Compte tenu de son ampleur et de sa puissance, la crise sanitaire que vous traversons aura des conséquences très difficiles – le mot est faible – pour notre pays. Notre économie, frappée par deux mois de confinement, est sévèrement touchée. Cette situation a fait apparaître des manquements en matière de prise en charge par les assurances des pertes subies en cas de catastrophe sanitaire. À cet égard, je salue le travail réalisé par notre collègue Loïc Prud'homme et le fait que son groupe ait inscrit ce sujet d'importance à l'ordre du jour. Je tiens également à féliciter mon collègue du groupe UDI et indépendants, Pierre Morel-À-L'Huissier, qui a lui aussi déposé, en avril dernier, une proposition de loi portant sur cette question.
Monsieur le rapporteur, vous proposez très justement de reconnaître que les épidémies et pandémies relèvent des catastrophes naturelles et de préciser les modalités d'indemnisation. Je pense que nous partageons cette volonté sur tous les bancs de l'hémicycle. Durant ces semaines de confinement, nous avons tous pu mesurer combien la question de l'indemnisation des pertes était centrale pour les acteurs économiques de nos territoires respectifs. Or, même lorsqu'une clause de leur contrat offre une garantie contre les pertes d'exploitation, les chefs d'entreprise ne pourront pas la faire appliquer, car le risque pandémique n'est pas pris en considération.
La rupture est telle que l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie a récemment déclaré vouloir développer son propre système assurantiel, en dehors des structures traditionnelles. L'économiste américain Kenneth Arrow, spécialiste des questions de confiance dans l'économie et lauréat du prix Nobel en 1972, disait : « La confiance est une institution invisible qui régit le développement économique. » Dans cette période particulière et troublée, notre rôle de parlementaire est central ; notre responsabilité est plus grande encore : il s'agit de maintenir la confiance des Français par notre engagement et notre capacité à trouver ensemble des compromis et des solutions dans l'intérêt commun.
Cependant, le groupe UDI et indépendants s'interroge sur la soutenabilité du financement de la mesure proposée. En effet, les pertes d'exploitation des entreprises sont estimées à plus de 60 milliards d'euros. Bien sûr, un mécanisme financier structuré, suffisamment abondé et solide doit être mis en place, mais il ne faut pas faire exploser les coûts pour les assurés. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons apporter notre contribution à ce débat, dans un esprit constructif et avec le souci d'être utiles à nos concitoyens. Nous avons déposé plusieurs amendements portant sur les modalités de financement de cette mesure et sur la prise en charge des pertes – nous aurons l'occasion d'y revenir au cours des débats.
Nous souhaitons notamment que le Gouvernement s'inspire de ce qu'ont entrepris nos voisins bavarois en Allemagne. Ce Land a obtenu la signature d'un accord par lequel les assurances s'engagent à couvrir au moins 15 % des pertes d'exploitation des entreprises fermées pour cause de pandémie. Monsieur le secrétaire d'État, si une région allemande a mené avec succès une telle négociation, je ne vois pas pourquoi ni comment l'État français ne pourrait pas réussir une opération analogue. De plus, la souveraineté économique n'étant plus un gros mot désormais, il serait normal que les assurances fassent preuve d'une réelle solidarité envers nos acteurs économiques, faute de quoi elles risquent de mettre en danger l'appareil productif français.
Étant l'avant-dernière à prendre la parole dans la discussion générale, je ne vais pas répéter ce qui a été dit. En revanche, permettez-moi de faire une légère digression : je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'État, que vous transmettiez l'analyse que nous faisons concernant le fonds Barnier, lequel permet d'indemniser les victimes de catastrophes naturelles.
Du fait du changement climatique, les épisodes météorologiques violents s'intensifient sur la planète, en particulier en France, ce qui entraînera une augmentation du montant des indemnisations dans les années à venir – et je ne parle pas des maisons fissurées, dans la France entière, en raison de fortes précipitations faisant suite à une période de forte sécheresse. Si nous devons ajouter à cela la prise en charge de futures crises sanitaires, il nous faut anticiper les besoins financiers.
Le produit de la taxe affectée au fonds Barnier s'élève au total à 210 millions d'euros par an, mais a été plafonné à 131,5 millions depuis le projet de loi de finances pour 2018. Ce sont donc près de 80 millions qui sont prélevés pour alimenter le budget de l'État et ne sont plus mobilisés pour indemniser les catastrophes naturelles.