Alors que les robes noires et plus généralement les professionnels de la justice avaient déjà de très bonnes raisons d'être en colère en raison de la très discutable réforme de la justice et de la réforme injuste des retraites, les voici maintenant frappés de plein fouet par la crise sanitaire liée au covid-19.
Un avocat des Hauts-de-France déclarait récemment qu'il ne savait pas quelle catastrophe il faudrait pour que les autorités s'aperçoivent que la justice est dans le même état de délitement que l'hôpital. En plein coeur de la crise sanitaire, de nombreux barreaux ont dû se substituer à la puissance publique pour fournir aux avocats qui assuraient les audiences urgentes des masques et du gel hydroalcoolique, et cela grâce à des dons reçus. Certains personnels des tribunaux ont même apporté des draps pour fabriquer, en interne, des masques ! Le télétravail s'avère compliqué car les greffiers et les magistrats ne peuvent, faute de sécurisation, se connecter à certains logiciels à distance pour statuer sur des affaires en cours. Il faut, encore une fois, faire appel à la débrouillardise, au bricolage, pour colmater les failles.
Depuis le début de la crise du coronavirus, l'appareil judiciaire tourne au ralenti, laissant de nombreux détenus sur le carreau. Audiences expédiées ou reprogrammées, détentions provisoires prolongées automatiquement : ce temps de coronajustice rend la situation encore plus difficile. On entrevoit le spectre d'une crise judiciaire profonde.
Comment une justice épuisée par le manque de moyens, qui a déjà du mal, en temps normal, à traiter les affaires courantes, va-t-elle faire pour affronter une vague de nouveaux dossiers, du fait de la probable augmentation des contentieux liés au coronavirus, par exemple devant les prud'hommes ? Voilà la question que je vous pose, madame la ministre.