Des Hauts-de-France au Béarn, nombre de nos concitoyens sont soumis aux contingences : 380 000 à 400 000 commerçants et artisans, qui travaillent de manière indépendante, comme l'ont fait mes parents et, peut-être, les vôtres, ne s'en sortent plus. Ils ont de gros problèmes : un jour, ils ont souscrit une assurance ; en vingt ou trente ans, ils n'ont jamais rien demandé ; or, aujourd'hui, on ne reconnaît pas la légitimité de leurs demandes d'indemnisation des pertes liées à l'épidémie. Cela n'est pas toujours vrai : 1 % ou 2 % des contrats les prennent en considération. Ensuite, il y a 3 % ou 4 % de cas limites, dont certains donnent lieu à des procès. De petits commerçants ont ainsi gagné contre Axa, tels David contre Goliath, et nous sommes fiers d'eux.
Le problème est tout nouveau, vous l'avez dit, ce n'est jamais arrivé. Pourquoi ne pas définir un nouveau risque ? Pourquoi ne pas assurer contre ce risque ? Pourquoi ne pas traduire cela dans la loi, pour que les choses soient très claires ? Des épidémies, nous allons en avoir, et il faut que les assurances fassent très attention !
À mon sens, il est absolument nécessaire de traiter le problème au cours de cette législature ou, à défaut, de la suivante. Il nous faut combler un véritable vide juridique en matière d'assurance contre les drames sanitaires ; nous sommes pleinement d'accord sur le principe. Le groupe Socialistes et apparentés a d'ailleurs déposé, le 9 avril dernier, une proposition de loi en ce sens. Bien évidemment, chacun peut choisir de s'assurer ou non, mais, si l'on s'assure, on doit être indemnisé, c'est la moindre des choses.
Néanmoins, nous pouvons avoir quelques désaccords avec ce qui est prévu dans la proposition de loi.
Premièrement, le risque assurantiel étant mutualisé, si les 37 à 40 milliards d'euros dont disposent les assurances dans leurs caisses sont mangés par l'indemnisation de l'ensemble des conséquences de la crise sanitaire, d'autres gens, eux aussi confrontés à des drames – je pense à l'amiante ou aux accidents de la route – , ne pourront pas être aidés, ce qui serait inhumain. Il faut donc trouver une solution différente ou intermédiaire. Reste qu'il faut combler le vide juridique et répondre à la volonté clairement exprimée de s'assurer contre les risques épidémiques, qui vont devenir majeurs.
Deuxièmement, cette proposition de loi est positive, mais elle est rétroactive. Nous sommes l'un et l'autre de gauche, monsieur le rapporteur, et nous savons que la seule fois où des lois rétroactives ont été prises, c'était sous Pétain, avec les tribunaux d'exception.
Même si le dispositif que vous proposez fonctionnait aujourd'hui, il ne pourrait pas fonctionner ensuite.