Les DRASS, les directions régionales des affaires sanitaires et sociales, auraient pu jouer le même rôle et nous dispenser des ARS, dont vous reconnaissez la nature profondément bureaucratique. Par des regroupements hospitaliers dont la nécessité n'était pas toujours démontrée, ces dernières ont organisé la déstructuration du service de santé de proximité. La nature des ARS est également comptable : ces regroupements ont réduit de manière drastique le nombre de lits, et ce, dans des territoires dont l'étendue est parfois comparable à celle de pays européens.
Cette gestion de la santé à l'échelle territoriale, marquée par la technocratie et l'austérité, se décline sous la forme d'une gestion elle aussi bureaucratique et comptable des établissements hospitaliers. On se souvient de cette cheffe de service à qui, à peine le pic de l'épidémie passé, il a été demandé de refaire le compte des lits disponibles : je n'insisterai pas. Cette logique technocratique à tous les échelons a pour contrepartie le manque de démocratie au sein des hôpitaux, où l'on ne cesse d'amoindrir le principe électif et de réduire le champ d'action des délégués du personnel.
Rien d'étonnant à cela, puisque l'ARS a été conçue pour contourner les chefs de service, réduisant notre démocratie sanitaire à un huis clos entre directeurs d'ARS, énarques et présidents des GHT, les groupements hospitaliers de territoire. Ces gens ont introduit les principes de la nouvelle gestion publique, la gestion à flux tendus, la quantification croissante de l'acte médical, qui génèrent partout stress et dysfonctionnements. Nous en connaissons les conséquences : les modalités de travail se détériorent ; les équipes perdent jusqu'au sens et au goût de leur métier.
Les personnels de santé réclament à juste titre revalorisation et qualification, mais aussi une certaine considération, un fonctionnement plus inclusif, associant les représentants syndicaux et les représentants des assurés sociaux à tous les niveaux de décision, au lieu qu'ils aient simplement troqué les mandarins d'hier contre les managers d'aujourd'hui. Là encore, pensez-vous tenir compte de ces propositions et de ces revendications lors de la réorganisation, cette fois, des hôpitaux ?