Intervention de Michel Zumkeller

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 21h30
Garantie salaire-formation — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Zumkeller :

Permettez-moi tout d'abord de me réjouir de l'examen de cette proposition de loi qui soulève un enjeu essentiel : la reconstruction dans le monde d'après. Au-delà de notre économie, c'est bien notre avenir à tous qui est en jeu. La pandémie de covid a eu pour conséquence un arrêt quasi complet de notre économie et risque malheureusement d'entraîner dans son sillage des destructions d'emplois ainsi qu'une augmentation du nombre de licenciements. Les premiers effets sont déjà là : le nombre de demandeurs d'emploi a augmenté de manière abrupte entre mars et avril avec une hausse de 843 000 personnes ; or 843 000 personnes, ce ne sont pas des statistiques mais des vies perturbées, des familles en difficulté, une entrée dans la précarité et des inquiétudes concernant l'avenir.

Des mesures fortes en faveur des entreprises sont bien évidemment nécessaires. Il faut éviter au maximum les faillites, faire preuve de souplesse quant à leurs obligations administratives, reporter, voire annuler quand c'est possible, des cotisations dont elles sont redevables. Le Gouvernement a pris des mesures en ce sens et nous souhaitons bien évidemment qu'elles réussissent. Mais il faudra très probablement faire davantage.

Il est impératif également de tout faire pour mieux accompagner ceux qui aspirent à un premier emploi ou devront retrouver un emploi, et éviter ainsi leur exclusion durable du marché du travail. Les jeunes, en particulier, sont en première ligne face à des perspectives d'embauche restreintes et à un marché de l'emploi en tension ; ils ne doivent pas être une génération sacrifiée.

Nous partageons donc pleinement l'ambition de mieux accompagner nos concitoyens dans la période difficile qui s'annonce. Il s'agirait de créer un congé de transition et un contrat de transition sur la base du contrat de sécurisation professionnelle et du contrat de reclassement. Il est vrai que, depuis sa création, en 2011, le CSP a constitué un dispositif efficace en faveur du retour à l'emploi. Il a été d'ailleurs revu en 2015 pour accroître son caractère incitatif. C'est un dispositif qui fonctionne. Vous proposez d'étendre le dispositif d'un à deux ans et d'élargir le champ de ses bénéficiaires en incluant notamment les CDD, l'intérim ainsi que les contrats de chantier.

Nous nous interrogeons sur les coûts supplémentaires que cette mesure représenterait et sur le fait que ce sont les entreprises qui le paieraient. N'y a-t-il pas une incohérence, à un moment où on constate que les entreprises sont dans la difficulté, de proposer, certes, un contrat, mais de leur demander en plus de payer ? Nous pensons que c'est la limite de cette proposition. La conjoncture économique ne s'y prête pas lorsqu'on prend la mesure des difficultés actuelles des entreprises dans presque tous les secteurs d'activité. Adapter le CSP n'est pas une mauvaise idée, mais cette réflexion doit être menée dans le cadre d'une concertation avec les partenaires sociaux avant toute inscription dans la loi.

Au-delà de cet accompagnement, impératif, cette proposition nourrit aussi une autre ambition : elle vise à encourager la transformation de notre économie en permettant aux personnes de se reconvertir ou de se former à des emplois en lien avec la transition écologique et sociale. Cet objectif, nous ne pouvons que le partager : il est essentiel, à long terme, d'encourager l'évolution de notre économie vers une croissance verte et socialement juste – je parle bien de politique de croissance et je sais d'ailleurs gré au groupe GDR de ne pas avoir cédé au mirage des théories de la décroissance et de conserver au travail toute sa place dans notre société. Cette croissance doit être verte parce que l'urgence climatique n'attend pas. Elle doit aussi être juste parce que les transformations de notre économie ne doivent laisser personne sur le bord de la route sous peine d'alimenter les fractures et le sentiment d'abandon ; tout notre pacte social est en jeu. La période qui s'annonce constitue en définitive un défi pour la cohésion du pays.

Vous l'avez compris, si le groupe UDI-I partage la philosophie de cette proposition de loi, elle présente, selon nous, certaines limites, à cause desquelles nous ne pourrons pas voter pour ; mais nous pensons que le sujet est très important et que, pour les années et les mois à venir, il sera essentiel de pouvoir en discuter avec les partenaires sociaux et de nous mettre tous ensemble autour de la table afin d'essayer d'apporter une solution dans ce sens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.