La proposition de loi que nous examinons vise à exonérer de TVA les masques de protection, gels hydroalcooliques et solutions désinfectantes utilisés dans la lutte contre le covid-19. Je commencerai, comme en commission, par dire que je comprends les motivations des auteurs de ce texte, d'autant plus que le rapporteur, M. Straumann, est élu d'un territoire, le Haut-Rhin, qui a particulièrement souffert de l'épidémie.
Toutefois, il me semble que cette proposition de loi n'est adaptée ni à la situation de crise aiguë que nous avons connue ni à la sortie progressive de l'épidémie que nous vivons. L'exposé des motifs indique que les prix des masques, gels et solutions désinfectantes auraient fortement grimpé entre février et mai. Or, hormis le cas, heureusement rare, de commerçants indélicats qui ont tenté de profiter honteusement de la pénurie initiale de masques et de gels pour pratiquer des prix prohibitifs, la tendance générale des prix de ces produits est celle d'une baisse constante.
En outre, dès le mois d'avril, nous avons, par un amendement transpartisan, fait passer de 20 % à 5,5 % les taux de TVA s'appliquant aux masques et aux gels hydroalcooliques. À l'époque, nous avions du reste considéré qu'il s'agissait du meilleur compromis entre la baisse du taux de TVA et le respect du droit de l'Union européenne.
De surcroît, le Gouvernement a décidé, le 1er mai, d'encadrer le prix de vente des masques chirurgicaux, qui ne peut plus dépasser 95 centimes, le contrôle de cet encadrement étant confié à la DGCCRF. C'est la raison pour laquelle, à partir du mois de mai, le prix des masques chirurgicaux s'est tout d'abord stabilisé, avant de baisser, notamment en raison d'une concurrence accrue. Désormais, pour un masque vendu à 65 centimes l'unité, la part de la TVA s'élève à 3,5 centimes ; pour un masque chirurgical vendu au prix le plus élevé de 95 centimes, elle est de 5,22 centimes. Ces montants sont d'une faiblesse insigne.
Si je cite l'exemple du masque chirurgical, c'est parce que cet équipement plus que les autres a concentré les craintes et les attentes de nos concitoyens. C'est aussi le cas du gel hydroalcoolique et des solutions désinfectantes. Puisque le prix des équipements de protection personnels a considérablement baissé et que l'exonération de TVA, si elle était entièrement répercutée, ne permettrait de le réduire que très faiblement, la baisse de la TVA applicable à ces articles ne me semble pas pertinente, quel que soit l'avenir de cette pandémie.
D'autre part, comme nous l'enseignent de nombreux débats antérieurs, par exemple sur la TVA applicable dans le secteur de la restauration, la baisse de la TVA ne se traduit que rarement par un bénéfice direct pour le consommateur. En effet, dans la majorité des cas, les commerçants ne répercutent pas les baisses de fiscalité sur les prix de vente. En réalité, le premier bénéficiaire est alors le vendeur. Or je ne crois pas que la situation actuelle des pharmaciens et de la grande distribution nécessite une réduction de la TVA.
J'ajoute que l'exonération de TVA, si elle n'emporterait pas un gain de pouvoir d'achat, constituerait un manque à gagner pour les finances publiques, déjà cruellement mises à mal par la crise actuelle. N'oublions pas que les petits ruisseaux font les grandes rivières.
Pour résumer, l'exonération de TVA sur ces équipements n'entraînerait pas de baisse significative de leur prix ; elle ne rendrait pas de pouvoir d'achat à nos concitoyens et ne serait qu'un moyen de faire payer à l'État une aide à la trésorerie des pharmaciens et de la grande distribution.
C'est pourquoi les élus du groupe MODEM et apparentés ne voteront pas en faveur de cette proposition de loi.