Contrairement à ce que vous voulez nous faire croire, madame la ministre, en nous dressant un tableau angélique du marché du travail, la discrimination à l'embauche est une réalité en France, et contraire aux principes fondamentaux de notre République. En mars 2017, l'association ISM Corum a procédé à une opération de testing à la demande du ministère du travail. Pour cela, 1 500 paires de CV, soit 3 000 candidatures, ont été envoyées en réponse aux offres d'emploi de 43 grandes entreprises françaises de plus de 1 000 salariés, représentant neuf secteurs d'activité et réparties sur la France entière. Sur chaque paire de CV, seuls les noms et prénoms différaient : ils étaient à consonance « hexagonale » sur l'un des CV et à consonance maghrébine sur l'autre.
Sur 843 réponses positives reçues à ces 3 000 candidatures à des postes d'employés et de managers, 36 % favorisaient le candidat dit « hexagonal » et 16 % le candidat dit « maghrébin », ce qui fait apparaître un écart de 20 points, alors même que la formation, l'expérience, l'âge, le diplôme et l'adresse étaient équivalents – et la nationalité française, elle figurait explicitement sur chaque CV, en particulier sur ceux aux patronymes à consonance maghrébine.
Comme le souligne l'Observatoire des inégalités, la discrimination n'est pas seulement ethnique, mais aussi sociale, comme l'ont déjà montré de nombreuses études précédentes. C'est pourquoi nous souhaitons augmenter la fréquence de formation aux discriminations à l'embauche, afin de déconstruire les préjugés et les méconnaissances autour de cette question, et surtout afin d'étendre cette formation à l'ensemble des entreprises. Nous ne comprenons pas pourquoi les structures de moins de 300 salariés, qui constituent l'écrasante majorité des entreprises françaises, ne devraient pas prendre cette question au sérieux et tenter d'y répondre le plus justement possible.