Le 27 février dernier, lors de sa visite à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, le Président de la République a été interpellé par un médecin de l'hôpital. « Il faut sauver l'hôpital public ! », disait ce dernier. Ce cri d'alarme poussé par le personnel soignant, que je remercie une nouvelle fois pour son engagement sans faille, n'est pas nouveau. Depuis maintenant plusieurs années, les hôpitaux publics traversent une crise profonde et très inquiétante. Plusieurs grèves, y compris concernant les établissements publics de santé mentale, ont mis en évidence une situation financière critique. Je l'avais démontré dans les conclusions d'une mission flash menée en 2019 sur le financement de la psychiatrie, distinctes du rapport parlementaire que j'ai corédigé avec Caroline Fiat.
Les soignants manquent de moyens, mais sur le plan de la gouvernance aussi, l'hôpital est en souffrance. Les alertes répétées depuis près de dix ans ont trouvé un écho important lors de la crise inédite que nous venons de connaître et les soignants seront à nouveau dans la rue pour être entendus le 16 juin.
Le système de santé français est très largement basé sur le secteur hospitalier. Il est donc urgent de donner aux hôpitaux les moyens nécessaires pour leur permettre de répondre aux attentes légitimes en matière de santé publique. Les soignants n'attendent ni médailles ni remerciements de la part des politiques, ils attendent des mesures et des moyens concrets pour pouvoir travailler dignement. L'ouverture récente du Ségur de la santé constitue à mon sens une occasion à saisir.
Il est temps d'agir concrètement pour améliorer la situation du service public hospitalier. Encore une fois, je le déplore, il aura fallu une crise comme celle du covid-19 pour que le Gouvernement soit placé devant cette impérieuse exigence. L'hôpital est en grand danger et il doit être doté de moyens importants, loin d'une tarification à l'activité inadaptée. Les soignants, quant à eux, doivent être mieux rémunérés et pouvoir redonner du sens à leur métier.
Comment est-il possible d'expliquer le manque de masques pour les soignants durant une telle crise sanitaire ? Comment expliquer le manque de blouses et de lunettes de protection, comment expliquer le manque de lits de réanimation ? Comment des pays comme la Grèce ont-ils pu traverser cette crise en comptabilisant quarante fois moins de décès que nous ? Les questions sont nombreuses et le Gouvernement devra tirer toutes les leçons nécessaires de la période pour construire un hôpital qui ne subisse plus les crises sanitaires de plein fouet. Alors que les soignants auraient dû être les premiers protégés, ils ont payé un tribut inacceptable, tant physique que psychique.
L'hôpital est un service public qui doit fonctionner en synergie avec les autres infrastructures médicales et médico-sociales du territoire. Arrêtons une bonne fois pour toutes de suivre une logique financière déconnectée des projets médicaux et optons pour un hôpital humain, dont l'objectif premier redeviendrait l'accès à des soins de qualité pour tous. Pour cela, faisons évoluer la tarification à l'activité, qui entraîne toutes ces dérives. La France est l'un des pays européens qui rémunère le moins bien ses soignants hospitaliers : la revalorisation salariale doit être sensible et durable. Après une crise comme celle que nous avons connue, le retour à un schéma salarial antérieur serait une véritable honte. Dans le même état d'esprit, la revalorisation des carrières et des perspectives d'évolution doit être améliorée.
C'est aussi à la crise administrative et organisationnelle qu'il faut s'attaquer. Trop de gestion administrative a entraîné démotivation du personnel soignant et absentéisme. Revenons à la mission de base des hôpitaux : le soin des patients, de tous les patients. Pour cela, le retour à un hôpital humain est primordial. Aussi et surtout, afin de décharger les hôpitaux, une nouvelle organisation territoriale de la santé doit être envisagée. La lourdeur du système actuel nous oriente inéluctablement vers la faillite de notre service public. Favorisons donc le passage progressif aux soins ambulatoires et mettons en place des partenariats public-privé favorisant des parcours de soins cohérents.
En résumé, le groupe Écologie Démocratie Solidarité souhaite des choix forts : plus d'investissements dans les structures, plus de moyens pour les soignants, une revalorisation salariale à la hauteur de leurs missions, et la remise des soins et de l'humain au centre des préoccupations de l'hôpital, tant dans le MCO – médecine, chirurgie, obstétrique – que dans la psychiatrie. Madame la secrétaire d'État, le Ségur sera-t-il suffisant pour assurer toutes ces réponses ?