, je pense que le président Mélenchon a raison.