Intervention de Michel Zumkeller

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 21h30
Gratuité des masques de protection — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Zumkeller :

La proposition de résolution que nous examinons ce soir nous donne l'occasion de revenir sur un sujet qui mérite que l'on s'y attarde : celui des masques de protection.

La première interrogation concerne la pénurie de masques de protection respiratoire FFP2 et les difficultés d'approvisionnement rencontrées dans nos hôpitaux, dans nos EHPAD mais aussi en ville : au plus fort de la crise épidémique, les personnels soignants ont dû faire face sans masque, sans gel hydroalcoolique et sans possibilité de faire des tests. Ce sujet occupe nos débats depuis le début de la crise et a constitué une source d'inquiétude majeure pour les Français, soumis de plus à des injonctions contradictoires du Gouvernement qui, après avoir qualifié d'inutile le port du masque pour le grand public, l'a progressivement rendu obligatoire dans certaines circonstances. S'il était légitime d'orienter au mieux les masques disponibles afin de parer au plus urgent, il était patent cependant que les annonces initiales servaient également à masquer la pénurie. Celle-ci a par ailleurs amplifié le renoncement à certains soins, notamment les affections de longue durée et les pathologies psychiatriques, pour lesquelles un suivi régulier est pourtant nécessaire. Elle a perturbé gravement la vie des résidents en EHPAD et des personnes dépendantes à domicile ainsi que celle des personnes qui les aident au quotidien. Tout ce que je viens d'évoquer fait partie des sujets à l'ordre du jour des commissions d'enquête créées à l'Assemblée et au Sénat. Celles-ci permettront de faire toute la lumière sur les chaînes de responsabilité ayant conduit notre pays à affronter une crise d'une gravité inédite sans masques de protection. Il faudra sans doute revoir en profondeur notre organisation en temps de crise et notre système de veille stratégique et sanitaire. Cette première interrogation renvoie donc au temps d'après, lorsque la crise sera derrière nous.

La seconde interrogation que soulève cette proposition de résolution concerne l'accès des masques pour le grand public. Elle est doublement légitime. D'une part, une deuxième vague à l'été et durant l'automne est toujours possible – les signaux actuels sont certes positifs en France, le nombre de malades hospitalisés diminuant constamment, mais d'autres pays, comme la Chine, connaissent une recrudescence de cas dans des zones encore circonscrites à cette heure, ce qui doit évidemment nous inciter à rester prudents. D'autre part, nous sommes maintenant pleinement engagés dans le déconfinement, ce qui rend les masques d'autant plus nécessaires, leur disponibilité devenant une préoccupation quotidienne. Ils sont désormais obligatoires dans les transports en commun mais également dans les commerces et sur le lieu de travail. La nécessaire adaptation des lieux de travail, avec la mise en place de protections spécifiques et des gestes barrière, représente une charge supplémentaire pour les employeurs alors que notre économie est déjà asphyxiée par plus de deux mois de confinement.

S'interroger sur la distribution gratuite de masques par l'assurance maladie est par conséquent légitime pour des raisons sanitaires mais aussi sociales. Il est évident que cela représente pour les foyers les plus modestes, ceux qui sont à 10 euros près à la fin du mois, un investissement non négligeable.

Notre groupe comprend donc les motifs de votre proposition, mes chers collègues, en divergeant seulement sur le périmètre proposé : faire peser sur l'assurance maladie la gratuité des masques pour l'ensemble des assurés sociaux ne serait pas supportable pour les comptes sociaux, sachant que leur déficit pour l'année 2020 devrait déjà avoisiner 52 milliards d'euros, des milliards dont nos enfants auront à porter la charge. Nous considérons qu'il serait préférable de réserver le bénéfice de la gratuité des masques aux personnes les plus précaires, celles pour qui chaque euro compte : je pense en particulier aux bénéficiaires de la protection universelle maladie – la PUMA – et aux personnes en affection longue durée sous conditions de ressources.

Le groupe UDI et indépendants s'abstiendra donc ; il salue la générosité de cette proposition de résolution mais elle lui semble mal ciblée et un peu tardive.

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